Florent Babillote Dossier Santé mentale
J’ai 15 ans. Dehors, il fait nuit noire. Je dors du sommeil profond de l’enfance. Il pleut à mort. La nuit et la pluie se mélangent, se confondent. Un coup fort sur la porte de ma chambre brise le silence de la nuit. Je m’assieds sur mon lit, interloqué.
Le son revient plus fort, insistant, comme un appel. Intrigué, je me lève et j’ouvre la porte. Le couloir est sombre et immense. Je ne reconnais pas son aspect habituel. Une petite lumière clignote tout au bout de cet étrange tunnel cerné de portes. Effrayé, je me mets à marcher dans ce dédale sans issue.
J’avance toujours en ouvrant chaque porte mais seule l’obscurité totale surgit pour me répondre. Je continue mon triste manège, ouvrir une porte, pieds-nus. J’ai froid, j’ai peur. J’ai envie d’hurler mais je ne peux pas. Une voix étrange sort de la nuit comme pour me guider. Des cris terrifiés résonnent dans le silence.
Mon angoisse m’étouffe. Je veux me sauver et retrouver ma chambre. Quelqu’un crie et m’appelle sans répit. Je ne le connais pas mais lui me connaît. Je tourne sur mes pieds comme une toupie. J’ai mal aux oreilles, à la tête, tout tourne de plus en plus autour de moi.
Avoir su, je n’aurais jamais quitté mon lit.
Aussi, je vous donne un conseil avisé: «Si quelqu’un frappe à votre porte en pleine nuit, n’ouvrez pas, n’ouvrez jamais. Vous ne savez pas qui est derrière!».
Aujourd’hui, je sais, hélas. Mais c’est trop tard. La maladie est venue me voir ce soir d’hiver… Elle ne me lâchera plus.
Le combat est constant mais inégal. J’ai cru en mon passé, je doute du présent et j’ai peur de l’avenir.
Bienvenue dans l’univers obscur de mon ombre, bienvenue dans la schizophrénie.
Florent Babillote
Né en 1980, d’un père militaire et d’une mère au foyer, Florent Babillote ressemble à tout le monde: une enfance paisible, entouré et choyé, complice de son frère et de sa soeur.