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De la bonne utilisation de l'argent public...

Publié le 16 août 2011 par Sid

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'apprends via PC INpact et Clubic que l'HADOPI a déposé au Bulletin Officiel un appel d'offre public dont l'objet est la réalisation d'une étude portant sur, je cite, "marché d'enquête portant sur les freins et les leviers à la consommation licite de biens culturels numériques".

On imagine déjà l'artillerie qui sera déballée pour que la question qui semble tarauder notre chère autorité soit posée à un panel représentatif d'internautes : "pourquoi diable est-ce que vous n'achetez pas chez les majors, bande de radins" ?! Et pour qu'heureusement, croyons-y, une réponse synthétique puisse y être apportée. Pour la modique somme de quatre-vingts mille euros, ce serait la moindre des choses...

Si je conçois tout à fait le besoin de formaliser de telles observations, je me prends à me demander si, comme d'habitude, la question n'est pas mal posée dès le départ. En effet, elle semble superbement ignorer la seule réponse qui s'impose à ma maigre réflexion : l'offre illégale est plus attrayante que l'offre licite. Point... À la ligne.... Huit mots, quatre-vingts mille euros, dix mille euros le mot, pas mal... La question se résumerait donc plus, à mon sens, à se demander quels sont les facteurs qui font que l'offre légale est complètement à la ramasse. D'aucuns pourront ergoter qu'on puisse qualifier ces facteurs de freins à la consommation, mais une telle formulation me semble oublier la concurrence de l'offre illicite, comme si l'éventualité qu'elle disparaisse sous les seuls coups de la répression semblait acquise...

Car cette offre illégale, qui domine depuis longtemps le marché de la "consommation culturelle", pour prendre un vocabulaire cher à l'HADOPI et à l'industrie audio-visuelle, a façonné les usages de manière irréversible. Et ce faisant, elle a créé, quelque part, le référentiel sur lequel l'offre licite va devoir s'aligner sous peine de ne jamais décoller. Car comme le montrent systématiquement les nombreuses études disponibles sur le sujet, le problème se situe bel et bien sur le terrain de l'usage, et non pas sur celui des questions périphériques de la gratuité et de l'impunité. D'ailleurs, comme cela avait été annoncé, de plus en plus d'internautes optent désormais pour des services certes illégaux, mais payants...

Si on prend le problème sous l'angle de la concurrence entre les offres, licites ou non, les facteurs que sont le prix, les restrictions, les problèmes d'interopérabilité et le manque de choix deviennent, en comparaison des conditions offertes par l'offre illégale, tout de suite plus évidents. On se demandera en effet s'il est intelligent de payer cher des contenus, choisis au milieu d'un catalogue limité, dont l'accès est restreint dans tous les sens, à un point tel que soit même pas sûr de pouvoir y accéder ? S'il est sensé de payer un accès de 24h à un film en VOD plus cher que le prix du DVD en magasin ? S'il est encore acceptable, en 2011, de payer des morceaux de musique qu'on ne peut pas copier pour les jouer sur l'ensemble des players à sa disposition, qu'il s'agisse de son baladeur MP3, de son smartphone ou de son autoradio ? Sans parler des offres qui ne sont de toute manière même pas compatible avec les systèmes qu'on possède ? Quand on peut, pour une quinzaine d'euros par mois, accéder à des contenus variés et d'actualité, sans restriction, sans DRM, à des formats standards, qu'on pourra ensuite lire sur la plate-forme de notre choix...

Si certains s'étonnent, à juste titre, qu'on puisse lancer une consultation à 80000EUR pour des réponses qui peuvent sembler évidentes, ce n'est pas ce qui choque le plus le contribuable que je suis. C'est tout simplement qu'une telle étude puisse être financée par les deniers publics. Alors qu'on nous rappelle tous les jours l'ampleur du déficit budgétaire du pays, il est plus que temps de mettre une industrie pleurnicharde qui s'entête à vouloir perpétuer un modèle économique agonisant face à ses engagements... Comme, par exemple, celui de proposer une offre légale attractive en échange des sommes plus que conséquentes engagées par l'État... Et donc payer les études de marché qui seront nécessaires pour y parvenir...


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