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ATR va lontano

Publié le 22 novembre 2011 par Toulouseweb
ATR va lontanoL’avionneur franco-italien en phase ascendante.
C’est une révolution tranquille d’un genre nouveau dans l’industrie aéronautique, l’histoire d’une réussite brillante qui s’inscrit dans la durée : ATR accumule les victoires commerciales, engrange de nombreuses commandes, domine largement le marché des biturbopropulseurs régionaux : 148 avions placés depuis le début de l’année et, actuellement, un carnet de commandes de 267 avions d’une valeur de 5,9 milliards de dollars. Soit 71% du marché, dans la catégorie des 50/90 places.
Filippo Bagnato, directeur général, évoque ce bilan avec sérénité, sans jamais se risquer à utiliser le moindre superlatif. Il affiche, tout au contraire, l’assurance d’un homme sûr de la qualité de ses produits, mieux, de leur supériorité, et qui est prêt à qualifier cette situation de «normale», voire banale. La réalité est évidemment plus nuancée dans la mesure où Finmeccania/Alenia, à Rome, EADS à Paris et Munich, sont ainsi récompensés de leur persévérance. Ou, plus exactement, de la confiance placée de longue date dans un programme qui n’a cessé de s’améliorer, par moment à doses homéopathiques, tout en effaçant peu à peu les préjugés d’un autre temps qui poursuivaient les avions «à hélices».
Le passager «moyen», dans la mesure où il existe, ignore totalement ce que peut bien être un turbopropulseur. Longtemps, il a constaté qu’un avion ainsi équipé avait un petit air rétro, avant de remarquer que les hélices, visiblement réalisées en matériaux composites, sont à mi-chemin entre un symbole de haute technologie et une œuvre d’art. Dès lors, la modernité ne pouvait qu’être bien réelle.
Puis, un jour, notre hypothétique passager moyen a voyagé à bord d’un ATR 72 d’Airlinair, compagnie inconnue au bataillon, que l’on pourrait croire apatride mais qui vole fréquemment pour le compte d’Air France sur des lignes courtes. Dans la pochette du dossier qui lui fait face, notre voyageur a trouvé un petit dépliant lui souhaitant la bienvenue «à bord de notre nouveau véhicule». Quelle curieuse terminologie ! Il n’est pas fréquent d’entendre que l’on voyage à bord «d’un nouveau moyen de transport», dans le confort, certes, mais aussi «le respect total de l’environnement». D’où l’envie de lire la suite, une compagnie aérienne, apatride ou bien française, étant évidemment plus crédible qu’un avionneur qui vante les mérites de ses produits. Un avionneur qui s’appelle ATR, appellation parfaitement hermétique, dont tout le monde ayant oublié qu’elle signifie Avions de Transport Régional, ce qui est trop long, trop compliqué et supporte mal la traduction.
L’essentiel est ailleurs : Airlinair explique que les biturbopropulseurs affichent «une empreinte écologique aussi légère que l’air», des émissions de CO2 très nettement inférieures à celles des jets et même des voitures particulières. Sur une distance de 500 kilomètres, la consommation de carburant au siège/kilomètre est inférieure de 60% à celle d’un avion doté de turboréacteurs, l’émission de gaz à effet de serre est moindre de 30 à 50%. Soit, pour chaque vol, près d’une tonne en moins de dioxyde de carbone rejetée dans l’atmosphère.
Bien sûr, Filippo Bagnato est capable d’en dire plus, avec une grande précision. Mais il convient de s’incliner devant les propos des dirigeants d’Airlinair, premier exploitant européen d’ATR, troisième au plan mondial. Le client est roi et, a priori, objectif. On est d’autant moins étonné d’apprendre qu’au fil des 20 années à venir, 3.000 avions de cette catégorie devraient être livrés, dont les deux tiers issus des usines françaises et italiennes. La distribution géographique des commandes signées depuis le début de l’année est à l’image de ce succès, tous les continents étant représentés, de même que de grands loueurs comme Gecas, aux Etats-Unis. Reste à satisfaire cette demande qui explose, à pousser les feux, à accroître la cadence de production, actuellement un avion par semaine, près du double à l’horizon 2014.
Entre-temps, ATR aura probablement fini de développer et lancé un avion à 90 places qui répondra à la demande pour une capacité accrue. Le trafic progresse aussi sur les réseaux régionaux et il est bien peu probable que le prix du carburant s’assagisse. Dans ces conditions, tous les espoirs sont permis, d’autant que de nouveaux progrès apparaissent, notamment une nouvelle cabine, baptisée Armonia, due au styliste italien Giugiaro, talentueux, qui rappelle si besoin est que les ATR sont des produits «latins».
ATR ne le dit pas mais sa réussite montre que la France et l’Italie sont capables de bien travailler ensemble. D’où le regret que la Péninsule ne soit pas partie prenante dans Airbus et que Finmeccanica reste étroitement lié aux Etats-Unis sans s’ouvrir davantage à l’Europe de l’aéronautique. Heureusement, ATR sauve l’honneur.
Pierre Sparaco - AeroMorning

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