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Non, le droit d'auteur n'est pas mort : éclairage sur la notion d'originalité

Publié le 28 octobre 2011 par Virusphoto @virusphoto
Une dépêche AFP intitulée «Toute photographie n’est pas une oeuvre» a fait grand bruit récemment chez les photographes, au sujet du droit d’auteur. Il faut dire que le laconisme et l’imprécision de cette nouvelle avait de quoi en inquiéter plus d’un. Toutefois, rien de nouveau sous le soleil ! Jetons les chrysanthèmes, laissons de côté cette dépêche et intéressons nous à ce fameux arrêt du 20 octobre 2011, rendu par la première chambre civile de la Cour de Cassation.
De quoi était-il question ?
Deux poissons dans une assiette provençale, et voilà qu’on en fait tout un plat ! Dans les faits, il s’agissait d’un photographe professionnel qui avait remis à la Ville de Marseille des clichés à la rédaction de la revue de la municipalité pour illustrer un article sur la bouillabaisse, et notamment une photographie représentant deux rougets dans une assiette à fond jaune. Cette photographie avait été réalisé antérieurement pour illustrer un ouvrage.
Mais, constatant que la photographie avait également été reproduit dans une image composite sur la couverture de la revue et qu’une affiche, reprenant la page de couverture de la revue litigieuse avait été affichée sur différent panneaux publicitaires de la ville de Marseille, le photographe réclama notamment par courriers recommandés le paiement de la somme de 5.549 euros.
Les courriers restant sans réponse, le photographe assigna alors en contrefaçon la ville de Marseille (et autres) devant le TGI de Marseille. Les juges firent droit à ses demandes, retenant le caractère original de la photographie et condamnant in solidum la Ville de Marseille (et autres) en paiement de la somme de 15.565 euros.
La Ville de Marseille interjeta alors appel. Elle soutenait que :
Citation:

«- la photographie revendiquée par [le photographe] n’est pas susceptible de protection au titre du droit d’auteur faute d’originalité ;
- elle représente des poissons dans une assiette provençale et répond à une commande bien précise - pour illustrer le livre XXX;
- la photographie figurant en page de couverture de la revue est radicalement distincte de celle [du photographe] en ce qu’elle comporte plusieurs poissons;
- le droit de propriété intellectuelle ne protège pas un genre ni un concept;
- [le photographe] ne justifie d’aucune perte d’image ni d’aucun préjudice moral et cherche à percevoir des sommes démesurées.;»


Le photographe quant à lui, demandait confirmation du jugement et soutenait que :
Citation:

«- le tribunal a retenu le caractère original du cliché litigieux [...];
- il a été utilisé [...] pour réaliser une photo composite sans l’autorisation de l’auteur;
- le photographe est fondé à réclamer paiement de ses droits d’auteur tenant compte de deux campagnes d’affichage»


La Cour d’appel, pour rendre son arrêt, retient que :
Citation:

«L’article L111-1 du Code de la Propriété Intellectuelle dispose que «l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous». L’article L112-2 considère comme oeuvres de l’esprit «les oeuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie». La protection est acquise, quel que soient le genre, la forme d’expression de l’oeuvre sous réserve qu’elle soit originale.
L’originalité s’entend du reflet de la personnalité de l’auteur ou de la révélation d’un talent créateur.
En l’espèce le litige porte sur la reproduction de la photographie figurant en page X de la revue de la ville de Marseille dont il est acquis qu’elle correspond à une commande de l’auteur du livre XXX destinée à l’illustrer. Les appelants soutiennent à bon droit que l’originalité ne se confond pas avec la compétence professionnelle.
[Le photographe] n’explique pas en quoi le cliché litigieux représentant deux poissons dans une assiette provençale procéderait d’une activité créatrice révélant sa personnalité nonobstant la position en arc de cercle des poissons et l’angle de vue utilisé. En effet, force est de constater que ce cliché n’est révélateur d’aucune recherche dans les éclairages adéquats, la tonalité des fonds, l’environnement mobilier et les angles de prises de vue. Il ne constitue ainsi qu’une prestation de services techniques ne traduisant qu’un savoir-faire.
C’est donc à tort que les premiers juges ont retenu la qualification d’oeuvres de l’esprit et [le photographe] doit être débouté de l’intégralité de ses demandes fondées sur les articles L111-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.»


