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Du C2 au mission command

Publié le 13 juillet 2011 par Egea

C'est une article du Jane's IDR d'avril 2011 (p 8 : "US Army issues updated version of C2 guidance") qui m'apprend les innovations de la dernière version du Field Manual 3.0 sur les opérations : elle fait suite aux précédentes éditions, celle de 2001 puis celle de 2008. J'ai eu beau chercher sur le web, je n'ai pas vu le document : peut-être suis-je totalement has been ou passé à côté, mais si vous pouviez me donner un lien, ce serait bien.

Du C2 au mission command
source

On distingue au moins trois innovations majeures, qui partent de la notion même de C2. Command and control, que le français traduit trop vite par commandement.

A noter que ce document a été présenté par le Général Dempsey, patron du TRADOC, devenu depuis le CEMA américain (comme quoi, la doctrine est bien plus importante qu’il n’y paraît, du moins selon la perception française).

1/ Dans l’ancienne version, l’ensemble des moyens étaient dirigés par un élément de C2 centralisé. Dorénavant, cette direction se fait par un élément de « mission command » : au fond, et si je comprends bien les choses, il s’agit plus d’insister sur l’effet à obtenir que sur la définition mécanique des objectifs. On met plus en avant les chefs (les commandeurs), et moins les systèmes qu’ils utilisent. Ce qui entraîne plus de subsidiarité. « Mission command focuses on empowering subordinate leaders and sharing information to facilitate decentralised execution ».

2/ Cela nécessite par ailleurs une meilleure définition des opérations d’information. Le document distingue ainsi les activités d’information et d’influence (IIs), et les activités cyber et électromagnétiques.

3/ Enfin, l’environnement futur sera composé de menaces hybrides : « the diverse and dynamic combination of regular forces, irregular forces, criminal elements, or a combination of these forces and elements all unified to achieve mutually benefiting factors ». On sent une évolution qui va au-delà des simples opposants « irréguliers ». Notons au passage qu’on peut douter de cette action « unifiée ».

4/ L’évolution est patente, car elle traduit une sorte de doute : celui de la seule « technique », et donc du modèle technologique américain. Il n’est d’ailleurs pas surprenant que ce soit l’armée de terre qui soit à l’origine d’une telle évolution : c’est logiquement l’armée la moins technique, et celle qui est le plus confrontée à la dure concrétude des choses, à la glaise des affrontements, à la complication d’un réel qui n’est pas « complexe » car il n’est pas facilement appréhendable par un « système ». Il y a une sorte d’humilité intellectuelle devant la réalité qui est assez étonnante de la part d’esprits américains, d’habitude enclins à « transformer le réel ».

5/ Ainsi, les trois innovations vont dans le même sens :

  • La plus grande initiative laissée aux subordonnés part du constat que les moyens automatisés de connaissance de l’information du champ de bataille ne suffisent pas à appréhender convenablement une situation : le brouillard de la guerre ne peut être dissipé par la seule technique, et il faut une appréciation humaine, de contact, pour agir dans des situations humaines ;
  • la distinction, dans les IO, des actions sémantiques par rapport aux actions techniques, vient du même constat : l’influence devient quelque chose de plus élaboré.
  • enfin, l’élargissement des « menaces » à des acteurs encore plus variés que la distinction entre réguliers et irréguliers : la double expérience de l’Afghanistan (les seigneurs de la drogue) et de l’Amérique du sud (Colombie, Mexique et frontière sud des Etats-Unis) ont probablement motivé la description « hybride » du cadre prochain de l’action des forces.

D’une certaine façon, c’est une approche plus européenne qui est ici dessinée.

Ref :

  • l'article du janes (pas lisible directement, il faut acheter, que croyez-vous ?)
  • un article du Gal Dempsey sur le Mission Command.
  • un papier sur l'OTAN et les guerres hybrides.

O. Kempf


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