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Tiens, le FN dévoile son nouveau programme socialiste

Publié le 22 novembre 2011 par H16

Comme j’ai eu l’honneur douteux de mettre mon nez dans certains des programmes politiques qui sont disponibles ici ou là, que j’ai commenté la candidature des politiciens en mal de mandat pour mai 2012, et comme j’ai déjà couvert un peu l’extrême-gauche, il me fallait couvrir l’extrême-droite. Ca tombe bien, le site de la candidate du Front National nous propose son projet depuis quelques jours. Miam.

C’est donc sur un site à dominance de bleu foncé (bleu … marine, évidemment) qu’on découvre un petit mot d’introduction de la prétendante et le détail du programme, en plus de ses gambettes mises en valeur à l’extrême-droite droite du site par un petit cliché la montrant le regard décidément tourné vers la gauche.

(Ce qui en dit long, ne trouvez-vous pas ?)

On admirera, au passage, le professionnalisme léché du design du site. On est très très loin du Ségolotron du 2007 qui avait fait loler tous les tréfonds de l’internet.

En outre, on notera que le programme est déjà prêt, là où celui du Parti Officiellement Socialiste est encore en plein milieu d’âpres négociations avec les différentes tendances internes, externes et souterraines du Socialisme De Compromis Franchouille. Et le site de Marine soutient la comparaison avec celui de l’UMP, tant en terme de contenant qu’en terme de contenu (pas dur, du reste).

Ne nous emballons cependant pas. Quand j’écris « soutient la comparaison« , j’implique surtout une franche égalité, dans la rigolade notamment. On pourra s’en taper une petite lorsqu’on se rendra, par exemple, sur la page concernant l’équipe de campagne qui nous propose un méga-scroll de plusieurs kilomètres digne d’un Crédit cinématographique avec les noms des costumiers, des cascadeurs et des sociétés d’effets spéciaux qui ont participé à l’élaboration de ce conte de fée.

Anecdote amusante au milieu de la trèèèèèèèèèèèès longue liste de personnages (dont certains sont présents plusieurs fois), on trouve un certain Gilbert Collard dont on ne saura absolument rien. Du tout. Nib. Zéro. Que dalle.

Collard au FN, le néant.

Si, à présent, on se penche un peu plus sur le contenu du programme, il ne faut pas longtemps pour entendre les gémissements de nos amis journalistes, l’œil affolé et la plume vibrante de l’envie de parler de ventre fécond, de bête immonde, d’heures les plus sombres de notre histoire, ou, plus modestement comme pour les journalistes du Monde, de pleurnicher sur les mesures anti-immigrations d’une Le Pen en pleine forme :

Les mesures anti-immigration prévues par le projet de Mme Le Pen sont extrêmement dures.

Roh. Bah voilà, M’ame Le Pen, vous les avez tout bousculé, nos amis journalistes. Pourtant, sur le coup de l’immigration, ce sont bel et bien des mesures parfaitement en ligne avec le programme du FN depuis toujours. A la limite, on se demande pourquoi nos éditorialistes sur-subventionnés ne s’étonnent pas plus de trouver encore et encore les mêmes remarques poussiéreuses du père dans les programmes de la fille.

Je dis ça parce qu’a contrario, le reste du programme, sur sa partie économique, est l’officialisation concrète d’une cassure assez sensible de ce que disait, jadis, Jean-Marie. En effet, on se rappelle que le vieux grigou avait une tendance à vouloir plutôt supprimer les impôts, était très conservateur en matière de mœurs (et pour la suppression du droit à l’avortement), déployait une analyse assez pointue de la façon dont avait été dévoyé l’enseignement en France, avec à la clef une proposition proche de ce que certains libéraux prônent (le chèque éducation), et envisageait clairement une réduction du champ d’activité de l’état (bien que modeste lorsqu’on voit l’épaisseur de ses programmes).

