(Source : AFP). Mise sous tutelle des Etats, réforme forcée des marchés du travail et des systèmes de retraite: le prix à payer est lourd pour les pays de la zone euro qui ploient sous le poids de la dette et les remèdes proposés ont un goût amer pour les classes moyennes.
Le président de la Banque centrale européenne Jean Claude Trichet a invité le 9 août les gouvernements à « faire leur travail » pour réduire leurs déficits. Sous la pression de l’Allemagne, il s’est montré beaucoup plus sec à l’adresse des autorités italiennes et espagnoles, sommées d’adopter d’urgence une « série de décisions pour accélérer le retour à une situation budgétaire normale ».
Un massacre social.
La marche à suivre pour obtenir l’aide la BCE sous la forme d’un rachat de dette a été détaillée dans une lettre, dont le contenu a été divulgué par le quotidien italien « Corriere della Sera ». La méthode et les mesures réclamées ont soulevé un tollé de protestations dans la péninsule où l’on parle de « mise sous tutelle ».
« C’est un massacre social », a dénoncé le chef de la gauche modérée Luigi Bersani. « Pas question de toucher aux retraites et de mettre à genoux les classes moyennes », s’est pour sa part insurgé Umberto Bossi, le patron de la Ligue du Nord, le mouvement populiste membre du gouvernement dirigé par Silvio Berlusconi.
La Commission européenne montre un embarras certain devant la brutalité de la méthode. La BCE exige en effet des autorités italiennes de trouver 20 à 25 milliards d’économies pour 2013, et pour ce faire préconise une plus grande facilité dans les licenciements, une réforme des systèmes de retraite et de soins de santé, une hausse de la TVA et un programme de privatisations. Peu ou prou les mesures exigées de la Grèce et du Portugal, deux pays placés sous assistance financière par leurs partenaires européens.
« C’est un fait, il va falloir accepter de renoncer à des acquis et de perdre des avantages sociaux », reconnaissent les services de la Commission européenne chargés de contrôler que les gouvernements assistés exécutent bien leurs devoirs. Mais la faute incombe aux gouvernements, car « ils ont trop attendu pour mener les réformes structurelles nécessaires », se défendent-ils. « Aujourd’hui, il n’y a plus de marge de croissance pour aider ces réformes, alors ce sera plus dur », expliquent-ils.
La purge vaut pour tous les Etats endettés. La France va devoir trouver 60 milliards d’euros pour revenir dans les clous d’un déficit à 3% du PIB en 2013. Les mesures seront nécessairement douloureuses, estiment les économistes.
La justification de cette cure d’austérité vaut beaucoup de critiques à la Commission, dont le président, l’ancien Premier ministre conservateur portugais José Manuel Barroso, est décrit comme un « ultralibéral ». « C’est une caricature », dénonce son entourage, qui insiste sur les recommandations faites aux Etats le 6 juin de ne pas tailler dans les dépenses de nature sociale, car ce serait « scier la branche pour la reprise de la croissance » dans l’Union européenne. « La tendance est à la relance. Elle sera molle, mais il faut l’encourager », plaide Bruxelles.
Les indignés se regroupent.
L’austérité imposée risque toutefois de provoquer des réactions violentes, comme cela a été constaté en Grèce. Le chômage des jeunes est devenu alarmant. Un jeune sur 5 est sans emploi dans l’Union européenne et de plus en plus de diplômés ne trouvent aucun débouché.
La colère gronde et les « indignés » se regroupent. Parti d’Espagne, le mouvement mobilise un peu partout en Europe. Une manifestation est prévue en octobre à Bruxelles. « Le mois d’août sera long » sur le front de la crise de la dette et la rentrée sociale s’annonce « chaude », s’inquiètent les services de la Commission.