Paso Doble n°227 : Société (B)orgiaque

A las cinco de la tarde…

Sic Transit Gloria Sexi

J'ai acheté l'excellente série "Borgia", qui passe sur Canal +. Je ne suis pas en mesure d'évaluer l'authenticité de la reconstitution historique, mais c'est en tous les cas un exercice captivant d'un point de vue cinématographique.

Vous constaterez en effet dès les premiers épisodes la permanence des sujets de complot politique à travers l'Histoire. Dans Borgia, les Colonna, les Sforza et les Orsini jouent des coudes pour être pape, chaque papabile mettant en avant sa pratique sincère des vertus christiques ; Hélas, les multiples chausses-trappes qui s'ouvrent sous les pas des uns et des autres permettent de discréditer certains prétendants. Rodrigo Borgia est ainsi accusé en plein conclave d'être un fornicateur, sur la base d'une fausse-lettre d'un pape précédent. Un autre est accusé d'avoir été acheté par le Roi de France. Et tout capote. 

L'écart entre les moeurs réelles des cardinaux et le langage officiel de l'Eglise est sur ce point frappant. Il est d'ailleurs encore d'actualité, si j'en juge certains ouvrages récents – Je suis en train de lire un ouvrage en ce moment qui s'appelle "Sexe au Vatican"  (Toutefois, je ne vous recommande pas sa lecture car, malgré son importante documentation qui prouve qu'aujourd'hui les curés n'appliquent pas toujours toutes les vertus théologales, on dirait un réquisitoire besogneux, et on s'ennuie. Une affaire de fesses est croustillante, un bon millier de ces dernières devient un peu répétitif : femme au coeur brisé, enfant-bâtard, prêtre déchiré entre son Eglise et sa femme cachée, blablabla…)

Cinq siècles plus tard, nos bonnes vieilles démocraties ont le même ADN. Cela peut paraître effrayant.   

Tromperie sur la marchandise

Cette semaine, c'est Herman Cain qui vient de voir ses chances se volatiliser après qu'on a révélé ses frasques sexuelles et sa double-vie. De son coté, DSK clame qu'il y a eu complot piloté depuis l'Elysée pour le discréditer. Après la perte du FMI et l'abandon à la présidentielle, DSK semble faire sien l'adage de François Ier : "Tout est perdu fors l'honneur". Il se bat donc, pour son honneur, dit-il. C'est une différence de conception de l'honneur, car je pense que je supporterais mal que la France entière sache que j'aime recevoir des fellations de la part de femmes de chambre, même si c'était pour la bonne cause.

Rassurons-nous… Il y a toutefois une différence de taille entre l'Eglise catholique du XVème siècle et les démocraties du XXIème siècle : la luxure ne suffit pas en elle-même pour vous discréditer, il faut qu'il y ait infraction pénale. Notre XXIème siècle tolérant toise d'un oeil mauvais ces civilisations barbares qui, jusqu'aux années 60, se permettaient de régenter "les bonnes moeurs". 

Moi, ceci m'interpelle –  Je pense que ce n'est pas parce qu'on est un cochon priapique qu'on fait un mauvais élu. Je suis aussi d'avis que chacun a la sexualité qui lui chante ; Néanmoins, on ne peut pas nous demander à nous, les citoyens, de ne pas porter de jugement moral sur les individus en question.

Ce n'est n'est pas seulement une question de légalité, mais bien de moralité -  ce qui est en cause ici, c'est une dépendance au sexe. Tout ceci ne serait pas arrivé si Cain ou DSK avait respecté le bon vieux commandement divin : tu ne commettras pas l'adultère, que Napoléon a traduit dans le code civil en son article 212. Il fut un temps où l'on appelait ceci "la morale publique". 

Parce que, même si je ne partage pas la phobie des américains pour le mensonge, je vous pose cette question : quelqu'un qui est capable de flouer sa propre épouse est-il capable d'être honnête avec 60 millions de parfaits inconnus ? Un quidam qui ne contrôle pas ses pulsions a-t-il les nerfs pour conduire un pays ? Et dernière interrogation : à partir du moment où un l'indignité d'un être est connue de tous, même par erreur ou par complot, est-il encore en mesure d'exercer le pouvoir ?

 Heureux Alexandre Borgia, qui n'avait pas de caméra sur son iphone !

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