Premiers jours de novembre, lugubre novembre des trottoirs mouillés, des feuillages rouges - un lugubre que j'aime bien, les amours de novembre sont des amours bien nés. Ah, et puis il y a ces Prix littéraires qui reviennent, on les avait presque oubliés ceux-là, les voilà qui s'imposent au grand carnaval des média. Des feuilles tombent, d'autres récoltent les honneurs, dans un pays qui n'aime rien tant que les rosettes les distinctions les grandes gidouilles les commices agricoles. Au point que l'anti-Goncourt, le Prix de l'Inaperçu, ne trouve rien de mieux que de distinguer lui aussi LE roman des romans - alors qu'un anti-prix pourrait au moins avoir la décence de couronner une liste, et non de réduire toute une production à un seul bouquin sur lequel on attire une attention quelque peu surdimensionnée. S'opposer en faisant pareil : autre tropisme franchouille. Bref où vous étiez quand le dernier Goncourt a été annoncé ? Vous ne vous en souvenez pas ? Eh bien rassurez-vous, c'est tout à fait normal. Concentrer autant de moyens, et de si aléatoire façon, sur un seul livre, est certes un peu ridicule. D'autant que le Goncourt est en général le livre que des gens qui ne lisent pas offrent pour les fêtes à d'autres gens qui ne lisent jamais. C'est le papier cadeau qui compte. Et l'estampille. Le Goncourt : bibelot d'étagère, "corner table book", livre destiné à traîner, à prendre le regard en même temps que la poussière. Mais après tout pourquoi bouder notre plaisir : il y a de la ripaille dans toute cette agitation, du gargantuesque. Après tout tout est bon dans le cochon !