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Georges Brassens : trente ans déjà

Publié le 31 octobre 2011 par Frontere

Georges Brassens : trente ans déjà(Georges Brassens par JLB)

Il y a un point commun entre Jacques Brel (1929-1978) et Georges Brassens(1921-1981). Le premier répondait à la question : « Que vous manque-t-il pour être un poète? », « Y croire », le second, alors qu'on le félicitait d'avoir obtenu le grand prix de poésie française de l'Académie française en 1967, déclarait : « Un poète, ça vole quand même un plus haut que moi. Je ne suis pas poète. J'aurais aimé l'être comme Verlaine ou Tristan Corbière »

Et, si on connaît les chansons écrites par Georges Brassens, on sait peu qu'il a chanté les poètes. Beaucoup seront étonnés à la lecture de la liste que voici : Alfred de Musset, François Villon, Gustave Nadaud, Paul Verlaine, Paul Fort, Victor Hugo, Louis Aragon, Jean Richepin, Antoine Pol, Alphonse de Lamartine, Francis Jammes, Hégésippe Moreau, Théodore de Banville¹.

Il n'y a pas de secret. Brassens, qui avait eu une scolarité agitée, a fait en réalité "ses universités" dans des bibliothèques parisiennes, notamment celle du XIVe arrondissement, où il a dévoré la poésie française de François Villon aux surréalistes. Comme tous les grands il avait commencé par l'imitation².

Et puis comme on lui avait offert une guitare il a opté pour la chanson, même si la frontière est ténue chez Brassens entre chanson et poésie. Pour ma part, natif de Béziers à quelques dizaines de kilomètres de l'île singulière,  j'admire cette Supplique pour être enterré sur la plage de Sète dont voici les dernières strophes :

« Tantôt venant d'Espagne et tantôt d'Italie,
Tout chargés de parfums, de musiques jolies,
Le mistral et la tramontane
Sur mon dernier sommeil verseront les échos
De villanelle³ un jour, un jour de fandago,
De tarentelle, de sardane...

Et quand, prenant ma butte en guise d'oreiller,
Une ondine viendra gentiment sommeiller
Avec moins que rien de costume,
J'en demande pardon par avance à Jésus,
Si l'ombre de ma croix s'y couche un peu dessus
Pour un petit bonheur posthume.

Pauvres rois, pharaons! Pauvre Napoléon!
Pauvres grands disparus gisant au Panthéon!
Pauvres cendres de conséquence!
Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la vague en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances...

Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la vague en révant,
Qui passe sa mort en vacances... »

C'est dans cette chanson que Brassens lance une pique à Paul Valéry, autre sétois illustre : « Et qu'au moins si ses vers valent mieux que les miens
Mon cimetière soit plus marin que le sien »

Il fallait oser.

Notes

¹ cf. Georges Brassens, Poèmes et chansons, éditions musicales 57, 1973
² cf. François Victor-Rudent, Georges Brassens sur les pas de François Villon, éditions Arthémus, 1998
³ chanson pastorale et populaire sous forme de poème à forme fixe, très en vogue au XVIe siècle la villanelle a été reprise au XIXe par les Parnassiens


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