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Robert 2012

Publié le 12 septembre 2011 par Francois Moussirou @LESALONIVRE
Robert 2012En ce qui me concerne, je suis plutôt un maître de l’érection. Mon prénom c’est Robert. Je n’ai pas appris des vers de poètes comme Lamartine, ni lu les lamentations infinies de Victor Hugo. J’ignore complètement ces mondanités ruinées par la sagesse mercantile de mon époque. Moi, Robert 2012, Je suis un pur produit du caleçon. Chez moi tout se passe autour de mon entrejambe. Mes détracteurs m’appellent aussi le queutard. Quand les mecs s’angoissent à envoyer des roses à la première venue, moi je bande. Je bande si fort que je défoncerai même une porte les yeux fermés. Jouir m’a été offert dès la naissance. J’ai toujours intimidé mes semblables avec ma queue. De près ou de loin elle fait décoller le public. J’attire l’attention et même l’émotion des femmes âgées.

Très tôt déjà, j’entendais les compliments fusés au sujet de mes vertus érectiles. Les demoiselles s’empressaient de dire discrètement : « Il aura une belle grosse bite ! Un marteau piqueur à lui seul pour servir l’humanité. C’est pas une cartouche qu’il a entre les jambes ! Un anaconda. Un câble pour dépannage avec grosse clé à molette ». Ensuite il y a eu la période des sorties à la piscine entre copains. Tandis qu’ils se cachaient tous derrière leur serviette dans les vestiaires. Moi l’imbattable robert 2012, je me mettais à poil devant eux. Sans gêne, sans pitié et sans morale. Je blessai le regard de tous ces futurs messieurs accrocs au porno, à la gonflette et la chirurgie esthétique. J’étais le produit d’un monde dominé par la force. Je n’avais point besoin de faire le dur puisque qu’avec mon engin je fermais le clapet de la moitié de la salle. Pour certains crédules, j’avais mangé des épinards à la manière de Popeye. J’étais le gladiateur. La réponse au désir de tout un chacun. Ma réputation je la faisais par le pénis. Je construisais la légende qui m’offrit un palmarès de mille femmes à ce jour.

J’ai donc eu une enfance paisible sans discrimination et sans moqueries. Je n’ai jamais connu ces railleries interminables sur la beauté, les boutons et toutes ces conneries sur la puberté. On venait me voir en pensant trouver des réponses sur le corps des femmes. Je racontais des histoires comme un vieux sage et tout le monde se taisait la tête bourrée d’images que je n’avais parfois moi-même pas vécu. Mes camarades se sentaient vaincus face à quelque chose qui leur avait été ôtée dès la naissance. Des kilomètres de confiance en soi. Une bonne érection. Une qui ne triche pas, une qui ne conduit pas des tout-terrains en ville, une encore qui ne met pas des caleçons de marque. Une érection sans bavardage qui se dévoilait très vite derrière mes vêtements choisis pour la démonstration de force.

Les plus vicieuses m’abordaient avec un sourire complice. Elles étaient en confiance. Tout se passait très vite. Quelques regards suffisaient à me soulever comme un soldat ayant pour ordre de tirer. Les plus intelligentes avaient ce don de me raconter de belles histoires comme un premier rendez-vous galant mais le but était le même se taper la bête de foire. Le mythe de la rage. La rencontre avec la bête. Le retour à l’état sauvage. Un nombre interminable de fantasmes, de pensées exotiques que je me devais de combler tant bien que mal. J’étais comme ces personnes qui exercent ces métiers qui vous obligent à côtoyer de près la folie humaine. J’avançai donc dans la vie avec en apparence un ego sans faille.

Plus tard, je suis devenu une sorte de croix rouge du sexe, le resto du cœur des désirs. Mon physique adapté sur-mesure aux circonstances faisait de moi une bonne brute de sexe. J’avais des qualités de psychologue à la seule différence que ma thérapie se fichait royalement de s’allonger sur un divan et raconter son passé pendant des heures. Toute l’efficacité résidait dans la possibilité donnée au corps humain d’être sa propre victime. De trouver des réponses dans un masochisme sans limite. Dans des actions où raisonner était inutile. Je m’en tirai avec des soirées où les peines de ces femmes se purgeaient dans une violence contre la bête de foire. Je voyageai dans des vies de couples sans saveurs à vous faire regretter vos premiers amours. J’imaginai ces hommes dans un désespoir sans réponses puisqu’il en était rien. Résolument, un imaginaire collectif qui souffrait de ne pas assez vivre. De ne pas aimer suffisamment et de se priver de sa liberté.

J’étais donc arrivé au bout de mes quarante années de servilité au corps humain. Quelques phrases entendues lors de mes ébats et consultations masculines traînaient encore dans mon crâne : « Chérie, ton ancien pénis ne me dérangeai pas. Celui-ci est différent et c’est mieux ! ».J’avais entendu des inepties tout au long de ma vie. Je m’étais laissé moudre et mouler dans ce vase de l’homme en rut. Une image de moi séduisante sans rapport avec une vraie vie. Le voyage se présenta à moi comme un remède à la paranoïa collective à laquelle j’avais participé. Deux semaines déjà que j’avais quitté mon domicile lubrique, j’étais sur une aire d’autoroute autrichienne en direction de Budapest. Un après-midi près d’une station d’essence. Je me dirigeai vers les toilettes. A l’intérieur un enfant en compagnie de son père, je me dirige vers l’urinoir, braguette baissée, mon engin dans sa stature professionnelle, le gamin se montre hésitant à uriner. Je laisse glisser un sourire repensant à toutes ces balivernes gentiment évoquées à mes copains d’enfance. Devant le supplice infligé au gosse que je regarde franchement, je lui dis : « Petit Robert n’aie aucune crainte ! En moyenne tu t'en tireras pour cinq minutes de plaisir ensuite c’est le grand sommeil ».


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