L’important, quand une tempête arrive, est de trouver un roc, un point fixe sur lequel s’ancrer fermement. Et ça tombe bien, en France, on a très heureusement une flopée d’invariants indécrottables qui émergent au-dessus de la masse bouillonnante et nous indiquent exactement ce qu’il faut éviter.
On pourrait croire que ces récifs vaillamment dressés au-dessus des flots socio-économiques démontés balisent le chemin à suivre comme des phares lumineux dans une nuit d’encre. Eh bien pas du tout ! Ce sont plutôt ces écueils en dentelle de granit, solidement enfoncés dans l’histoire française, qui n’attendent qu’une chose : qu’on se jette sur eux, quitte à s’écraser et couler corps et âme.
Dans la catégorie des gros rochers inamovibles et qui mériteraient pourtant d’être dégrossis à la dynamite, on retrouve en bonne place les membres de notre gouvernement qui ont tous démontrés depuis longtemps leur absolue nullité dans la gestion du pays en général et de la crise en particulier.
J’en veux pour preuve les enfilades de bobards qu’ils nous servent comme des nouilles sur un collier de maternelle à la fête des Mères, notamment en matière de croissance. Jusqu’à très récemment, la France était un pays en croissance (c’est assez invraisemblable quand on regarde la situation actuelle, mais je vous assure qu’historiquement, il y a 20 ans, le pays enregistrait régulièrement une croissance supérieure à zéro). Et nos joyeuses moules de bouchot qui dirigent tout le bazar ne se sont pas gênées pour partir de ce principe et nous annoncer, régulièrement, que la croissance française serait cette année de 1.75%…
Las. Malgré (encore une fois) une prévision fausse, malgré (encore une fois) une croissance nulle au 4ème trimestre, les aimables fruits de mers ne seront pas éjectés de leur siège confortable pour aller pointer à Paul Employ.
On pourrait aussi évoquer les rocs imperturbables qui gênent par leur ventripotente présence le service de nettoyage de l’Assemblée Nationale : dernièrement, ils ont montré toute l’importance qu’ils accordent aux vrais débats de fond(s) et on sent déjà poindre en eux le besoin d’une union nationale pour sauver le pays. Mais tout ce stress qui s’accumule sur leurs chétives épaules de forçats de la politique doit parfois trouver un exutoire et parfois, les petits mots piquants d’un membre de leur coterie suffit à déclencher… des batailles de boulettes de papier. N’oublions pas que la cheville ouvrière de la législation galopante est tout de même rémunérée tant pour dire des conneries consternantes d’un côté que pour lancer des boulettes et des avions en papier de l’autre.
Mais tout ceci ne serait que s’occuper des petits graviers pour oublier les montagnes ou les arbres qui cachent la forêt. Il y a, en effet, des éminences qui forment de véritables sommets, des contreforts inaltérables et que même les plus corrosives des bombes thermobariques, à fission, à fusion ou à anti-matière n’arriveraient à peine qu’à entamer.
Ceux-là mêlent en effet à leur situation cette dose incompressible, inexpugnable et imputrescible de mauvaise foi chimiquement pure et de cynisme sans borne, qui, accouplés à une hontectomie efficace et opérée très jeune, permettent de s’ancrer au plus profond de la croûte terrestre.
Dans ce groupe homérique, on trouve notamment Jean-Pierre Chevènement, qui, dans une élection présidentielle, nous permet de mesurer efficacement le temps qui ne passe pas, les idées qui s’empoussièrent et les programmes qui s’enkystent dans la première moitié d’un siècle révolu depuis plus de dix ans.
On apprend en effet que notre brave petit vieux devient indélogeable de son appartement à loyer modéré, essentiellement parce que sa date limite de péremption est dépassée. On aura bien du mal à pleurer sur son sort et ses émoluments qui lui permettent pourtant largement de se payer un fort joli pied-à-terre dans Paris.
Oh, certes, je sens que certains bouffons me feront remarquer que cette affaire refait surface alors qu’il vient tout juste de présenter sa n-ième candidature et qu’il serait donc populiste de réclamer son départ de cet appartement. Et je répondrai simplement qu’un type qui se présente aux Présidentielles devrait montrer l’exemple et arrêter de se vautrer dans les facilités républicaines.
D’ailleurs, on peut aller plus loin : tous les élus, à commencer par les députés (les lanceurs de boulettes et autres législateurs en roue libre) devraient largement faire un effort sur leurs indemnités, ne serait-ce que pour des raisons purement symboliques.
On goûtera donc avec un plaisir de fin gourmet la vidéo de cet article :
Et là, florilège de réactions truculentes :
« Arrêtons de stigmatiser les parlementaires. » Alain Gest, UMP.
Les pauvres chous. Tous stigmatisés, qu’ils sont. Ca se voit à leur petit teint blafard.
« D’accord, mais faut aussi que le sénat le fasse. » Charles De Courson, Nouveau Centre.
En gros, si les autres le font, oui, bon, ok. Mais là, ils ne veulent pas alors voilà. Tout le monde doit faire des efforts, mais les autres d’abord. Na.
« Faut arrêter ce genre de conneries. C’est un non-sens économique. » Jacques Myard, UMP.
Ceux qui payent pour tes tickets repas apprécieront ton sens de l’économie, surtout quand eux n’y auront plus droit, mon brave Jacques. Merci pour tes efforts.
« C’est moins les parlementaires que les Français qui sont visés par cette proposition. Elle est donc idéologique et dangereuse pour notre pays. » Jean-Marie Le Guen, PS.
A première vue, j’aurais dit qu’elle est surtout très dangereuse pour ton portefeuille et plutôt bénéfique pour le pays, puisqu’on peut, en rabotant subtilement tes indemnités, alléger la facture des Français de 700 millions d’euros.
On notera que les seuls, dans cette vidéo, à comprendre la valeur de l’exemple, sont François de Rugy et Noël Mamère (tous les deux EELV) que je ne porte pourtant pas dans mon coeur mais qui ont, au moins, la décence de proposer quelque chose. On peut être certain qu’ils le font précisément parce qu’ils sont sûr qu’une telle proposition ne passera jamais, mais c’est un autre débat.
Mais pour tous ceux qui, naïf, pensent que ces gens, malgré tout, sont amovibles à la faveur d’un vote, je leur rappellerai que tous ceux-là sont en politique depuis plusieurs décennies.
Ces berniques ne partiront pas.