Non, Alberto Contador n’est pas « mort » et ses attaques à répétition dans la montée du modeste col de Manse ont fait rebondir l’intérêt du Tour en dévoilant les limites actuelles d’Andy et Frank Schleck, pas à la hauteur de leur réputation et de leurs qualités de grimpeurs.
Elles ont aussi offert à Cadel Evans une opportunité pour amener au point de rupture les deux frangins luxembourgeois dans la sinueuse descente sur Gap où un certain Lance Armstrong avait joué les équilibristes à travers champ en 2003 en voulant éviter l’Espagnol Beloki, tombé devant lui !
Dans des conditions difficiles (pluie, froid), Andy et Frank Schleck n’ont pas pu répondre aux assauts de Contador et ils ont aussi et surtout révélé par rapport à Evans leurs lacunes techniques en descente, ce qui est tout de même inattendu et surprenant de la part de deux professionnels candidats à la victoire finale. Le mauvais temps n’est sans doute pas étranger au passage à vide des deux Schleck. Il a surtout donné l’idée de ce coup de semonce à Contador qui a mis les deux Luxembourgois dans leurs petits souliers ...
Ainsi que Basso et le courageux Voeckler. Et il y aurait lieu de se faire du souci pour eux si le mauvais temps se maintenait ces prochains jours, comme les prévisions météorologiques semblent le confirmer. Car le vélo n’a jamais fait bon ménage avec la pluie, ni avec les températures hivernales. Des conditions que le peloton pourrait rencontrer du côté de Sestrières (2'035 m), mercredi, ou sur les pentes du col d’Agnel (2'744 m), de l’Isoard (2'360 m) et du Galibier (2'645 m),jeudi et vendredi ! Ca promet.
Il aura fallu une étape de transition, apparemment anodine, au lendemain du second jour de repos, pour débloquer le classement entre les favoris et creuser des écarts plus importants que les trois grandes étapes pyrénéennes. Un comble. Cette offensive inattendue de Contador, puis Evans et Samuel Sanchez, souligne que le Madrilène est toujours dans la course et qu’il n’a sûrement pas dit son dernier mot. En réussissant ce test, à la surprise générale, il est parti en reconquête avec un allié de circonstance, Cadel Evans, qui compte tout de même près de deux minutes d’avance sur lui au général. Un matelas de sécurité qui rassure, certes, le clan BMC mais qui n’est pas une garantie absolue face aux offensives annoncées de Contador dans les trois grandes étapes des Alpes. Des attaques cinglantes et dévastatrices, surtout sur des pentes à forts pourcentages. Et comme tous les adversaires directs de l’Espagnol, apparemment ressuscité, Evans va devoir serrer les dents pour préserver son acquis en prévision du chrono final. Car on sait que sur ce terrain-là, Contador n’est pas mal aussi…
Quant à Voeckler, il s’est défendu comme un lion, en répondant même personnellement à un démarrage de Contador. Comme à son habitude, il a fait face la fleur au fusil, parvenant à conserver son maillot de leader une journée supplémentaire. Mais il semble bien, malgré son courage et son opiniâtreté, que son règne en jaune soit sur le point de s’achever. Avec les honneurs.
Bertrand Duboux