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11 septembre, Ivan Rioufol commémore Bush, et pourquoi pas Pinochet ?

Publié le 12 septembre 2011 par Vogelsong @Vogelsong

“(…) pour mesurer les erreurs d’appréciation de la pensée moutonnière, qui ira jusqu’à assimiler le président américain à Hitler.” I. Rioufol le 7 septembre 2011

Si on devait juger de la décrépitude du système éditocratique hexagonal par les débilités que déblatère l’homme-sandwich du Figaro, I. Rioufol, on pourrait aisément parler de stade dépassé. L’omniprésent des plateaux médias, portant haut la marque figaresque (c’est pour cela qu’il est payé, non pas pour ses coups de génie publicistes) commémore à sa manière les 10 ans du drame de Manhattan. À cette occasion, il offre un crémeux gâteau d’anniversaire à J. W. Bush, intitulant un de ses articulets : “11 septembre : Pourquoi il faut réhabiliter Bush”. Non pas seulement pour le féliciter d’avoir mis au supplice les populations d’Irak, couvrant le pays de “chocs et d’effrois”, mais en lui prêtant aussi le rôle d’inspirateur des révolutions arabes. Selon lui “n’en déplaise aux perroquets, l’Irak a été le point de départ de cette révolution des mentalités”. Dans la bétonnière qui sert de machine à raisonner à I. Rioufol, M. Bouazizi, la place Tarhir, et Benghazi, c’est G. W. Bush. En personne.

Christopher Dombrs

by Christopher Dombres

À ce niveau de simplification d’analyse, on touche au presque néant. Mesurant à quel point l’explication neo conservatrice des évènements tient de la fantasmagorie. On peut probablement évoquer des raisons plus ou moins contestables sur le déclenchement des “printemps” arabes, le rôle central des réseaux sociaux par exemple. Mais affirmer qu’“une aspiration démocratique et pro-occidentale de jeunes tunisiens, égyptiens, libyens, est le résultat auquel les néoconservateurs Américains aspiraient (sic) quand ils disaient vouloir aider à démocratiser le monde musulman en le libérant de ses tyrans”, c’est prendre le lecteur pour un parfait ignare. Les néo-conservateurs américains se sont servis de la thématique démocratique pour légitimer une intervention qui, elle, n’en avait rien (de démocratique). I. Rioufol s’y connaît bigrement en tyrans, petits ou grands : souvent barbus à la peau basanée, religieux (mais pas très catholiques). Il projette ses fantasmes ethnicoculturels dans chaque évènement qu’il recrache en salmigondis glaireux, ne manquant aucune occasion de bénir la civilisation occidentale à épiderme blanc, et d’agonir la barbaresque (d’où qu’elle soit, même de Clichy). La géopolitique d’I. Rioufol se résume à ces raccourcis aussi directs que vertigineux, mettant l’administration Bush au pinacle de l’idéal démocratique.

Des milliers de pages d’analyses décortiquent les racines du 11 septembre. Presque autant tentent d’expliquer les soulèvements arabes du printemps 2011. Si l’on s’en tient à la thèse sociodémographique, on peut éclairer les printemps arabes d’une autre lumière loin des délires obscurantistes de croisés paranos xénophobes. Il existe en effet des variables lourdes, des statistiques pertinentes pour qualifier des modèles de sociétés. Les taux d’alphabétisation, d’endogamie, et de fécondité sont totalement étrangers à l’intervention américaine en Irak post 11 septembre. Selon E. Todd, les sociétés arabes qui se libèrent de leurs dictateurs se sont intégrées au modèle historique général. Par l’évolution même de ses structures sociales. La Tunisie a le taux de fécondité le plus faible du monde arabe (2 enfants par femmes en 2005 (comme les USA et la France)). Enfin les taux d’endogamie (mariages entre cousins) “passant de 36% pour les couples mariés depuis plus de trente ans, à 20,5% pour les unions célébrées durant les quatre années précédant l’enquête (1996)”.

M. Mokhefi de l’IFRI dans un entretien de mars 2011, pointait les causes sociales dans les révolutions arabes en ces termes : “je reviens sur la dimension sociale, elle est centrale. Et s’exprime dans les conditions de travail, par le salaire, et une égalité économique”, synthétisant les aspirations de peuples d’orient : “Les trois éléments, la question sociale, la liberté d’expression, et la dignité (en particulier des femmes) sont concomitants et s’emboitent.”

I. Rioufol comme nombre de réactionnaires déverse des tonnes d’ignominies sur la gauche bien pensante, boboïsante, anti-raciste. Celle qui expose ses émotions (sans pudeur certaines fois) face aux indigences du monde. Un pilonnage qui s’interrompt instantanément quand il faut communier avec les divisions blindées américaines, gants d’acier vengeur du monde libre. C’est la caractéristique figaresque du libéral-conservateur, aveugle aux causes sociales et économiques, mais époux complaisant de la soldatesque en croisade.

Sur le site du Figaro, un article daté du 30 août, portant sur la biographie de D. Cheney (vice président de J. W. Bush), évoque la pratique, selon lui efficace, des simulations de noyade. Technique qui consiste à plonger longuement la tête d’un homme dans l’eau jusqu’à ce qu’il suffoque. Et ceci à plusieurs reprises. De façon à briser sa volonté. Technique qu’I. Rioufol qualifierait peut-être de “contestable, mal menée, meurtrière”.

Le 11 septembre 1973, A. Pinochet instaurait une dictature au Chili, au nom d’un certain libéralisme économique. Que les USA ont largement soutenu, “faites crier l’économie (chilienne)” déclara R. Nixon. Après le renversement de S. Allende, les premières mesures consistèrent à enfermer et torturer les opposants ou supposés. Parmi l’arsenal des atrocités figurait la simulation de noyade. On ne sait si dans l’esprit étriqué des nouveaux réactionnaires de 2011 une connexion peut exister entre ces évènements. Si l’utilisation de la force, de la torture pour instaurer un ordre économique trouve une pertinence. Si la thermodynamique du monde n’a pas des racines plus profondes, d’une temporalité dépassant les 4 ans comme semble l’affirmer le penseur, catholique, libéral et conservateur…

… Mais la géopolitique d’I. Rioufol, c’est du hamburger. Deux tranches de pain et beaucoup de viande…

Vogelsong – 11 septembre 2011 – Paris


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