Une semaine après l’Université d’été du Medef, une question demeure: à quand la prise de conscience du lobby patronal français? Entre réalisme et aveuglement, la stratégie du Medef menée par Laurence Parisot est un mystère.
Un article publié en collaboration avec l’ALEPS (*)
Laurence Parisot lors de l'Université d'été du Medef, à Jouy-en-Josas, la semaine dernière
Il est des pays où le lobby patronal est très efficace : l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie en sont des exemples. Il n’a jamais été dans la tradition française, hier celle du CNPF ou aujourd’hui celle du Medef, de jouer un rôle politique ouvert, voire même occulte. Le Medef a choisi depuis longtemps d’être un « partenaire social » d’une loyauté totale : ses principaux souscripteurs sont de grandes entreprises (naguère publiques) qui préfèrent négocier avec les ministères et les syndicats des compromis ponctuels plus ou moins heureux, mais qui n’influent en rien l’évolution de la législation du travail ou de la fiscalité.
Les choses n’ont pas changé avec Laurence Parisot, qui avait « besoin d’air » au début de son mandat mais s’est essoufflée avec la crise. C’est en tout cas l’impression qu’elle a donnée au cours de cette Université d’Eté du Medef tenue à HEC à Jouy-en-Josas la semaine dernière. La tonalité générale a été : les temps sont durs, faisons notre travail d’entrepreneurs. En invitant le président de l’Union Européenne, Herman Van Rompuy, elle faisait passer un message de résignation et de patience : les choses vont s’arranger, l’Europe veille, et on sort de la crise. C’est un certain aveuglement, les chefs d’entreprises « de base » ont poussé de gros soupirs.
Mais il est tout aussi révélateur de voir la timidité, voire le silence, du Medef autour du plan Fillon. Certes l’appel des 16 (de Monsieur Proglio à Madame Bettencourt) n’a pas été suivi de grand monde, les patrons responsables n’ayant aucune envie de se sacrifier sur l’autel de la dette publique. Mais les agressions fiscales contre les actionnaires, contre l’épargne salariale, contre les exemptions des heures supplémentaires, contre les complémentaires et les mutuelles, n’ont pas été dénoncées. Le patronat s’imagine-t-il que ce mini plan de 20 milliards de sacrifices imposé aux entreprises, aux salariés, aux classes moyennes, et plus encore cette attaque frontale contre le capital et le patrimoine soient de nature à redresser nos finances publiques ?
Le réalisme est invoqué : il ne faut pas assassiner le candidat Sarkozy ni dénoncer son bilan, de peur de voir le candidat socialiste l’emporter. Ce faisant, le patronat se condamne au silence, et accepte que la majorité actuelle dise n’importe quoi et fasse de l’activisme socialiste.
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Article repris du site de l’ALEPS, Libres.org, avec l’aimable autorisation de Jacques Garello.
(*) L’ALEPS, présidée par le Professeur Jacques Garello, est l’Association pour la Liberté Économique et le Progrès social, fondée il y a quarante ans sous l’autorité de Jacques Rueff, dans la tradition intellectuelle française de Jean Baptiste Say et Frédéric Bastiat.