Le photographe cette fois-ci malchanceux, forma un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la Cour d'appel. La Cour de Cassation débouta le photographe de sa demande et confirma l'arrêt de la Cour d'appel. La Haute juridiction considère :
Citation:

"qu'ayant relevé que la photographie revendiquée ne révélait, dans les différents éléments qui la composent, aucune recherche esthétique et qu'elle constituait une simple prestation de services techniques ne traduisant qu'un savoir-faire, la cour d'appel, qui a ainsi réfuté les motifs du jugement que M. X... était réputé s'être appropriés en concluant à sa confirmation, en a déduit que la photographie litigieuse n'était pas une oeuvre de l'esprit ; qu'elle a ainsi, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;"Lien vers l'arrêt

Rappelons une évidence qui ne l’est peut être pas pour le profane (ou pour l’UPP qui regrette que La Cour de Cassation aurait pu adopter une position plus ambitieuse et se prononcer sur le fond de l’affaire) : la Cour de Cassation ne juge qu’en droit et pas en fait. Saisi par un justiciable, elle ne peut que vérifier si le droit a été appliqué par la cour d’appel. L’appréciation des faits relève, selon la formule, du “pouvoir souverain des juges du fond”. Ce n'est pas le job de la Cour de Cassation. C’est la loi et c’est à l’article L411-2 du Code de l’Organisation Judiciaire : «La Cour de cassation ne connaît pas du fond des affaires, sauf disposition législative contraire
La Cour de Cassation rejette le pourvoi et confirme ainsi la cour d'appel qui, ayant vérifié que la photographie litigieuse n'avait pas de caractère original (I), n'était pas protégé par le droit d'auteur (II).
I. L’originalité, qu’est-ce que c’est ?
A. Un principe au coeur du droit d’auteur
On sait le plaisir que les photographes ont à citer, sur leur site personnel respectif, des articles du Code de la propriété intellectuelle tel que notamment l’article L111-1.
Mais beaucoup ignorent une notion fondamentale du droit d’auteur : l’originalité. Et pour cause ! En lisant le Code de la propriété intellectuelle, on croirait que le législateur «voudrait sans la nommer nous parler d’elle». C’est pourtant une notion bien vivante mais de nature plutôt discrète.
A dire vrai, on la croise vaguement au détour de l’article L112-4 du CPI qui dispose que «Le titre d’une oeuvre de l’esprit, dès lors qu’il présente un caractère original, est protégé comme l’oeuvre elle-même». Il en découle que le même raisonnement s’applique pour l’oeuvre en elle-même : si elle présente un caractère original, elle sera protégée par le présent code.
Triste constat mais l’originalité, notion fondamentale du droit d’auteur, semble donc avoir été oublié par le législateur sur l’autoroute de la codification. Du côté du droit de l'Union européenne, la directive 93/98/CEE relative à l'harmonisation de la durée de protection du droit d'auteur, une photographie sera originale "si elle est une création intellectuelle de l'auteur qui reflète sa personnalité" (§17).
Mais pouvait-on définir strictement ce que l’originalité doit recouvrir ? La notion n’étant pas défini, elle eu ainsi toute latitude pour s’adapter aux évolutions, et aux différentes oeuvres pouvant faire l'objet d'une protection (photographie, logiciels, art moderne, etc.). Aussi faut-il appréhender cette notion au regard de la philosophie générale des textes et du sens que la jurisprudence a souhaité lui donner.
Vous ne vous étonnerez pas de lire que la Cour d'appel dans cette affaire fonde sa motivation sur cette notion ne renvoyant pas directement à des textes précis :
Citation:

La protection est acquise, quel que soient le genre, la forme d’expression de l’oeuvre sous réserve qu’elle soit originale.


Le droit d’auteur tel qu’on le connaît en France, s’oppose au droit du copyright en ce qu’il s’attache à la personne même de l’auteur. C’est une conception subjective qui protège l’oeuvre parce qu’on y retrouve l’ «empreinte de son auteur». Existe donc une certaine intimité entre l’oeuvre et son auteur.
Cela étant dit, on a encore rien dit sur la notion d’originalité. Disons que, pour vouloir faire simple et éviter d’entrer dans un débat doctrinal, l’originalité n’est pas la banalité. L’originalité n’est pas non plus le mérite en lui-même de l’auteur. Et c’est de façon pratique que la jurisprudence est amenée à apprécier la notion d’originalité, que ce soit en fonction des affaires qu’elle est amenée à traiter bien sûr, mais aussi en fonction de l’oeuvre en question (logiciel, art moderne, photographie, etc).
Ici la Cour d'appel retenait que : Citation:


L’originalité s’entend du reflet de la personnalité de l’auteur ou de la révélation d’un talent créateur.


