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L’innovation produit au cœur de la banque de détail

Publié le 13 décembre 2011 par Sia Conseil

L’innovation produit au cœur de la banque de détail
La banque innove. Qu’il s’agisse de produits nouveaux ou bien revisités, l’offre bancaire s’étoffe et se diversifie à un rythme bien plus élevé que par le passé. Depuis quelques années, les produits extra-bancaires ont également le vent en poupe.

Pourquoi assiste-t-on à cet engouement pour l’innovation, dans un secteur traditionnellement peu concerné par le « cycle de vie du produit » ? Les banques auraient-elles désormais la nécessité de se positionner dans la course à l’innovation pour ne pas se laisser distancer ? Il ne s’agit pas d’une question anodine, car les impacts ne sont potentiellement pas neutres au sein des réseaux d’agences ainsi que sur la relation clientèle.  

Panorama des innovations Produits

LCL a été le premier à proposer une offre « 100% à la carte », promettant des économies substantielles à ses clients en s’affranchissant des packages classiques. L’offre de produits s’est aussi élargie pour proposer par exemple des cartes de paiement personnalisées (photographie personnelle, visuels innovants ou affinitaires). Dans d’autres banques, des cartes de paiement nouvelle génération de type débit-crédit ont vu le jour, ou très récemment des moyens de paiement via téléphone mobile. En la matière, Kwixo est la dernière nouveauté en date du Crédit Agricole, permettant de payer grâce à son numéro de mobile, que ce soit des commerçants ou des particuliers. Les banques en ligne ne sont pas en reste ; l’arrivée du « e-chèque » chez Boursorama en est un bon exemple.

Par ailleurs, des offres extra-bancaires ont commencé à prendre forme avec les services à la personne (SALP) ou les offres de souscription de contrats d’électricité. L’aide au déménagement et l’assistance juridique sont d’autres exemples de la diversité de services proposés au fil du temps. L’engouement porte désormais sur la distribution de forfaits de téléphonie mobile, qui tend à se généraliser en agence. Par exemple le CIC, qui commercialise depuis 2009 des forfaits « C Mobile » en partenariat avec NRJ Mobile, en est devenu actionnaire majoritaire. Depuis, Le Crédit Mutuel propose à son tour une gamme complète de forfaits, illimités ou prépayés, avec ou sans mobile, faisant concurrence aux opérateurs classiques.

Enfin, des offres « mixtes » se sont développées dernièrement, à la frontière entre produit bancaire et service extra-bancaire, comme les cartes de paiement communautaires destinées à certaines cibles de clientèle bien définies. Par exemple, la Banque Populaire s’est associée à la radio NRJ pour lancer une gamme de cartes à destination exclusive de la clientèle « jeune », strictement inférieure à 18 ans. Outre les fonctionnalités classiques de limitation des dépenses, ces cartes offrent des avantages « VIP » aux détenteurs, qui entrent dans un club plus que dans un réseau bancaire.

Un nouvel eldorado pour la banque de détail ?

Afin de limiter l’augmentation de l’attrition client et d’accroître la rentabilité dans un contexte de multi bancarisation croissante, les réseaux cherchent  à écourter le cycle de vie des produits et augmenter la variété des services proposés. Désormais, environ 50% des clients détiennent plus de 5 produits dans leur banque principale. Cela permet d’amortir plus rapidement le coût d’acquisition d’un client dans une période où les modèles de rentabilité sont remis en question (packages bancaires en perte de vitesse, baisse des commissions d’interchange sur les paiements par carte, marges toujours faibles sur les prêts immobiliers…) D’un point de vue marketing, les banques suivent désormais une logique davantage « industrielle » bien connue dans d’autres secteurs.

Mais cette tendance est également avantageuse dans la mesure où elle contribue à rendre le client le plus captif, via des produits auxquels il est parfois difficile de renoncer du jour au lendemain (assurances, contrat mobile, services d’aide à domicile…) En ce sens, l’extra-bancaire offre des opportunités majeures pour les banques de détail. L’accumulation des services souscrits rend la perspective d’un changement encore plus difficile et les banques maximisent ainsi l’opportunité d’intégrer l’univers des clients et de faire partie intégrante de leur quotidien.

Est-ce pour autant une stratégie gagnante ?

Avec une part croissante d’innovations extra-bancaires dans le catalogue produit, les réseaux de distribution doivent s’adapter. Et il ne s’agit pas du même métier de vendre des solutions de paiement, d’épargne ou crédit, que de proposer des contrats d’électricité ou de mobile ! L’enjeu est de taille : il s’agit de conserver crédibilité et professionnalisme aux yeux des clients, sans dénaturer la fonction principale de la banque.

Sur le volet distribution, cela représente un véritable challenge pour les chargés de clientèle. Pour les plus petites agences (2/3 conseillers), maîtriser l’ensemble des couples produits / segments de banque et d’assurance représente un challenge vis-à-vis d’une clientèle hétérogène. Intégrer des produits non bancaires dans les argumentaires de conquête client s’avère compliqué, parfois mal vécu. La question qui se pose alors est de savoir si l’intégralité des nouveaux services doit être proposée par l’ensemble du réseau bancaire. Au risque de voir des clients mécontents de ne pas pouvoir souscrire à certains services dans leur agence de proximité…

Sur le volet production, les produits extra-bancaires impliquent des partenariats avec des fournisseurs externes, dont la banque n’a pas par définition la pleine maîtrise. Sur la vente d’un contrat de prestation externe (personnel de ménage, contrat d’électricité…), le conseiller se retrouvera toujours en première ligne en cas de problème, même si la banque n’est pas responsable de la non qualité du service, mettant ainsi son image en jeu.

Enfin, les quelques échecs des dernières années laissent à penser qu’il peut être délicat de se positionner en First Mover sur des innovations bancaires. L’exemple de Movo, service de paiement par SMS de la Caisse d’Epargne, a pu décevoir les clients les plus fidèles qui s’étaient engagés dans l’aventure, et qui se retrouvent au final lésés, ne pouvant plus utiliser le service que la banque leur avait mis en service quelques mois plus tôt.

La stratégie doit donc être pensée dans son ensemble : de la rationalisation du catalogue produits à la réorganisation des réseaux bancaires, en passant par la formation des conseillers et l’optimisation des systèmes d’information sous-jacents à ces problématiques. C’est à cette condition que l’évolution – déjà engagée – des agences comme centres de services pourra se généraliser et devenir un modèle de référence pour la banque de demain. Mais ce positionnement devrait être étudié sans tarder, au risque de prendre du retard sur les établissements les plus innovants.


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