Magazine Société

Taxe sur les plus-values immobilières : les contribuables font les frais de l’instabilité fiscale

Publié le 22 septembre 2011 par Lecriducontribuable
taxe plus values immobilieres

Le projet de loi de finances rectificatif pour 2011 adopté le 8 septembre dernier par le Parlement modifie le régime fiscal des plus-values immobilières pour toutes les ventes hors résidence principale : résidences secondaires, terrains et investissements locatifs. Une réforme qui ne manque de léser les contribuables. Analyse et témoignages.

Pour ces biens, l’abattement pour durée de détention a été revu à la baisse ; l’exonération totale s’applique désormais au-delà de la trentième année de détention, contre quinze ans auparavant. Cette réforme s’applique aux « plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er février 2012 » (article 1er, II).

Dans sa formulation actuelle, le texte piège de nombreux propriétaires de terrains qui, ayant signé une promesse avant l’annonce du plan de rigueur par François Fillon le 24 août, ne pourront pas finaliser leur vente avant le 1er février 2012, date de son entrée en vigueur. Souvent, ces propriétaires attendent une modification de la règlementation locale d’urbanisme, condition préalable à toute cession définitive, ce qui est assez classique pour des terrains à bâtir.

Une situation injuste et inéquitable

Un vendeur qui, dans le cadre d’une promesse de vente signée devant notaire,  s’est engagé sur la base d’une fiscalité connue n’a pas à subir les changements de fiscalité alors qu’il ne peut plus se rétracter ni renégocier les conditions financières.

Le prix de vente aurait pu être défini différemment si la nouvelle fiscalité avait été connue. Comme les théories économiques nous l’enseignent, le niveau de taxation intervient toujours dans la définition du prix. Il est donc injuste d’ébranler le modèle économique des ventes concernées, par l’application d’une disposition fiscale rétroactive de fait.

Cette situation est également inéquitable. Elle place les vendeurs, selon la nature des biens qu’ils souhaitent vendre, sur un pied d’inégalité. Ceux qui souhaitent céder un bien immobilier bâti peuvent encore éviter la réforme jusqu’au 1er décembre car, pour ce type de bien, il ne s’écoule rarement plus de trois mois entre la signature de la promesse et celle de l’acte de vente. A l’inverse, ceux qui ont déjà promis ou veulent céder un bien immobilier non bâti, souvent confrontés à des procédures locales beaucoup plus longues, ne peuvent profiter des dernières opportunités de calendrier.

Une situation contraire à l’esprit initial du projet gouvernemental

Dans le plan de rigueur annoncé le 24 août dernier, la réforme était à effet immédiat mais ne s’appliquait qu’aux ventes dont les promesses étaient postérieures au 24 août, ce qui semblait juste et équitable. De même, dans le premier compromis qui semblait se dégager début septembre, en amont de la discussion parlementaire, on évoquait une date d’application au 1er décembre, date de la signature d’un acte de  promesse de vente.

Ainsi, le compromis final, retenant la date du 1er février pour toute cession, est en contradiction avec l’esprit initial de la réforme, qui souhaitait épargner les signataires de promesses antérieures à l’annonce du Gouvernement.

Une situation lourde de conséquences pour les particuliers concernés, à faible bénéfice pour le budget de l’Etat

En l’état, les contribuables piégés par l’effet rétroactif  de la réforme (principalement des détenteurs de terrains à bâtir), seraient lourdement taxés. Pour certains, la fiscalité était déjà de 20% avant l’annonce du plan de rigueur :

  • 10% au titre de la taxe forfaitaire sur la première cession de terrains devenus constructibles instituée par la loi portant Engagement National pour le Logement de 2006 (Art. 1529 du CGI) ;
  • 10% au titre de la taxe instaurée par l’article 55 de la loi sur la Modernisation de l’Agriculture et de la Pêche de 2010.

Ainsi, la cession d’un bien détenu par une même personne depuis 16 ans passerait de 20% à 46% en tenant compte des abattements prévus par la réforme.

Si l’impact est considérable pour le vendeur, il est marginal pour l’Etat compte-tenu du nombre de ventes concernées sur l’ensemble du territoire.

Lecri.fr

Fruit de trois ans de concertation et de négociations, un projet immobilier tombe à l’eau

Valérie, Danièle et Isabelle ont hérité d’une maison située sur un terrain de 1,5 ha, que l’une d’entre elles souhaite reprendre. Cette dernière propose de vendre une partie du terrain, ce qui l’aidera à indemniser ses sœurs et à financer la rénovation d’un bâtiment de ferme annexe qu’elle souhaite transformer en logements locatifs. De concert avec leur notaire, les trois sœurs s’entendent sur un projet, sondent la mairie qui se dit prête à rendre le terrain constructible puis choisissent un promoteur après de longues négociations. En tout, trois années se sont écoulées. En juin 2011, elles signent une promesse de vente avec un promoteur local. Fin juin, le promoteur rencontre le maire qui se montre plutôt favorable au projet ; il convoque une commission d’urbanisme associant les riverains et associations environnementales pour l’étudier en détails. On évoque une possible révision du PLU pour le second semestre 2012. Subitement, avec le vote de la loi de finances rectificative pour 2011, aux effets rétroactifs, le modèle économique du projet s’effondre.  Chacune des sœurs perd 150 000 € ; celle qui reprendra la maison devra renoncer à rénover le bâtiment de ferme, étant dans l’impossibilité d’emprunter pour régler les soultes. Perte nette pour la commune : trois petits logements locatifs qui ne seront pas réalisés dans le bâtiment de ferme.

Thierry et Maria pourront-ils s’installer à la campagne avec leurs enfants ?

Thierry et Maria attendent leur deuxième enfant. Locataires d’un petit studio en ville, ils projettent de s’installer à la campagne : Thierry y possède un terrain de 1 700 m2 qu’il a scindé en deux. Conservant la plus grande des parcelles, il financera la construction de sa maison avec le produit de la vente de la seconde parcelle. Situées sur un site caractérisé par la qualité de ses paysages, les deux parcelles concernées sont soumises à des prescriptions d’urbanisme relativement contraignantes. Un acheteur se fait connaître mais s’engage, par promesse de vente signée devant notaire en juillet 2011, sous certaines conditions : la vente ne sera définitivement conclue qu’ après modification du PLU, pour permettre une orientation favorable de sa maison. De l’avis des autorités compétentes, cette modification – mineure – est envisageable. Toutefois, la procédure suppose une enquête publique et une délibération d’approbation du conseil municipal (durée de 4 à 6 mois). Thierry et Maria se lancent dans une course contre la montre : si le 31 janvier 2012, date d’entrée en application de la réforme de la taxe des plus-values, la procédure n’est pas conclue, ce qui est probable, ils seront taxés trois fois plus ! Dans ces conditions, pourront-ils concrétiser leur projet ? Si, dès le départ, ils avaient eu connaissance du taux d’imposition effectif, ils auraient changé leur plan, en vendant plutôt la grande parcelle, plus facile à aménager que la seconde…

Articles similaires :


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Lecriducontribuable 47178 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine