Michèle Alliot-Marie part en guerre contre la cybercriminalité. Son nouveau plan d'action, auquel Le Figaro a eu accès, vise à enrayer un phénomène en pleine expansion, avec des dizaines de milliers d'infractions recensées chaque année pour les seules escroqueries en ligne. Savoir pister en temps réel un pédophile, remonter à la source d'un message menaçant envoyé par un terroriste : MAM réclame du concret. Elle souhaite diffuser à l'ensemble des corps de police une culture de la vigilance face aux dérives sur la Toile. Son projet s'inscrit dans la continuité du rapport Breton de 2005. Il s'appuie sur une note de l'ancien patron de la PJ parisienne, François Jaspart, qui a coordonné durant un an et demi, au sein de l'Inspection générale de la police nationale, un travail en commun avec la gendarmerie. En voici les innovations majeures :
L'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLTIC) va devenir l'Office central contre la cybercriminalité (OCC ou O2C). Ses effectifs portés à plus de cinquante policiers et gendarmes vont encore s'étoffer, ainsi que sa section d'assistance technique qui forme les «collègues de province». MAM désire que tout agent de base sache ce que lui offrent les nouveaux outils informatiques et auprès de qui il peut réclamer assistance.
La plate-forme nationale de signalement des contenus illicites gère déjà près de 10 000 messages par an. Ils sont envoyés par des internautes lorsqu'ils tombent sur une image pédophile ou un site incitant, par exemple, à la haine raciale. Portée bientôt à dix opérateurs, cette plate-forme, installée à Nanterre au siège de l'OCC, va disposer de nouvelles armes. «Car ce n'est pas le tout de signaler un comportement répréhensible, affirme un commissaire, encore faut-il que la police ait les moyens d'obtenir des fournisseurs d'accès à Internet les éléments de connexion du suspect pour savoir d'où il communique.» La coopération avec les plates-formes d'autres pays va s'accentuer, pour un signalement européen.
Plus de 150 correspondants régionaux de la PJ ont suivi un stage de quatre semaines pour les initier notamment à l'utilisation des logiciels permettant de perquisitionner à distance. «Si un cyberdélinquant a fait 50 victimes sur tout le territoire, il est plus simple de demander à chacune de coopérer en autorisant la captation à distance des éléments constitutifs de l'infraction plutôt que d'effectuer 50 déplacements», explique un enquêteur.
Les services sont en passe d'obtenir l'autorisation de placer des clés de connexion sur les ordinateurs des particuliers ou des entreprises pour espionner des suspects dans le cadre d'enquêtes sur la délinquance organisée. Cette procédure sera placée sous le contrôle des magistrats, comme le sont les écoutes téléphoniques.
Toute personne ayant subi un vol ou un acte de vandalisme pourra bientôt le déclarer directement par Internet avant de confirmer sa plainte contre X dans un commissariat ou une gendarmerie. À terme, un véritable cybercommissariat verra le jour. L'internaute pourra y signaler les actes de piratage dont il aura été victime et se renseigner sur les dernières tentatives de piratage en masse par des fraudeurs informatiques.
MAM milite pour l'établissement d'une sorte de «liste noire» des sites illicites. Il s'agit d'obtenir des fournisseurs d'accès à Internet, comme Free ou Yahoo!, qu'ils bloquent automatiquement l'accès à certains sites douteux quand la police le réclame. Elle pense aux sites pédophiles qui se développent sur la Toile. «On y trouve aujourd'hui la propagande terroriste, mais aussi des conseils pour fabriquer des explosifs ou même des armes chimiques», s'indignait récemment le ministre de l'Intérieur.
Le ministre de l'Intérieur veut enfin que ses services puissent remonter plus facilement les moyens de paiement des utilisateurs du Net. «Ceux qui achètent des photos illégales sur certains sites seront mieux tracés», prévient l'un de ses collaborateurs. Les tarifs pratiqués pour répondre aux réquisitions de police seront aussi harmonisés. «Ils peuvent varier de 8,50 euros à 30 euros, selon les fournisseurs d'accès !», s'indigne un officier de gendarmerie.
Source Figaro
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