Le 17 juillet 2010, le billet de mon blog s’intitulait : « Au Vietnam : les démocrates sont des terroristes ». Hier, le gouvernement communiste vietnamien vient de confirmer à nouveau cette politique de terreur qu’il applique pour se protéger d’une révolte possible de la population contre lui.
Le polytechnicien Pham Minh Hoang arrêté le 13 août 2010 a été condamné, après un an de détention, à trois ans de prison suivis de trois années en résidence surveillée pour avoir, selon les autorités, « commis le crime d’activités visant à renverser l’administration populaire ». Le tribunal du parti communiste le déclare « terroriste » et lui reproche l’écriture de 33 billets de son blog parce qu’ils « noircissaient l’image du pays ». En fait, ils montrent un Pham Minh Hoang préoccupé par les problèmes de sa nation, ému face aux peines et difficultés de la société vietnamienne et qui propose des solutions pour les résoudre. Ainsi, ils mettent en relief les causes qu’il défendait et stimulaient ses lecteurs et ses élèves, les chefs de demain, à mieux comprendre les enjeux et à faire quelques chose pour leur pays.
Pham Minh Hoang a vécu 27 ans en France où il vivait bien et en paix, où il a été bien éduqué et a appris à enseigner efficacement. En 2000, il décida de rentrer définitivement à Saigon (aujourd’hui Ho Chi Minh-ville) car il nourrissait depuis toujours l’espoir d’enseigner à ses jeunes compatriotes pour les aider à se forger un avenir solide. Il devint professeur à l’école Polytechnique.
En plus de ses cours, il s’intéresse, par ses activités personnelles, aux problèmes de son pays particulièrement ceux qui touchent l’injustice sociale, la corruption et l’environnement.
Pham Minh Hoang est choqué de la décision du gouvernement du Vietnam d’autoriser la Chine à exploiter la bauxite des hauts plateaux de son pays. Il ne peut croire et ne comprend pas le pourquoi de cette décision qu’il qualifie d’erreur environnementale monumentale nocive pour les vietnamiens. Il n’est pas le seul puisque trois autres professeurs lancent une pétition pour demander au gouvernement de reconsidérer la décision. Il la signe et demande à ses amis et étudiants d’en faire autant. Il s’intéresse aussi aux exactions des gardes-côtes chinois, dans les îles Paracel et Spratleys, contre les pêcheurs vietnamiens. Pham Minh Hoang, reconnu par ses pairs comme un homme sincère, intègre et aimant son pays, est préoccupé par la souveraineté de sa nation et celle-ci devient le fondement de ses oppositions à l’ingérence chinoise dans son pays. Il décrie, pour ces cas, la trop grande et surprenante bienveillance des dirigeants vietnamiens envers les Chinois.
Il ne parle jamais de renverser le gouvernement mais plutôt de faire pression sur ce dernier pour que certaines décisions, qu’il croît néfastes pour son pays, soient amendées et corrigées. En somme, il a fait exactement ce que je fais avec mon blog. J’attire l’attention sur des décisions politiques qui à mon point de vue serviront mal l’intérêt des Canadiens et des Québécois. Heureusement, je vis en démocratie canadienne, car si mon pays avait un gouvernement genre vietnamien, je serais aussi en prison.
Une activité particulière de Pham Minh Hoang tracasse particulièrement les autorités vietnamiennes. Il organise des séances de formation gratuites sur les « sciences du comportement ». Le but est de permettre aux participants d’améliorer la confiance en soi, développer leur sens d’organisation, ressortir les aspects positifs d’une situation donnée, etc… mais il semble que les communistes vietnamiens y voient une machination contre eux. Pourtant cela existe au Canada.
Dans une lettre que je recevais de son épouse, elle s’inquiétait du sort qui serait réservé à son mari en prison suite à son arrestation, des conséquences sur sa fille de 6 ans et des rêves qu’il entretenait pour les jeunes de son pays. En plus du billet mentionné précédemment, j’en ai écrit trois autres sur ce sujet : « Le Vietnam, un État policier: Nouvelle arrestation de Lê Thi Công Nhân », « Le capitalisme a sauvé le communisme vietnamien » et « Facebook sauvera-t-il le Vietnam ? ». On peut les retrouver dans les archives de mon blog. J’ai aussi créé une rubrique sur mon site internet intitulée « Au Secours ! » pour appuyer le mouvement pro-démocratique Viet Tan.
De toute évidence le gouvernement du Canada n’a rien fait pour aider l’ingénieur Pham Minh Hoang depuis son arrestation, pas plus qu’il ne l’a fait pour tant d’autres qui sont sous-arrêt ou emprisonnés pour des motifs semblables. Égoïstement, mon pays semble plus préoccupé par l’obtention d’avantages économiques du Viet Nam que de réclamer justice pour les victimes du parti communiste vietnamien. Ce dernier est dirigé par un gang (ils sont à peine 3 000 membres du parti dans le pays) qui au pouvoir par la force. Ils se protègent mutuellement et utilisent tous les moyens pour garder leurs positions privilégiées supposément au nom de l’intérêt général. Leur modèle, c’est la Chine.
On ne peut rester indifférent face aux injustices que subissent les Vietnamiens sous prétexte que le pays s’est transformé radicalement durant les derniers vingt ans. Il est vrai que le pays a progressé à grand pas et continue dans la même direction. La pauvreté à été divisée par dix. Les entreprises privées se sont multipliées. Le tourisme connait une expansion formidable et avec raison car le pays est pittoresque et très intéressant à visiter. On peut donner crédit au parti communiste vietnamien d’avoir adopté la politique de marché pour développer leur pays mais on ne peut accepter qu’il continue à appliquer le régime dur traditionnel des pays totalitaires et brime le droit d’expression, la liberté individuelle et les autres droits humains.
Les Vietnamiens et les Vietnamiennes sont des individus intelligents, travaillants, intègres, imaginatifs et agréables. On les connait bien à Montréal, où ils sont devenus un apport important au développement de notre ville. Le malheur, c’est qu’ils ne sont pas libres. Le cas de Pham Minh Hoang, un innocent en prison comme tant d’autres, le démontre bien.
Tout comme la France, le Canada doit faire pression pour que les droits de la personne soient respectés au Vietnam et, particulièrement, pour la revue de la peine imposée à Pham Minh Hoang. Qu’il soit libéré, ou encore, qu’il soit transféré avec sa famille au Canada ! Nous avons un grand besoin de tels individus, de tels ingénieurs.
Claude Dupras