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Le 21/09 à 12h 05, sur National Geographic Channel : « LES PREMIERS MARINS ».

Par Ananda

Sans nul doute, « la première expédition maritime fut une étape majeure dans l’Histoire de l’humanité ».

Reste à savoir quand elle eut lieu.

Aujourd’hui, de nombreux indices poussent les scientifiques à croire que ce fut « il y a 60 000 ans ».

A cette époque se déroula un voyage « d’importance mondiale » au cours duquel « un groupe de marins audacieux » atteignit le continent australien « en un clin d’œil archéologique ».

Quels sont ces indices ?

Tout d’abord, le documentaire nous amène à MONGO PARK, au cœur du SUD EST DE L’AUSTRALIE, dans les pas d’un archéologue local.

Au cours d’une ballade en moto sur ce territoire autrefois « fertile et bordant un grand lac », le LAC MONGO, mais aujourd’hui terre aride, recouverte de dunes, le scientifique a eu la chance de découvrir, il y a pas mal d’années, « un crâne [humain] qui émergeait du sable ». « Formidable exemple des premières sépultures humaines » aux dires du savant, l’endroit recelait un « squelette » dont la taille fut évaluée à 1m 70.

Durant 35 ans, BOWLER (c’est le nom de l’archéologue) s’échina à tenter de dater de façon certaine sa merveilleuse trouvaille. Il fallut attendre l’année 2003 pour que de nouveaux progrès dans le domaine des techniques de datation permettent à Bert ROBERTS de venir enfin à bout de cet épineux problème. Grâce à l’emploi de la LSO (LUMINESCENCE STIMULEE OPTIQUEMENT), il put s’atteler à l’étude de grains de sable qui n’avaient pas vu le soleil depuis leur enfouissement avec le squelette du Lac Mongo. Le principe de cette technique étant que « plus les grains de quartz sont longtemps sous terre, plus ils dégagent de lumière », on obtint, pour ceux de Mongo, la date d’environ 42 000 ans.

Au surplus, les restes humains étaient accompagnés d’outils de pierre qui, eux, s’avérèrent encore plus anciens, de sorte qu’au bout du compte, on en vint à déterminer que la date probable de l’arrivée de l’Homme moderne en terre australienne tournait autour de 50 000 ans B.P.

Sur ce, la génétique vint à la rescousse, et ses analyses de l’ADN des actuels ABORIGENES AUSTRALIENS montra de façon très claire qu’ils descendaient directement de populations venues d’AFRIQUE.

Partant, à partir de toutes ces données réunies, l’on put désormais à bon droit supposer qu’il y a quelques 50 à 60 000 ans, un groupe a quitté L’EST DE L’AFRIQUE et, empruntant la « ROUTE CÔTIERE DU SUD » qui passait par L’INDE et par L’ASIE DU SUD-EST, a terminé son long périple de plus de 15 000 km en Australie.

Cela expliquerait aussi la présence actuelle, dans toute l’Asie du Sud, de groupes aborigènes mélanésiens tels que, par exemple, les populations tribales de l’Inde ou les Negritos des Philippines. A noter que certaines recherches génétiques menées en Inde indiquent que l’ensemble de la population actuelle du sous-continent a pour origine un mélange de deux populations, l’une très ancienne et originaire d’Afrique et l’autre, plus récente (40 000 ans) qui serait originaire du Proche-Orient ou de l’Europe.

Mais revenons à l’Australie.

Ce continent insulaire se trouve à plusieurs centaines de kilomètres des îles indonésiennes qui lui sont les plus proches, ce qui implique que les migrants de l’âge de pierre ne pouvaient pas l’atteindre sans être obligés de traverser un important bras de mer.