En fait, tout se résumait à l’époque du Père Le Pen à sa formule lapidaire :

« Je suis socialement à gauche, économiquement à droite, et plus que jamais nationellement de France. »

Vous pourrez vous en convaincre en relisant les programmes de 2002 et de 2007, dans lesquels on trouve même des pépites (comme une référence en toute lettre au Droit Naturel). Bref : certainement pas libéral, mais en tout cas, pas totalement à gauche…

Avec Marine, cependant, les propositions sociales la classent clairement à gauche, et économiquement, il ne reste plus aucun vestige de la pensée paternelle. On aboutit finalement à un gros bouillon relativement traditionnel où tous les morceaux de légumes socialistes se mélangent dans la bonne soupe de la sociale-démocratie citoyenne, participative et très très nationale :

- Abandon de la PAC (youpi !) et mise en place de la PAF (oooh !). On se demande pourquoi ce qui ne marche pas au niveau de l’Europe devrait marcher en plus petit avec moins de moyens. La PAF, c’est un peu l’histoire d’une subvention et PAF l’équilibre du budget gouvernemental, et PAF les prix agricoles, et PAF la compétitivité, et PAF les petits producteurs…

- Réapparition de la TVA sur les produits de luxe, disparition des abattements sur les dividendes. Miam, plein d’impôts !

- Réindustrialisation à marche forcée avec intervention massive de l’État dans une grande politique. Avec des grands objectifs et des gros billets de banque.

- Fusion de la taxe foncière et de l’ISF, que les petits propriétaires vont tout particulièrement goûter avec plaisir.

- Au détour d’une page ou l’autre, on découvre le retour de la vengeance de la taxe Tobin, parfaitement et totalement socialiste, sur les transactions. Le FN ne serait-il pas au courant qu’elle a foiré en Suède ?

- Tiens, une avalanche de lois est à prévoir dans le commerce (Autorité de la concurrence, ententes illicites, abus de position dominante, etc…) et un renforcement nerveux et musclé des lois existantes (car renforcer, c’est agir, mais si mais si).

- « En cas d’envolée des prix des carburants, un plan sera adopté : abaissement de 20% de la TIPP » ; eh oui. Mais seulement en cas d’envolée des prix. Le reste du temps, on va tout de même continuer à taxer l’essence à plus de 100%.

- Revalorisation des pensions, des salaires de la fonction publique. Avec l’argent qu’on va trouver à la Banque de France suite à l’abandon de l’Euro. Vous verrez, c’est magique.

- On ne touchera pas aux 35h des socialistes officiels. On aménagera. Comme l’UMP.

- Et comme dans tout programme interventionniste qui fait du social et de l’égalité (camouflé sous le mot « justice ») son mot d’ordre, on aura droit à la création d’une pléthore de commissions Théodule (Caisse de compensation et d’amortissement de la dette paysanne, Fonds d’intervention pour la campagne, Conservatoire du patrimoine viticole, et le pompon, le retour d’un Plan, qu’on supposera Quinquennal, tiens, avec la Planification Stratégique de la Réindustralisation). On sent déjà la distribution de sinécures aux amis. Et les amis, on les connaît, ils apparaissent dans les crédits de fin de film, je vous le rappelle …

Dans tout ce fatras, on peine à voir le listing des mauvaises et vilaines dépenses qu’il faudra sucrer pour dégager des marges de manœuvre mais, seul point réellement positif, au moins est-il fait allégeance à un principe de sain équilibre des finances publiques… Dont on peut parier qu’il ne serait pas plus respecté avec le Front National qu’avec les autres partis, au vu du reste du programme, socialiste en diable.

En définitive, Marine officialise donc un virage clair vers un nationalisme plutôt social (à l’inverse par exemple d’un Mélenchon qui nous fait du socialisme plutôt national). Pour le reste, le FN de MLP ressemble pas mal à l’UMP.

C’est l’UMLP, en quelque sorte…


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