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Est-ce que les médias sociaux sont une discipline ?

Publié le 22 juillet 2011 par Arnaud Briand

Couverture du livre Social Media ROIOlivier Blanchard, dans son livre Social Media ROI, pose la question, tout comme Jean Dubarnes, sur Interaction. Olivier Blanchard estime que le premier écueil à l’intégration des médias sociaux dans les organisations s’explique par la primauté de la fonction marketing sur ces nouveaux territoires d’expression.

Cette conception du « tout marketing » appliquée aux médias sociaux est totalement erronée. Nous le voyons aujourd’hui, avec l’émergence de nouveaux espaces et blogs orientés « RH/Marque employeur » et « médias sociaux », à l’instar de celui de Franck La Pinta. Les médias sociaux bouleversent certes le marketing et la communication, mais pas seulement, nous dit Olivier Blanchard. Il faut aller plus loin dans la mesure où ils impactent profondément les ressources humaines, le service client, les relations publiques et la business intelligence (cf. schéma ci-dessous).

 

Une étude Econsultancy a montré récemment que 35% des entreprises qui investissent le Web social le font via leur équipe marketing, contre 21% pour l’équipe de communication/RP. Pour Altimeter (cf. étude en date de 2010 intitulée « Career Path of the Corporate Social Media Strategist » (diapositive 19)), 41% des managers impliqués dans des programmes Social Media sont issus d’une formation marketing, contre 1% pour ceux issus de la relation client.

Dans une autre étude menée par InSites Consulting, l’introduction est révélatrice de l’importance d’une organisation ouverte sur le Web social :

Every company is trying to do ‘something’ in social media to surf on the trend. Most often it’s marketing- or campaign-oriented, focusing on short term results. But very few companies succeed in integrating social media throughout the entire organization. Because, in essence, it’s not about social media itself, it’s about the dynamics these networks have unleashed over the last couple of years.

J’ose faire le parallèle avec l’étude Useful Social Media, qui pointe du doigt deux conceptions diamétralement différentes entre les organisations américaines et leurs colistières européennes. Alors que les premières sont opposées à un département dédié aux médias sociaux, les secondes tentent d’y dédier certains collaborateurs. Comme le souligneFranck La Pinta, dans son billet intitulé l’usage des médias sociaux par les entreprises, l’intégration des médias sociaux au business par les entreprises américaines prend corps avec des équipes plus conséquentes, lesquelles voient leurs missions s’étoffer. Les collaborateurs se voient attribuer de nouvelles lettres de mission. En Europe, les entreprises ont une approche plus « silotée », radicalement différente, avec des collaborateurs exclusivement dédiés au Web social.

La question est très délicate, passionnante, tentaculaire et si dépendante de l’ADN de l’organisation. Dans une moindre mesure, l’étude Useful Social Media fait écho à ce qui s’est passé au New York Times il y a quelques semaines, avec le poste de Social Media Editor, incarné par Jennifer Preston, dont la mission a été, pendant un an et demi, d’injecter du social, c’est-à-dire de socialiser la rédaction. Si Jennifer Preston est désormais retournée au pôle reportages car « les réseaux sociaux ne peuvent pas appartenir à une seule personne », la création d’un poste de « social media editor » n’était une étape temporaire dans la vie d’une rédaction.

Ce qui est intéressant dans ces visions, c’est qu’elles « heurtent » la tribune d’Alain Garnier sur Collaboratif-info à propos des réseaux sociaux. Dans son billet, très convaincant, il nous dit que les réseaux sociaux, injectés dans les organisations, ne casseront pas les silos. Ils ouvriront des fenêtres entre des disciplines généralement hermétiques et cloisonnées, mais ne casseront pas les spécialisations nées du taylorisme.

Les médias sociaux créent-ils une nouvelle discipline ou s’intègrent-ils dans des disciplines déjà existantes au sein d’organisations tournées vers le client (customer centricity) ? En matière de gestion de la marque (brand management), les choses sont très claires. Si l’équipe en charge de la marque se focalise uniquement sur les aspects traditionnels (messages, contenus, marketing) en omettant le monitoring des conversations online, alors Olivier Blanchard est sans appel :

Organizations that choose to look at social media merely as a marketing activity without looking at the broader and much more vital scope of their complete brand management practice are headed for trouble.

L’ambition de Nokia, nous dit Jurgen Thysmans, Communications Manager, est que le « social » s’intègre dans le travail de tous afin qu’il ne soit plus seulement une activité marketing. Et, Marta Majewska, VP Digital & Social Media Strategist chez Porter Novelli, d’ajouter :

Most companies still think in silos. Social media is not a department, it’s an approach. It’s important to connect the lobal and local social media level to share best practices.

Couverture du livre Conversation ManagerSteven Van Belleghem, dans son livre « Conversation Manager », nous explique également que les médias sociaux appartiennent à tout le monde dès lors que l’organisation souhaite développer une culture 24/7. Si je crois volontiers tous ces experts (Olivier Blanchard, Jennifer Preston, Steven Van Belleghem), un récent article du Nouvel Economiste nous explique ceci :

En France, la séparation entre la vie privée et la vie professionnelle est plus importante qu’en Allemagne. En Allemagne, les voyages d’affaires, week-ends et autres barbecues sont nettement plus fréquents qu’en France. Cela s’apparente à une forme de « socialisation collective ». …

Si les médias sociaux appartiennent à tout le monde, alors ils risquent aussi d’heurter la culture du travail ? Dépasser la logique marketing dépendrait-elle de la maturité 2.0 de l’organisation, ce qui consisterait donc à lever l’une des premières barrières à l’ouverture, représentée par le manque de croyance du top-management à l’égard des médias sociaux, et notamment du PDG, qui reste le 1er sponsor du changement ?


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