En 2007, cependant, Matthew CAWLER se livre à des recherches qui lui permettent de préciser quel était le niveau des océans entre 60 et 50 000 ans B.P : il s’aperçoit que celui-ci était « beaucoup plus bas » que de nos jours, une glaciation ayant entraîné sa baisse notable en retenant l’eau dans les grandes calottes polaires de l’hémisphère nord. A l’époque qui nous occupe, l’Australie et la Nouvelle-Guinée faisaient par conséquent partie d’ « un immense plateau continental » que les géologues ont baptisé SAHUL. Il apparait que ce plateau était clairement séparé du plateau sud-asiatique par « un grand bras océanique ».

Ainsi la thèse de bon nombre de préhistoriens s’est-elle vue confirmée : franchir ce bras de mer entre les îles indonésiennes et l’Australie donna lieu à la « première expédition maritime connue de l’Histoire de l’humanité ».

Manquaient toutefois des preuves plus tangibles et plus concrètes : sites, artefacts, etc….

Sue O’CONNOR tenta de remédier à cette lacune en se rendant au TIMOR ORIENTAL, dans la région de TUTUALA. Là, dans la GROTTE DE DJERIMALAÏ, la chance lui sourit enfin, sous l’espèce de « restes de poisson préhistorique de très grande taille », pour être plus précis des arêtes de THON de 50cm de long. Le Timor était-il, en ces temps, une zone de pêche en haute mer ?

Juste après la découverte du poisson, O’Connor trouve un hameçon en nacre de coquillage, qui « attirait naturellement les poissons ». Cet hameçon était-il en mesure d’extraire de l’eau des poissons de ce type, sachant qu’ « un thon jaune indonésien peut peser jusqu’à vingt kilos » ? Pour le savoir, on l’envoya à l’UNIVERSITE DE CANBERRA où on le soumit à un « test d’extensibilité ».

Résultat ? L’hameçon peut porter environ 60 kg et est donc « largement assez solide pour pêcher de grands poissons de mer ».

Les savants australiens furent ravis de ce « nouvel éclairage » : « cette partie du monde était peuplée de marins expérimentés », capables de navigation en pleine mer et Timor apparait comme « la zone la plus probable du passage vers l’Australie ».

Ceci posé, on peut se poser la question de savoir quelles « difficultés » ces tout premiers navigateurs rencontrèrent.

En effet, plus de 200 km séparaient Timor du Sahul, soit « une distance très importante pour une embarcation préhistorique ».

Et puis, qu’est-ce qui pouvait laisser supposer aux habitants de cette petite île qu’il existait, au-delà de leur horizon, une terre ?

« Sur la plage de Timor, on ne voit que la mer » et certainement pas l’Australie. Et s’ils étaient montés sur le MONT RAMELO, à 8 500 m d’altitude, pour voir plus loin ?

Là encore, les espoirs sont déçus : en haut de cette montagne « on peut voir jusqu’à une distance de 192 km », ce qui veut dire qu’il manque 30 km pour que le regard puisse porter jusqu’à la côte australienne.

Nous en sommes à présent certains : « ils voyageaient vers l’inconnu » et ils réalisèrent un véritable « exploit technique ».

Mais « pour quel motif ? »

Spécialiste du cerveau humain, Tom CREW soutient que, voici 150 à 200 000 ans, l’espèce humaine fut touchée par « une réorganisation totale des connexions dans le cerneau ». Cette réorganisation aboutit à la latéralisation, encore appelée « asymétrie ». « Le CORTEX est plus fin sur la partie avant gauche du cerveau et, au contraire, plus épais sur sa partie avant droite » ; de même, il est plus épais sur la partie arrière gauche du cerveau et plus fin sur la partie arrière droite, ainsi que nous le distinguons clairement sur des radios que nous donne à voir Crew. C’est là, ajoute-t-il, « une caractéristique de l’humanité moderne », liée à « l’aptitude au langage », et il a seulement suffi « d’un seul mâle » pour la propager.

Conséquence directe : « il y a 50 000 ans, ces Hommes nous ressemblent déjà beaucoup », possesseurs qu’ils sont des « aptitudes mathématiques et géométriques » requises pour « construire un vaisseau », ainsi que d’autres aptitudes également indispensables à cette tâche, comme, par exemple, « la capacité d’élaborer des plans ».

