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Le Borussia en bourre

Publié le 13 novembre 2010 par Rémy Dodet @dribulations

Le Borussia en bourre

Barrios remise sur Kagawa qui lance Gotze en profondeur. L'ailier droit avale son couloir, repique dans l'axe et ose une pichenette. Le ballon s'élève puis échoue au second poteau. Pas d'inquiétude. Le bien monté Gosskreutz est là pour talonner en retrait. Barrios, qui rôdait, propulse le cuir dans les cages désertées, au terme d'une action collective à faire pâlir Arsène Wenger. On joue la 70e, le Borussia Dortmund vient de doubler la mise et d'assommer le Hambourg SV. 2-0, balle au centre. On en rigole encore. Quoi ? Ces noms ne vous disent rien ? Il va pourtant falloir s'y habituer. Le club phare de la Ruhr est le nouveau patron de la Bundesliga et ses joueurs impressionnent. Sa convaincante victoire sur le 6e Hambourg nous a redonné le sourire. Commémorations du 11 novembre obligent, il convenait de s'intéresser au championnat le plus sous-côté du vieux continent. Souvent raillé , peu médiatisé, le pays des buts faciles a régalé son monde d'un match intense et enjoué, aux antipodes des clichés qui le marquent à la culotte.

Le Borussia en bourre

Août 1997, c'est la reprise. Un maillot jaune et noir au design douteux envahit les pelouses des clubs amateurs de France et de Navarre. La cause : trois mois plus tôt, Dortmund raflait la coupe aux grandes oreilles, au nez et à la barbe de la Juve de Zizou. Depuis ? Wélou, ou presque. Le titre en 2002 et une Super Coupe d'Allemagne il y a deux ans. Pas super donc. Le BVB 1909 a même frôlé la faillite en 2005. Vous comprendrez qu'affirmer que le bon début de saison des jaunes et noirs - invaincus en championnat depuis la 2ème journée - a ravivé l'espoir des 78000 supporters du Westfalenstadion est un doux euphémisme. Hier, en dominant sans trop forcer une valeureuse équipe d'Hambourg, les troupes de Jürgen Klopp ont poursuivi leur série d'invincibilité, accru leur avance et mis la pression sur leurs concurrents. Il comptent désormais une avance de 10 points sur le Bayer Leverkusen, 13 sur Hambourg et 15 sur le Bayern. Inutile de dire que les petits copains de Kaiser Franck vont devoir cravacher s'ils aspirent toujours à se succéder à eux-mêmes. Après une première mi-temps équilibrée et avare en occasions, l'équipe en vogue d'Outre-Rhin a accéléré. Dès la reprise, suite à un jeu en triangle à une touche de balle rondement mené sur le côté droit, le latéral Piszczek délivra une merveille de passe en retrait à Kagawa.

Kagawa : 21 ans, 1 mètre 72, 63 kilos..

Le meneur de jeu, jusque-là peu en réussite dans ses choix, ne se fit pas prier et crucifia le portier adverse. Cette offrande, la fameuse " arme fatale ", eut pour effet de débrider la nouvelle gâchette japonaise du club qui mitrailla dès lors à tout va. Dribbles, jeu dos au but, passe courtes ou en profondeur, le joueur débarqué cet été en provenance de l'extrême Orient pour la somme colossale de ...350 000 euros, a réfléchi la lumière sur ses partenaires.

Le Borussia en bourre
C'est d'ailleurs lui qui fut à l'origine du second but, juste avant de quitter le pré sous une standing ovation frissonnante. Outre ce joueur atypique, dont la gestuelle et le positionnement rappellent ceux d'un " meneur à l'ancienne ", le club centenaire possède d'autres atouts. Sahin, milieu défensif et international turc de 22 ans qui apporte la fougue et une touche de diversité à l'entre-jeu, Gotze, grand espoir allemand, court sur pattes et en mal de vitesse, et Lucas Barrios, élégant buteur paraguayen aux allures de Marouane Chamakh. Voilà pour les principaux. Avouez que ça en jette.

Que les jaunes et noirs produisent du jeu, on s'y attendait. N'est pas leader de la Bundesliga qui veut. Mais que ce jeu soit si léché et si tranchant à la fois, on ne le soupçonnait pas. Le Borussia joue sans se prendre la tête, avec une simplicité réjouissante. Un pressing haut et l'occupation de toute la largeur semblent être les consignes de base du coach. Pour le reste, l'équipe se projette très rapidement vers l'avant et pratique un jeu direct, à une touche de balle, auquel près de la moitié des joueurs participe. Ça va vite, c'est beau et ça plante. Oui Monsieur, Dortmund joue exactement comme l'équipe d'Allemagne à la Coupe du monde 2010. Et tout le monde aime ça. Ajoutez à l'ensemble un stade de 80000 places remplis tous les samedis de " zouaves " emplis de bières dont le panel de chants mérite un bouquin à lui tout seul, et vous obtenez un cocktail détonant.

22h25, le match est terminé depuis déjà dix minutes. Les vainqueurs, flanqués de leurs remplaçants, sont là, assis dans l'herbe, sous la pluie, savourant leur succès, remerciant le 12ème homme. L'un d'eux donne le signal, les autres se lèvent, puis dansent et sautent comme des cabris. Une certaine idée du football.


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