Le problème de cette notion d’originalité, pour le moins fluctuante et ambiguë est de faire peser une preuve diabolique sur celui qui prétend que son oeuvre est originale.
B. La preuve de l’originalité : une preuve diabolique ?
Précisons d’emblée que la charge de cette preuve incombe au photographe si la personne qu’il accuse d’être contrefacteur lui oppose l’absence d’originalité. L’originalité doit en outre être rapportée cliché par cliché, ce qui peut alourdir le travail de l’avocat si la contestation porte sur une série de plusieurs clichés.
La preuve de l’originalité d’une photo ne posera pas de difficulté lorsque celle-ci saute aux yeux. Tel est le cas de La La jeune fille afghane de Steve Mc Curry, sorte de Joconde moderne de la photographie. On imagine difficilement que l’on puisse contester l’originalité de cette photo.
En revanche, c’est lorsqu’il n’y a pas cette évidence flagrante, cette admiration naturelle, ce «Wow effect» pourrions nous dire encore, face à une oeuvre que l’on s’interrogera sur l’originalité de la photographie et que l’on risquera plus facilement de la remettre en cause.
D’où cette preuve diabolique qui oblige à rapporter l’originalité de l’oeuvre puisque l’on devra caractériser subjectivement cette originalité, sans être sûr qu’elle soit retenue par le juge.
Pour parvenir à rapporter la preuve de l’originalité, il n’existe pas formellement de critères à remplir. Mais à regarder la jurisprudence, on s’aperçoit que le juge s’intéressera à divers éléments et c’est au plaideur qu’il conviendra pour chaque élément d’affirmer de façon convaincante que l’originalité pour ce critère est bien remplie.
A titre d’illustration, on peut citer un arrêt de la Cour d’appel de Pau du 5 avril 2011 (1707/11) qui retient que «L’originalité de la photographie doit s’apprécier au vu de l’angle de vue, l’éclairage adéquat pour mettre en valeur les objets, le cadrage, les contrastes de couleur et reliefs, la composition, le jeu des lumières, le choix des objectifs...»
Dans l’affaire qui nous intéresse, le photographe faisait valoir que :
Citation:

« sa photographie « porte à l'évidence la marque de la personnalité de son auteur », qu'elle représente « une assiette sur laquelle se trouvent deux galinettes dont les têtes et les queues se rejoignent, placées en arc de cercle suivant la bordure de l'assiette et formant deux courbes harmonieuses », que l'assiette « est de couleur safran, évoquant la couleur de la bouillabaisse et de la bourride, plats marseillais réputés », que le long de la bordure de l'assiette, court « un liseré rouge dans les nuances de la teinte des deux poissons », et que le « fond noir » donne « au motif photographié un caractère particulièrement lumineux »


