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Juan Gris, le cubisme passionné

Publié le 01 septembre 2011 par Les Lettres Françaises

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Juan Gris portrait de Josette 1916

 L’exposition de Gris (1887-1927), exemplaire par son accrochage, offre un parcours complet de cet artiste. Ainsi, les tableaux qui se situent entre les années 1911 et 1918 démontrent magnifiquement que, même si Gris ne fait pas partie des « inventeurs » du cubisme, il est tout sauf un simple suiveur du fameux tandem formé par Braque et Picasso. Certes, comme ces derniers, il entreprend les renversements des plans et les variations des angles de vue et explore le domaine du collage (papier journal, morceaux de miroir). Les diagonales qui traversent les compositions de Gris et qui brisent de façon arbitraire les contours des objets, l’attention particulière qu’il accorde aux volumes (Verre et journal, 1916) ou son choix étonnant de l’unité de source lumineuse font partie d’un vocabulaire plastique propre au peintre. En outre, il se distingue de la gamme chromatique cubiste en privilégiant les bleus, les verts et le violet. Mais, avant tout, Gris maintient un équilibre étonnant entre abstraction et figuration en jouant sur la tension entre ces deux registres et pratiquant systématiquement le « tissage», qu’il décrit dans sa fameuse conférence à la Sorbonne en 1924 : « La peinture est pour moi un tissu homogène et continu dont les fils dans un sens seraient le côté représentatif ou esthétique, les fils le traversant pour former ce tissu seraient le côté technique, architectural ou abstrait.»

Équilibre où, à la différence des efforts cubistes d’unifier l’ensemble de la toile – figure et fond – à l’aide d’une mosaïque formée de fines « tesselles », Gris ne cesse, même dans sa période analytique, de pratiquer les contrastes. Contrastes des couleurs, contrastes des aplats et des reliefs, contrastes entre la fragmentation et le resserrement, contrastes entre surface et profondeur, entre intérieur et extérieur.

L’œuvre se modifie durant les dernières années de sa vie. Les formes, raffinées, s’assouplissent et perdent leurs contours coupants, laissant la place à des lignes plus ondulantes ou à des volumes arrondis. Retour à l’ordre, selon l’expression de Cocteau qui a fait fortune ? Sans doute. Mais pas plus que chez Braque, son ami proche ou encore Picasso.

Itzhak Goldberg

« Juan Gris. Rimes de la forme et de la couleur ». Musée Paul-Valéry, Sète, jusqu’au 31 octobre 2011. Catalogue : Éditions Au fi l du temps, 116 pages, 36 euros.

N°85 – Septembre 2011



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