Faites comme je dis, pas comme je fais !

Vendredi 18h45. Cela fait 45mn que Charles patiente dans le petit salon du dernier étage. Il a rendez-vous avec le nouveau DRH qui a décidé de marquer de son empreinte l’histoire de cette entreprise plus que centenaire. La prévention des risques psycho-sociaux est son fer de lance. « Avec une problématique à la mode, il me faut une solution à la mode » a-t-il dû se dire…

Charles tient dans son portfolio la version définitive du projet qu’il compte présenter au DRH : le développement professionnel des collaborateurs par des actions de coaching. Une révolution dans cette entreprise d’ingénieurs dirigée par des ingénieurs !

Charles connaît mieux que personne les répercussions potentielles de son projet. Une vraie bombe à retardement dans ce monde industriel peu soucieux de ces pratiques. Certains dirigeants ricanent dans les couloirs et l’ont même rebaptisé « Projet New Age ».  Pour avoir envie de prêter le flanc à la critique à ce point, il faut être démissionnaire ou fou à lier, se disent-ils.

Ce projet, c’est son bébé. Il a suivi l’année dernière une formation pour être coach certifié et croit beaucoup en cette pratique. Dans cette dernière version qu’il s’apprête à faire valider au grand chef à plumes, il a tout prévu, tout calculé, tout vérifié. Avant de démarrer une usine à gaz sur l’ensemble des collaborateurs, les actions  commenceront avec les collaborateurs « prioritaires » : ceux qui prennent subitement de lourdes responsabilités ou les hauts potentiels que l’on a décidé de positionner sur des postes à forts enjeux.

Seulement, Charles et le DRH n’ont pas la même notion du « prioritaire »…

18h50, la porte du DRH s’ouvre sur un homme détendu qui accueille Charles à bras ouverts. Une poignée de main franche, voire amicale et une main sur l’épaule. L’accueil classique entre personnes du même monde. La réunion s’annonce bien.

19h30. Dans l’embrasure de la porte, Charles ne sourit plus. Il a été un peu surpris d’apprendre que les actions de coaching allaient démarrer pour tous les cadres supérieurs de l’entreprise, sans distinction. Une excellente façon de tuer un beau projet dans l’œuf. Mais après tout, charité bien ordonnée, commence par soi-même…

En revanche, ce qui l’a démoli c’est le regard assassin que lui a lancé le DRH quand il a voulu s’opposer à la divulgation des comptes rendu d’entretien de coaching. Il s’est entendu dire : « Enfin, Charles, évidemment la confidentialité la plus totale sera observée. Seul le comité exécutif pourra prendre connaissance de ces comptes rendus… ».

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