C'est une tentation, pour un état fortement endetté, que de ponctionner sévèrement les budgets alloués à la défense et à la diplomatie. Soyons précis : c'est une tentation surtout parmi les démocraties européennes. Pas de guerres à soutenir, pas de statut à maintenir. Ce peut être aussi le fruit d'une pensée primairement anti-militariste (que l'on songe à Éva Joly qui compare la France à la Corée du Nord parce que nous organisons le défilé de nos forces le jour de notre fête nationale...).
Quand je considère la France, j'ai beau y réfléchir, je ne vois pas comment nous pourrions abaisser les crédits dont dispose notre armée nationale. Si nous voulions faire de grosses économies, il faudrait toucher à de gros postes budgétaires. On pense tout de suite à nos porte-avions, des gouffres financiers. L'inconvénient, c'est que se priver de porte-avions, c'est se priver de la possibilité d'amener une partie de notre aviation dans toutes les régions du monde. Je ne suis pas convaincu que des avions à longue portée (existent-ils seulement ?) puissent suppléer l'absence de porte-avion.
Je crois qu'il faut également bien réfléchir au type d'interventions armées que nous voulons mener. La guerre en Libye coûte cher. Certes. Mais elle ne fait aucune victime civile. A ce stade-là, c'en est même miraculeux. C'est que l'aviation française (mais aussi britannique) utilise des bombes-laser d'une extrême-précision et obéit à des règles d'engagement très strictes. Ces bombes coûtent très cher ; mais elles touchent leurs cibles, pas ce qu'il y a à côté. Des guerres à zéro mort, cela a un coût, et ce coût, il pme paraît nécessaire de le supporter. La suite logique, d'ailleurs, ce sont les drones : coûts astronomiques, mais efficacité sans égale. Ils s'amérioreront toujours plus.
Bref, il ne faut pas toucher à nos capacités opérationnelles, parce qu'elles sont au service de notre diplomatie, si maigres soient-elles au regard de nos ambitions.
Dans le domaine diplomatique, c'est, je le pense, la culture qu'il faut promouvoir par-dessus tout. Or, les centres culturels et les écoles françaises sont les premières victimes de la rigueur, en règle général. Nous devrions à mon avis leur assigner des missions culturelles stratégiques : toucher les élites des pays où ils sont implantés, populariser la culture française, dispenser des cours de langue au plus grand nombre de personnes possible. C'est un domaine où il ne faut pas lésiner. Je pense également qu'il ne faut pas faire l'effort de se replier sur la seule francophonie. Nous avons complètement abandonné tout effort de pénétration culturelle et linguistique chez nos voisins européens. C'est pourtant là qu'il faudrait mettre le paquet, de même qu'en Amérique. Pour que le monde parle français, il faut que les décideurs et les élites pensent "en français". Il faut donc avoir une stratégie audacieuse et agressive de pénétration linguistique et culturelle au sein des élites mondialisées.
Cela suppose de ne pas placer des ânes ignares qui méprisent la culture française comme le socialiste Pascal Lamy qui considèrent le combat sur la francophonie comme un combat d'arrière-garde à des postes à responsabilité. Cela suppose aussi de recentrer nos aides et nos cadeaux à l'étranger vers la diffusion de notre culture (quel intérêt de financer un centre culturel au Chili, n'est-ce pas Monsieur Husson, sauf à ce qu'il bénificie d'une implantation culturelle du français sur place, mais ce n'est pas le cas...).
Bref, il faut avoir une stratégie et nous ne l'avons pas. C'est une dimension à laquelle François Bayrou semblait sensible en 2007 que le MoDem pourrait ajouter dans son programme politique pour 2012.