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La Ligue 1 en mal de mots

Publié le 20 septembre 2011 par Rémy Dodet @dribulations

La Ligue 1 en mal de mots

Un derby n'est pas un match comme les autres. N'importe quel amateur s'étant adonné de près ou de loin à la pratique du football le sait : la compétition n'est jamais aussi brutale et bourrée d'enjeux que lorsqu'elle met aux prises deux proches voisins. Et c'est exactement là que réside son intérêt accru pour les médias, avides de rivalités et de duels féroces. A l'heure où la ménagère en est réduite à compter sur les doigts de la main les soirées où elle gobera un autre programme qu'une soirée foot, les chaînes de télé ont plus que jamais besoin de derbys, craignant de voir leurs passionnés se lasser de la répétition infernale de matchs. Les diffuseurs n'hésitent d'ailleurs plus à en créer ex-nihilo. Qu'importe l'enrobage, pourvu qu'on ait l'audience... La 6e journée a ainsi offert un récital en la matière et les abus de langage ont fait florès. De la sérieuse France Info à So Foot, en passant par la foule de sites mercatix, aucun média ou presque ne s'est privé d'évoquer l'improbable " derby de la Garonne " ou le clinquant " Olympico ". A tort.

Qu'on se le dise : les mots ont un poids et leur choix est rarement anodin. A l'origine, Derby est le nom d'une ville britannique dans laquelle chaque mardi gras, dès le 18e siècle, deux paroisses se querellaient lors d'un match de folk football anglais. Par extension, le terme désigne depuis toute rencontre sportive entre deux villes voisines, voire des matchs opposant deux clubs phares d'une même région. Le temps a fait son oeuvre et l'on ne saurait trouver à y redire. Jusqu'à un certain point.

Et c'est là que le bât blesse. Le derby de la Garonne ne remplit aucune des conditions préalables à sa labellisation. Preuves de ce non-sens à l'appui : 1° Aucune rivalité n'anime les deux clubs, distants de 244 km, hormis l'hostilité de rigueur entre deux adversaires - la présumée opposition entre un port de la Lune bourgeois et une ville rose populaire relevant davantage du cliché que d'une analyse pertinente. 2° A-t-on déjà entendu un supporter girondin expliquer sans rire que le derby de la Garonne était le match le plus important de la saison ? Pas le moins du monde. La réciproque est tout aussi valable. 3° Alors que le Stadium compte pas moins de 38650 places, seuls 15353 spectateurs s'étaient déplacés pour l'alléchante rencontre (sic). 4° Le chapitre Origine de la rivalité de la page Wikipédia dédiée au derby est désespérément vide. CQFD.

Il en va évidemment de même pour l' " Olympico ", expression tout droit sortie des cartons de la chaîne cryptée en 2008. Si les deux clubs squattent, il est vrai, le haut du tableau depuis quelques années, il en faut davantage pour susciter une rivalité symbolique et tenace entre deux clubs.

La Ligue 1 en mal de mots
L'ambition - rappeler le fameux Clasico Barcelone Vs Madrid - a jusqu'ici fait rire les vrais supporters, pas dupes de l'entourloupe. Reste une question. Pourquoi ? Pourquoi donc sacraliser sans aucun fondement un non-évènement ? Pourquoi donc adosser un sobriquet douteux à un match somme toute ordinaire ? Pour alimenter la chronique parfois un peu fade d'un long championnat. Pour susciter l'attente, faire de l'obsédé de football un amateur de spectacle fidèle et rendre plus brillant encore le spectacle servi chaque samedi sur son téléviseur. Pire l'on soupçonnerait même la manip' de viser à insuffler chez l'abonné une culture foot importée de l'étranger et adaptée sans trop se fouler à grands renforts de néologismes. N'empêche, qu'importe le dessein, il est des ficelles un peu grosses pour ne pas être aperçues. Et il est même plutôt ridicule de vouloir faire d'une rencontre banale un match pas comme les autres.


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