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Canberra

Publié le 29 août 2011 par Toulouseweb
CanberraLes Australiens face au cas de conscience du JSF.
C’est loin, l’Australie. Mais il convient néanmoins de regarder dans la direction de Canberra pour remettre certaines informations dans leur juste contexte. Cela parce que les difficultés répétées du Joint Strike Fighter, alias Lockheed Martin Lightning II, posent des problčmes de plus en plus inquiétants ŕ Stephen Smith, ministre de la Défense australien : il ne veut en aucun cas aligner un nombre réduit d’avions de combat, męme ŕ titre temporaire, et voit d’un trčs mauvais œil les retards accumulés par le programme F-35. Aussi envisage-t-il des solutions de rechange, lesquelles incitent ŕ la réflexion.
Actuellement, l’Australie s’en remet, pour sa défense aérienne, au McDonnell Douglas/Boeing F/A-18F Super Hornet, une valeur sűre dont 70 exemplaires environ constituent la clef de voűte de la Royal Australian Air Force. Les plus anciens de ces biréacteurs sont en service depuis de nombreuses années et approchent de leur fin de vie opérationnelle. Dčs lors, si les livraisons des 48 F-35 dűment programmés glissent dans le temps, un problčme grave va se poser. Et, ŕ partir de ce constat, il apparaît qu’une difficulté beaucoup plus profonde est en passe d’ętre posée.
Stephen Smith et ses experts, aprčs avoir longuement étudié tous les aspects du dossier, estime que la bonne maničre de faire serait tout simplement de passer commande d’un certain nombre de Super Hornet supplémentaires, pour éviter une rupture jugée inacceptable. Dans la mesure oů d’autres avions seraient achetés ŕ Boeing, probablement vingt-quatre, et sachant que les plus récents des F/A-18A australiens ont encore tout l’avenir devant eux (quelques exemplaires de la commande précédente n’ont męme pas encore été livrés), la tentation serait grande de renoncer purement et simplement au JSF. Une hypothčse, pudiquement qualifiée de Plan B, qui apparaîtrait comme un véritable coup de tonnerre au cœur de la plančte JSF.
Bien entendu, le JSF survivrait ŕ un tel coup dur et l’essentiel n’est pas lŕ. Il s’agit plutôt de constater que les Australiens, dont le sérieux est reconnu de toutes parts, seraient pręts ŕ accepter l’idée de se satisfaire du Super Hornet pendant de nombreuses années, sans passer ŕ la génération suivante d’avions de combat. On voudrait remettre en cause la raison d’ętre et le bien-fondé du JSF qu’on ne s’y prendrait pas autrement…
Un problčme fondamental est ainsi posé : quels que soient ses mérites techniques et opérationnels, ses grandes qualités de furtivité, son caractčre Ťmondialť, le JSF a-t-il vraiment une justification ? Ne serait-il pas, pour une bonne part, le résultat d’un cheminement de pensée dont le lobby militaro-industriel américain a le secret ? On est en droit de se poser la question, en espérant que Stephen Smith, les hauts gradés de la Royal Australian Air Force et les politiques de Canberra décident de nous en dire davantage.
Le débat est d’autant plus complexe qu’il est faussé par des données contradictoires. En effet, s’il devenait nécessaire de renoncer au JSF, en Australie et ailleurs, Super Hornet mis ŕ part, nombre de Forces aériennes pourraient ętre incitées ŕ regarder ŕ nouveau vers le F-16 Fighting Falcon. Lequel a bien vieilli, si l’on ose dire, ayant bénéficié de plusieurs mises ŕ jour qui expliquent qu’il soit toujours en production, plus d’un tiers de sičcle aprčs sa premičre apparition (le YF-16 a volé en 1974). Or le maître d’œuvre du F-16 est aussi celui du F-35 !
Dčs lors, deux éventualités sont ŕ prendre en compte. Soit que chacun se contente de constater que Lockheed Martin est gagnant ŕ tous les coups. Soit que l’on remette en cause, trčs tardivement, la raison męme du développement du JSF. On débouche alors sur une question de doctrine, ŕ examiner ŕ la lumičre de conflit régionaux récents : ŕ côté de machines trčs sophistiquées et extręmement coűteuses de la génération du F-22, les armées de l’Air n’auraient-elles pas avant tout besoin de mettre en œuvre des appareils Ťsimplesť ? Poser a question revient ŕ réinventer le débat lancé par le Pentagone en 1973, quand avait germé sur les rives du Potomac le concept du Lightweight Fighter : mettre en œuvre un avion de combat léger ŕ côté d’un gros biréacteur Ťhaut de gammeť, ŕ l’époque le F-15.
En ces temps de disette budgétaire, la question est intéressante. Et il est par ailleurs étonnant qu’elle nous vienne, implicitement, de la lointaine Australie.
Pierre Sparaco - AeroMorning
Le chroniqueur d’AeroMorning marque une pose pour reprendre son souffle. Il reviendra lundi prochain.

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