Et, de surcroît, l’ADN nous prouve que « tout cela s’est fait très vite » : les Aborigènes d’Australie n’ayant subi que « peu de mutations » depuis leur source originelle africaine, il fallut moins de 330 générations et « 5 à 10 000 ans seulement » pour que leurs ancêtres atteignent le Sahul.

Auraient-ils été poussés par des besoins d’ordre alimentaire ?

A ces époques reculées et dans le cadre de sociétés de chasseurs-cueilleurs, « certaines ressources pouvaient se tarir en quelques semaines ou jours ». En haut de l’échelle alimentaire, se trouvaient notamment « les baies, nourrissantes et faciles à trouver », mais, de ce fait, vite épuisées.

« Quand on n’avait plus rien, on se dirigeait vers les côtes » où pêche et cueillette s’effectuaient «  très rapidement ». Mais après ?

Le préhistorien BARTON s’est lancé dans la recherche de « traces de nourriture » et a été ainsi amené à trouver des « grains de féculents de 16 microns », dans une grotte de BORNEO, la GROTTE DE NIAS. Ces grains appartiennent à une IGNAME EPINEUSE AMERE et font dire au savant que les chasseurs-cueilleurs mélanésiens de l’époque et de cette région « mangeaient des plantes extrêmement toxiques » qui les contraignaient, s’ils les voulaient comestibles, à une « longue préparation ». D’où l’idée qu’ « ils ont dû chercher des solutions de rechange, des terres plus clémentes ». Ce fut là, à n’en pas douter, « un puissant motif pour braver la mer ».

L’exploit qu’accomplirent ces Hommes est comparable à celui de Neil Armstrong. Car, « pour la première fois, des Hommes ont pris leur destin en main et s’en sont remis à leur technologie ». Pas de géant !

Robert BEDNARIK s’est intéressé au « modèle d’embarcation » qu’ils durent utiliser.

Comme nous savons qu’ils possédaient « une large gamme d’outils pour travailler la pierre, chacun de ces outils étant conçu pour une tâche précise », nous pouvons tout à fait supposer qu’ils ont sélectionné le BAMBOU.

Très abondant dans les îles indonésiennes, le bambou apparaît en effet, en raison de sa « très bonne flottaison », comme « le matériau idéal ». C’est ainsi que l’Indonésie de cette période très ancienne vit selon toute vraisemblance « la naissance de la construction navale ».

L’abattage des bambous avait l’avantage de ne prendre que quelques jours. Il suffisait ensuite d’attacher les bambous les uns aux autres au moyen de LIANES « dotées d’une très grande élasticité ».

On obtenait de la sorte un radeau idéal de 13,5 mètres de longueur pour environ trois mètres de largeur.

On ne pense pas que ces gens-là aient fait l’usage de voiles ; ils devaient par contre se servir de PAGAIES, et se laisser porter les VENTS DE MOUSSON.

D’autre part, Steve WEBB postule qu’ils avaient « des aptitudes et des savoirs que nous ne possédons plus » : ils savaient observer avec une très grande attention le ciel (en particulier les étoiles), ainsi que certains indices qui leur auraient suggéré, au loin, « au-delà de leur horizon », la présence d’une terre (grands nuages de fumée pouvant signaler des feux de brousse en Australie, bois flottants, « oiseaux croisés » ou même « goût de l’eau » signalant brusquement, par la perte de sa salinité, le voisinage d’une embouchure de fleuve ; tout cela suffisait à trouver de nouvelles routes maritimes).

Ils auraient pu peut-être, avec cela, disposer de SEXTANTS qu’ils auraient confectionnés avec des arêtes de poisson : rien de plus simple, mais, pour autant, efficacité garantie !

