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Le chômage, un scandale public

Publié le 06 décembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Le chômage est un scandale public qui n’est pas à mettre au débit de la crise, mais des finances publiques et des réglementations administratives, à l’origine de l’« exception française ».

Par Jacques Garello

Le chômage, un scandale publicLe public français a de quoi être scandalisé. Pourquoi bientôt 3 millions de chômeurs en France, représentant plus de 10% de la population active, alors que les Allemands sont actuellement à 6,3%, les Autrichiens à 4,1% et les Luxembourgeois et les Hollandais à 4,7% ? Pourquoi un jeune sur quatre sans emploi, un senior sur dix ? Pourquoi autant de chômeurs de longue durée ?

C’est bien un scandale public, et qui dure depuis bien longtemps ; ce n’est pas à mettre au débit de la crise, ni du gouvernement actuel. En matière de chômage, nous avons toujours cultivé l’exception française.

Mais le scandale est public à un autre titre : c’est que ce sont nos politiques, nos finances publiques, nos réglementations administratives, qui sont à l’origine de cette « exception ».

« Le chômage, un scandale public » : il y a maintenant quinze ans, l’ALEPS avait publié un document portant ce titre, à l’issue d’un colloque international où s’exprimaient entre autres Gary Becker, prix Nobel et Arthur Laffer, l’un des pères de la Reaganomics. Ce document dressait à l’époque un acte d’accusation des politiques économiques dites « de plein emploi ». Rien n’a changé : les gouvernements et les parlements successifs n’ont cessé d’appliquer la vielle recette keynésienne : soutenir l’emploi par la croissance, elle-même dopée par la dépense publique.

Je constate hélas que depuis mercredi dernier, depuis la promesse des grandes banques centrales d’ouvrir les vannes monétaires, on renoue avec l’illusion inflationniste, à laquelle on attribue le double mérite et de créer des emplois et d’éponger les dettes publiques.

Il y a pourtant deux certitudes scientifiques, empiriquement et analytiquement étayées :

1° l’inflation est le sous-produit du laxisme monétaire ;

2° l’inflation n’a jamais résorbé le chômage, elle ne fait que l’aggraver.

L’inflation est toujours et partout un phénomène monétaire.

Cette formule de Friedman est célèbre, et la plupart des économistes l’acceptent. Ce n’est pas la hausse du prix de l’énergie ou des matières premières, ni l’augmentation des salaires, qui déclanche une hausse générale des prix à la consommation, c’est l’accroissement de la masse monétaire en circulation sans rapport avec la croissance du produit : « trop de monnaie chassant après trop peu de biens » disait Keynes, pour une fois d’accord avec Friedman.

Mais Keynes s’accommodait de l’inflation, parce qu’elle s’inscrivait dans la politique de plein emploi qu’il préconisait. La base de la politique : le niveau de l’emploi dépend du dynamisme de la dépense. Dépensez plus et vous vous enrichirez : quel programme ! Si les particuliers n’ont pas assez d’argent pour absorber la production, qui risque donc de péricliter, le gouvernement dépensera à leur place. Où trouvera-t-il l’argent ? En le faisant fabriquer par la banque centrale. La relance de l’activité grâce à l’argent facile : c’est à nouveau à la mode.

Cette politique est pourtant vouée à l’échec. Les revenus artificiellement créés par la distribution de la manne publique n’ont aucune contrepartie réelle. La séquence n’est pas des revenus vers la production, mais de la production vers les revenus : tout pouvoir d’achat nouveau naît d’une valeur ajoutée, l’offre crée la demande (c’est la loi de Say). Donc la vraie question posée par le chômage est celle-ci : pourquoi l’offre est-elle insuffisante ? Quels sont les obstacles au développement de la production ? D’une part, certaines entreprises ne sont plus adaptées aux indications du marché, leurs profits diminuent, puis la masse salariale, puis les effectifs. Aider ces entreprises c’est les dispenser de s’adapter et c’est créer à terme un chômage encore plus important. D’autre part, ce développement peut être bloqué par la fiscalité et la réglementation, qui dissuadent les entrepreneurs d’en faire davantage, car le coût s’élève avec la réglementation (notamment la rigidité du marché du travail) et le rapport diminue avec la fiscalité sur les résultats, sur l’épargne et sur le patrimoine.

On en vient ainsi à comprendre pourquoi ce sont les pays les plus inflationnistes qui s’enfoncent le plus vite et le plus longtemps dans le chômage : de l’argent facile pour tout le monde, mais qui ne débouche sur aucune création de richesse. Ce phénomène a été observé sous le nom de « l’inversion de la courbe de Phillips » : cette courbe bâtie au départ par un keynésien montrait une corrélation positive entre inflation et emploi, puis, au fil des ans, est apparue la relation inverse : plus d’inflation égale moins d’emplois.

La conclusion est évidente : il faut libérer les entreprises, et leur permettre d’accéder facilement à l’épargne et au travail dont elles ont besoin, et il faut encourager non seulement les entrepreneurs, mais aussi les autres acteurs de la production, à en faire davantage en leur laissant la plus grosse part de leurs gains au lieu de le prélever pour des impôts ou des cotisations sociales. « Travailler plus pour gagner plus » ? Exactement. Mais on ne se tient pas à la recette.

Pourtant elle est simple, et elle réussit à coup sûr.

Elle est simple : assouplir le marché du travail, encourager et détaxer l’épargne, diminuer la progressivité de l’impôt, diminuer la dépense publique en réduisant le périmètre de l’État.

Elle réussit à coup sûr, comme le prouvent les statistiques de l’emploi chez certains de nos voisins et concurrents européens.

Le scandale, c’est de refuser de lutter réellement contre le chômage.

Et un scandale tout aussi révoltant est de demander aux banques centrales de fabriquer encore plus de monnaie ; c’est condamner au chômage des millions de salariés français, et condamner des millions de consommateurs et d’épargnants à voir leur pouvoir d’achat ruiné par l’inflation.

Oui, le public a raison : c’est un scandale. Il doit aussi savoir pourquoi.

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