Pour la Cour d’appel ces éléments ne convainquent pas. Et elle reproche au photographe de ne pas expliquer «en quoi le cliché litigieux représentant deux poissons dans une assiette provençale procéderait d’une activité créatrice révélant sa personnalité» et considère pour sa part que «ce cliché n’est révélateur d’aucune recherche dans les éclairages adéquats, la tonalité des fonds, l’environnement mobilier et les angles de prise de vue».
Sans le dire, la Cour d’appel considère que la photo est banale et c’est pour cela qu’elle répond qu’elle «ne constitue ainsi qu’une prestation de services techniques ne traduisant qu’un savoir faire».
On voit ici la conséquence de l’absence d’originalité qui se dessine. Puisqu’il n’y a pas d’originalité, il n’y a pas plus de protection par le droit d’auteur.
II. Si pas d’originalité, pas de droit d’auteur !
On vient de voir que l’originalité était la condition sine qua non de la protection par le droit d’auteur. Si elle vient à manquer, le droit d’auteur ne s’applique pas. Pas de bras ? Pas de chocolat !
A. Et quand y a plus de droit, on fait quoi ?
Vous l’aurez compris, le droit d’auteur ne s’appliquant plus, le photographe ne peut plus se prévaloir de ses droits moraux et de ses droits patrimoniaux, tels que prévu par le Code de la Propriété Intellectuelle. Est-ce à dire que le photographe est privé de rémunération ? Non, on écarte juste ici les textes du Code de la propriété intellectuelle. Ce n’est pas parce qu’un peintre en bâtiment n’est pas un artiste peintre qu’il ne pourra pas faire payer le prix de sa prestation.
C’est très exactement ce que la Cour de Cassation retient : «la photographie revendiquée ne révélait, dans les différents éléments qui la composent, aucune recherche esthétique» et par conséquent «elle constituait une simple prestation de services techniques ne traduisant qu’un savoir-faire».
Le photographe ne pouvait donc pas poursuivre la Ville de Marseille (et autres) en contrefaçon.
Est-ce à dire que le photographe ne pourra rien faire ? Si l’on en revient à la directive 93/98/CEE, déjà citée, codifiée par la directive 2006/116/CE, il est prévu au considérant 16, après avoir s’être intéressé au cas des photographies originales, que «La protection des autres photographies doit pouvoir être régie par la législation nationale».
On se tourne donc vers notre droit national pour savoir qu’elle protection est accordée aux photographies non originales ... et on s’aperçoit que l’on ne trouve rien ! La directive ne fait que permettre une telle législation en disant «doit pouvoir». Elle ne l’impose pas aux états-membres et c’est donc bien dommage.
Les solutions s'offrant au photographe sont alors limités et variables selon la situation (action en responsabilité, concurrence déloyale) mais certainement pas satisfaisante.
Je vous invite à la lecture de cet article de Benoît Tabaka pour prendre conscience de tous les problèmes qu'une telle situation peut susciter, tant pour le photographe que pour celui qui acquiert des droits sur la photographie.
Et l’on en revient à la nécessité d’avoir un droit voisin pour les oeuvres non originales, c’est-à-dire une sorte de droit d’auteur allégé.
Observant toute cette zizanie, vous vous demandez peut-être pourquoi les juges sont ils si méchants ? C'est l'occasion maintenant de remettre les choses à plat.
B. Mais pourquoi sont-ils si méchants ?!
Les juges à l’occasion de cet arrêt sont la cibles de nombreuses critiques. Il faut ici tempérer ces invectives.
D’abord, sur le fait d’avoir à se prononcer ou non sur l’originalité des photographies, il faut préciser que les juges du fond sont obligés d’apprécier l’originalité ou son absence ainsi que de la justifier. Juger, c’est apprécier une situation donnée et lorsque l’on s’en remet à un juge, c’est bien le rôle que l’on attend de lui.
Ensuite, et comme on l’a rappelé en introduction, la Cour de Cassation ne pouvait juger le fond de l’affaire, comme le regrette l’UPP. C’est toujours l’article L411-2 Du Code de l’Organisation judiciaire qui le prévoit.
Les oeuvres protégées par le droit d’auteur devant être empreinte d’originalité, il est normal que le juge, simple «bouche de la loi» soit amené à rechercher celle-ci. Il serait plus grave de constater que des magistrats écartent le droit, parce que leurs convictions personnelles les poussent à agir à l’inverse de la loi. Ce n’est pas leur rôle, c’est celui du législateur qui à la tâche de modifier la loi si elle ne convient pas.
Certes la notion d’originalité n’est pas expressément citée par le Code de la propriété intellectuelle mais elle imbibe toute la matière. Il ne faut pas espérer qu’un juge soit amené un jour à «lâcher» cette notion, pour adopter une conception objective du droit d’auteur tel que le copyright des pays anglo-saxons.
La conception subjective à ses charmes en ce qu’elle donne de la valeur à l’auteur. N’est pas auteur qui veut, comme on le laisse trop souvent croire. Il faut apporter de l’originalité à l’oeuvre. Sans cette notion d’originalité, le simple fait d’écrire ma liste de course sur un papier bénéficierait de la protection du droit d’auteur. Or, il y a bien une différence entre un poème et une liste de course. De même qu’entre la toile d’un artiste peintre et le mur peint par un peintre professionnel. C’est pareil pour la photographie : il y a des photographes artistes et il y a des photographes qui déploient un savoir-faire technique. Les photos dans les banques d’images sont un exemple de photographie technique.
Différencier ces deux types d’activité photographique, n’est-ce pas donner de la valeur ajouté à la photographie artistique et gratifier la personne même de l’artiste ?
Le véritable problème n’est donc pas, selon nous, la notion d’originalité en elle-même ni le fait que les juges soient amenés à l’apprécier. Le problème dans notre situation est l’insécurité juridique qui découle de l’absence de droit d’auteur ou plus précisément, de l’absence d’un régime juridique devant s’appliquer en cas de carence d’originalité.
On a vu précédemment que le droit de l’union européenne autorisait une législation pour les photographies n’étant pas originales. L’Allemagne, qui est comme la France un pays retenant une conception subjective du droit d’auteur, a prévu un régime applicable aux photographies n’entrant pas dans le cadre du droit d’auteur. Et ce régime ne s’avère pas si différent que celui du droit d’auteur classique, on pourrait même parler d’un droit d’auteur allégé.
Enfin, l’autre problème résultant de cette absence de droit applicable aux oeuvres non originales c’est qu’elle offre une formidable voie aux fraudeurs pour s’exonérer d’une contrefaçon. Et en cela, cette situation est particulièrement problématique pour les photographes.
Nos regards noirs devraient donc plus ce tourner vers le législateur et non vers les juges au sujet de cette affaire.
______________
Non, le droit d'auteur n'est pas mort : éclairage sur la notion d'originalitéEt pour une autre approche de cette affaire, je vous invite à lire le commentaire de Me Joëlle Verbrugge,
sur son blog Droit & Photographie.



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