Primaire : Oral sans dérapage mais sur fond de sinistrose

Mais quelle mouche avait donc piqué les candidats à la Primaire citoyenne hier soir ? Plus que de la gravité, il flottait dans le studio une étrange atmosphère, un peu comme si le débat était un concours de têtes d'enterrement. Le poids des enjeux sans doute. Le contexte économique est pourtant suffisamment anxiogène à lui tout seul. Plus que de chiffres et d'additions, c'est d'un horizon dont les français ont besoin.

Attitude correcte exigée. Charte éthique et rassemblement dès le 17 octobre obligent, les débatteurs ont retenu leurs coups. Le souci de ne pas déraper explique en partie l'image d'orateurs sur le frein, artificiellement coincés. Air renfrogné et bougon pour Martine, sérieux surfait pour François Hollande, traits tirés par la fatigue pour Ségolène Royal.

Un peu moins de fiches et un peu plus de tripes. Ce n'est pas en courant après le sérieux que les socialistes mobiliseront les foules. Candidats à la Primaire, fendez l'armure ! Ne vous laissez pas enfermer dans des sujets artificiels dictés par les médias avait-on envie de leur lancer.

Le plus grand danger qui menace la gauche, ce n'est pas Nicolas Sarkozy. C'est la lassitude. Les Français se moquent des batailles d'experts, de savoir si l'endettement doit être limité à 3 ou à 0%. Ils attendent non des objectifs ciselés mais de voir se dessiner un geste, une trajectoire qui les conduise vers l'avenir. Celui qui gagnera 2012 sera celui qui saura redonner au pays le goût de l'avenir. Car il ne s'agit pas d'empiler les promesses mais bien d'allumer un feu, celui de l'espérance.

L'attente est on ne peut plus forte. François Hollande est l'un de ceux qui l'a le mieux compris, parti en campagne bien avant tout le monde. Il faut être crédible et avoir une grande espérance martèle-t-il. Et ça marche. Il commence à se passer quelque chose autour du président du Conseil général de Corrèze. Lundi dernier, à Paris, pour son meeting au Trianon la salle était pleine à craquer. Ce qui n'a pas découragé des dizaines de personnes contraintes à écouter les interventions depuis le trottoir.

Porté par les sondages, François Hollande commence à cristalliser sur ses épaules le poids d'une victoire sinon probable, assurément possible en 2012.

Attention toutefois comme le rappelait ce matin Laurent Fabius, un brin perfide,  à ne pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Pour être candidat en 2012 il faudra déjà gagner la Primaire. Et question sondages, le lièvre Hollande ne doit pas sous-estimer la tortue Aubry.

Illustration : Meeting de François Hollande à Paris (Le Trianon 12 septembre).