Quoi qu’il en soit, on ne doute plus qu’ils aient possédé des « moyens de communication élaborés » ni qu’ils aient eu « une très bonne connaissance de leur environnement ».

Etait-ce pour autant des « visionnaires » ?

Le croire serait tentant…

Concrètement, comme le souligne un physiologiste de l’UNIVERSITE DE COLUMBIA, le Dr ALAKATI, ils durent résoudre le problème vital de « la soif ». Cette dernière, on le sait, provoque rapidement la déshydratation, elle-même suivie à plus ou moins long terme par un coma et par la mort. Or, l’effort physique a pour effet d’accentuer les pertes en eau que le corps subit, parce qu’il « influe sur la température corporelle », provoque la transpiration ainsi que l’augmentation de la concentration en sel. Il s’ensuit un « rétrécissement des cellules » très dangereux car préjudiciable aux facultés cognitives du cerveau (en cas de perte en eau supérieure à 10%).

Alakati conclut que, dans le cas qui nous intéresse, les premiers marins ont dû être exposés à une perte en eau « très importante » et que, par conséquent, ils ont dû tout faire pour éviter le grand soleil, cependant qu’ils se munissaient obligatoirement de provisions d’eau calculées en conséquence. Dans de telles conditions, leur consommation en eau devait au minimum atteindre les trois ou quatre litres par jour et par personne. Les provisions d’eau étaient sans doute transportées dans des récipients en bambou, qui en maintenaient la fraîcheur. L’ensemble de ces données plaide, à l’évidence, pour des « voyages bien planifiés ».

O’Connor s’est, avec John MOORE, savant américain de Floride, intéressée au « mélange des sexes » qui a dû caractériser ces très anciens groupes de migrants des mers.

Moore explique : lorsqu’un groupe humain émigre dans le but de constituer une future colonie sur un nouveau territoire, « les femmes sont, bien sûr, l’élément déterminant de l’entreprise ». Sans elles, pas d’espoir de progéniture, donc d’implantation durable.

Mais « chaque mélange des sexes a une chance déterminée de réussite ».

On peut donc calculer les proportions favorables au succès d’une colonie et, s’ « il n’y a pas de nombre magique », John Moore peut tout de même avancer avec une certaine assurance qu’avec « 80 femmes pour 20 hommes, « le succès est quasiment assuré ».

Le fait que les ancêtres des Aborigènes de l’Australie aient fait souche implique le succès et, du même coup, rend l’hypothèse d’un peuplement accidentel de l’île-continent « problématique » : dans ces premières sociétés îliennes, « les femmes allaient rarement en mer » et les hommes, seuls, se livraient aux activités de pêche, sur leurs embarcations. Comment retenir, dans ce cas, l’hypothèse qu’un ou plusieurs groupes de marins montés sur des radeaux aient simplement dérivé vers l’Australie de façon fortuite, pour s’y installer ensuite ?

Totalement « impossible », répond John Moore en toute logique.

La création, en Australie, d’une « colonisation viable » impliquait, selon lui, sur les radeaux, la présence d’au moins « quinze couples », qui se seraient par la suite installés.

Non, il s’agissait sans l’ombre d’un doute d’ « UNE ENTREPRISE VOLONTAIRE » émanant d’un « GROUPE ORGANISE QUI N’AVAIT PAS L’INTENTION DE REVENIR ».

Ces gens-là possédaient « les mêmes aptitudes sociales que nous », de même que des aptitudes organisationnelles identiques.

A l’origine de cette toute première « odyssée », il y avait une volonté, et l’assurance qui allait avec. Elle représente « un progrès fantastique dans le développement humain ».

Non contente de témoigner merveilleusement de la « curiosité humaine » et du courage propre à notre espèce, « cette expédition a été déterminante dans le processus de colonisation de la planète » par l’Homo Sapiens et elle annonce cet autre exploit qu’a représenté l’occupation, beaucoup plus tardive mais non moins impressionnante, des deux Amériques.

P. Laranco


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