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La plupart de nos vacations sont farcesques...

Publié le 06 octobre 2011 par Simples Brèves...

La plupart de nos vacations*[*fonctions, occupations] sont farcesques*[*dignes de la comédie]. « Mundus universus exercet histrionam »* [*« Le monde entier joue la comédie » (Pétrone, écrivain satirique latin)]. Il faut jouer dûment notre rôle, mais comme rôle d’un personnage emprunté. Du masque et de l’apparence il ne faut pas faire une essence réelle, ni de l’étranger le propre*[*ni faire de ce qui nous est étranger ce qui nous appartient en propre]. Nous ne savons pas distinguer la peau de la chemise. C’est assez de s’enfariner*[*se maquiller] le visage, sans s’enfariner la poitrine*[*le coeur]. J’en vois qui se transforment et se transsubstantient*[*terme religieux qui désigne la transformation du pain et du vin en corps et sang du Christ ; Montaigne veut dire ici que certains changent totalement leur être en un autre] en autant de nouvelles figures et de nouveaux êtres qu’ils entreprennent de charges ; et qui se prélatent*[*se prélassent, prennent une attitude satisfaite] jusqu’au foie et aux intestins et entretiennent leur office*[*ils gardent l’attitude voulue par leur fonction] jusqu’en leur garde-robe*[*pièce où l’on se change]....Ils enflent et grossissent leur âme et leur discours naturel à la hauteur de leur siège magistral. Le maire et Montaigne ont toujours été deux, d’une séparation bien claire. Pour être avocat et financier, il n’en faut pas méconnaître la fourbe*[*la fourberie] qu’il y a en telles vocation. Un honnête homme n’est pas comptable du vice ou sottise de son métier, et ne doit pourtant en refuser l’exercice ; c’est l’usage de son pays, et il y a du profit. Il faut vivre du monde et s’en prévaloir tel qu’on le trouve. Mais le jugement d’un empereur doit être au-dessus de son empire, et le voir et considérer comme accident étranger ; et lui, doit savoir jouir de soi à part et se communiquer comme Jacques et Pierre, au moins à soi-même.

Je ne sais pas m’engager si profondément et si entier. Quand ma volonté me donne à un parti, ce n’est pas d’une si violente obligation que mon entendement s’en infecte. Aux présents brouillis de cet état*[*situation confuse des guerres civiles] mon intérêt ne m’a fait méconnaître ni les qualités louables en nos adversaires, ni celles qui sont reprochables en ceux que j’ai suivis

Montaigne, Essais, I, 28 (orthographe modernisée)


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