La philosophie de Descartes repose dès son départ, sur quelques concepts essentiels ; ils forment tout l’édifice de cette philosophie : L’évidence – L’immédiateté – Le cogito. En analysant ces concepts dans leur fondement, nous pourrons observer le seuilet les limites de cette métaphysique.
Le cogito règle d’abord l’espace du doute qui a traîné longtemps chez la pensée scolastique. Le cogito montre finalement que la légitimité du doute n’est que méthodique, c'est-à-dire, qu’il n’y a pas de doute. Le doute est au service de la clarté, de la raison, de l’ordre. Le désordre est un phénomène humain, temporaire, un dysfonctionnement de la raison. Mais l’origine c’est l’ordre. La raison n’a qu’à ordonner méthodiquement les choses, pour qu’elle devienne raison.
Il est donc une question méthodique de résoudre les confusions et les erreurs, pour que la raison devienne ce qu’elle est : une vérité claire, simple et évidente. La raison est elle-même une évidence par sa nature, et ce n’est que l’erreur méthodique qui embrouille la raison.
 partir de là, il faut ordonner les choses, et cela en écartant ce qui embrouille l’évidence. En passant par ce chemin de doute, toutes les confusions tombent et se dégagent, mais l’essentiel reste pertinent : le je qui pense. Cependant, ce n’est pas l’ontologie d’Aristote qui est fausse, mais sa façon d’ordonner les choses ; ce qui manque à Aristote c’est l’ordre ; or en ordonnant cette philosophie, on établit l’évidence suivante : Le je qui pense et que rien ne peut embrouiller. En plus, il est garanti que le je qui pense ne peut pas se tromper pour une raison quasi sûr : Un dieu garant. Le je qui pense est garanti, il s’ensuit que tout ce qui pense et vrai. Le cartésianisme est basé sur cette hypothèse métaphysique.
En se fondant ainsi, le rôle du je, n’est plus que d’ordonner les choses et les rendre évidentes, c'est-à-dire assurer le bon sens. C’est donc quoi l’évidence ? Elle est l’état des choses telles qu’elles sont dans leur essence ; les choses sont claires, et ce qui embrouille leur clarté, c’est le mauvais usage de la méthode. Ce ne sont pas les choses qui sont incertaines, mais le mauvais usage de la raison qui les rend ainsi, quant on ne sait pas ordonner les choses ; ordonner les choses, c’est les mettre dans un état d’immédiateté par rapport à la raison, de façon à ce que cette dernière puisse les concevoir directement.
Les choses sont immédiates par leur nature, et en tant que telles, elles se présentent immédiatement par leur nature simple dans la raison dont le rôle est d’organiser les choses et leur donner un ordre, de façon à ce qu’elles soient disparates, simples, isolées et libres de tout embrouille, et rendues chacune à sa propre identité, à sa propre entité ; les choses sont évidentes lorsqu’elles sont réduites à leur identité, et à leur entité sans confusion, ni composition ; les choses sont évidentes lorsqu’elles prennent leurs formes mathématiques, c'est-à-dire, lorsqu’elles deviennent mesurables et calculables : L’état genre.
Quand les choses sont évidentes, elles deviennent immédiates, c'est-à-dire représentées directement et sans médiation dans la raison. Et donc, la raison c’est rendre les choses évidentes, c'est-à-dire immédiatement représentées dans la raison. Les choses doivent être décomposées pour devenir évidentes, donc immédiates. Les choses doivent être décomposables et composables ; sinon, elles ne peuvent pas avoir le statut de l’évidence et de l’immédiateté. La méthode est donc l’activité de la raison pour composer et décomposer les choses, analyser et synthétiser les choses, c'est-à-dire, leur donner le statut de l’évidence et de l’immédiateté, c’est pourquoi la méthode repose sur la mathesis. La pensée cartésienne est une pensée fondée sur la mathesis dont l’activité est de décomposer les choses pour les mettre nues de toute confusion.
La philosophie cartésienne est une philosophie de présence, la présence c’est la capacité des choses et leur nature simple à se présenter devant la raison, puisque les choses sont de leur nature évidentes et immédiates ; elle est aussi une philosophie de sujet puisque le point de son départ est le sujet pensant que nul ne peut tromper. Lacan détruit la philosophie cartésienne en s’adressant à son point de départ : Le sujet pensant. Pour Lacan, le sujet est pluralité dans sa structure ; le sujet ne contourne pas sa structure intérieur qui reste pour lui impensée. L’impensé c’est l’espace intérieur que le sujet ne peut pas penser ; cet espace est inconscient, et de ce fait, le sujet ne peut pas garantir l’évidence et l’immédiateté : Tout l’édifice cartésien s’effondre. Donc, les choses ne sont ni évidentes, ni immédiates ; le sujet non plus, n’est ni évident, ni immédiat. C’est pour cette raison que les philosophies de présence et de sujet sont des philosophies métaphysiques.
TRIBAK AHMED