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OMC, le retour

Publié le 13 décembre 2011 par Toulouseweb
OMC, le retourSubventions et aides indirectes Airbus/Boeing : nouvelle «saison».
Autant le dire clairement, l’interminable différend Etats-Unis/Europe sur les aides, illégales ou non, directes ou indirectes, dont bénéficieraient Airbus et Boeing, chacun à sa manière, devient franchement lassant. Son seul mérite connu est d’enrichir de coûteux cabinets d’avocats, sachant qu’il n’y a visiblement pas d’issue possible. En témoigne le dernier épisode, qui fait suite à un jugement de l’Organisation mondiale du commerce intervenu en juin. L’United States Trade Representative Ron Kirk, vient d’annoncer sa décision d’en référer à nouveau à l’OMC parce que les Européens, affirme-t-il, ne se conforment pas aux conclusions et décisions qui leur ont été imposées il y a 6 mois.
Les dirigeants de Boeing se disent déçus par le comportement d’EADS et Airbus et mettent en avant, notamment, «les aides au lancement non conformes aux conditions du marché qu’Airbus reçoit actuellement pour l’A350». Leur conclusion a le double mérite de la clarté et de la concision : «ce financement illégal des produits Airbus, avion après avion, ne peut continuer et doit cesser immédiatement ».
Jamais l’Atlantique n’est apparu aussi large et d’autant mieux en mesure de séparer les points de vue et d’entretenir ad libitum un extraordinaire dialogue de sourds. Airbus répond en effet qu’au printemps dernier, l’OMC a confirmé «la victoire décisive de l’Europe», réaffirmant que les aides gouvernementales supposées litigieuses par la partie adverse «n’ont causé aucun préjudice matériel à Boeing». On se croirait au premier jour de l’affrontement alors qu’il a débuté en 2004. Chacun des deux rivaux critique l’autre avec véhémence, les Européens prétendant mordicus qu’ils tiennent soigneusement compte du récent verdict de l’OMC.
A Toulouse, on souhaite une concurrence commerciale «vigoureuse» mais le renoncement à toute nouvelle action juridique dont le but serait d’étouffer ladite concurrence par le biais de «procédures légales injustifiées». Si les grands cabinets d’avocats concernés étaient cotés en bourse, ils feraient exploser le CAC 40, tant leur avenir est prometteur ! De plus, pour l’instant tout au moins, il n’est plus question d’avancer l’hypothèse d’un règlement à l’amiable, sans doute la moins mauvaise issue qui mériterait d’être prise en considération.
Au même moment, on constate qu’il arrive que Boeing et Airbus soient d’accord à propos de circonstances concurrentielles qui risquent fort de sérieusement les gêner tous les deux, à long terme tout au moins. Au cours d’un colloque qui vient de se tenir à New York, Jim Albaugh, directeur général de Boeing Commercial Airplanes, et John Leahy, directeur commercial d’Airbus, ont l’un et l’autre évoqué l’avion chinois Comac C919 que certains considèrent comme un clone tout à la fois du 737 MAX et de l’A320 NEO. Ils reconnaissent qu’il s’agit là d’un danger potentiel mais en repoussent les premiers effets à 20 ans. Et, sans l’expliquer, ils n’attribuent apparemment pas de risques similaires à l’Irkut MS 21 russe.
Reste le fait que les caractéristiques du C919 sont évoquées sans allusion au mode de financement de ce programme ambitieux. Il repose pourtant sur des fonds étatiques et, en toute logique, ce nouveau venu devrait d’ores et déjà faire l’objet de plaintes dûment étayées auprès de l’OMC. La contradiction est évidente, à une nuance près : dans les prochaines années, Boeing et Airbus entendent vendre beaucoup de 737 et d’A320 aux compagnies aériennes chinoises en pleine expansion et, pour mieux séduire les autorités de Beijing, Airbus met constamment en évidence son usine chinoise capable d’assembler quatre A320 par mois. En d’autres termes, le temps des querelles n’est pas encore venu.
Mieux vaut s’écharper entre meilleurs ennemis, sans risquer de perdre des parts de marché. Le problème, le seul vrai problème, est que personne n’est dupe.
Pierre Sparaco - AeroMorning

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