A la lumière de ce marathon, il apparait que, contrairement à ce que je pensais, sans mes souvenirs brumeux de téléphage honteuse qui ne s'est jamais envoyé les épisodes sous la forme d'une intégrale, Oz ne se contente pas de reposer sur la structure 1 épisode = 1 thème.
Après avoir posé les bases, la série a embrayé, c'est encore plus visible avec ce 6e épisode, sur une structure qui superpose un nouveau thème à ceux déjà étudiés, une heure après l'autre. C'est vraiment fascinant de la voir utiliser ses sujets précédents comme autant de jalons pour marquer la progression de sa réflexion.
Car après la mort et la drogue, on va donc parler de santé. Ou plutôt absence de, contexte oblige, puisque la prison d'Oswald est à la fois un endroit où on vit dangereusement (l'aggression de Rebadow d'entrée de jeu le prouve bien) et où on vit, tout simplement, ce qui implique inexorablement vieillesse et/ou maladie.
Mais d'abord, voyons un peu où nous en sommes avec Beecher. A mon grand désarroi, son axe a régressé : de la fin de l'épisode précédent, il occupe cette fois le milieu. Pour moi, la position de l'intrigue de Beecher est assez représentative de son intérêt : on est revenus à un stade assez décevant où Beecher prolonge sa descente aux Enfers, alors qu'un peu plus tôt il avait donné des signes de rébellion (même moyennement couronnés d'effet). Évidemment, loin de moi l'idée de dire qu'il est docile dans cet épisode, au contraire on marque un tournant, mais son coup de sang contre Schillinger est dû plutôt à la drogue et à une impulsion, qu'à une réelle prise de conscience et une progression psychologique. Comme le fait très bien observer Sister Pete, il ne contrôle plus rien, il ne s'appartient plus, il est victime perpétuellement du sens du courant. J'avais eu le sentiment précédemment qu'on affleurait la prise de conscience mais on n'y est pas du tout. En fait, ici, c'est plutôt l'animal qui est lâché, au contraire.
En réalité je suis déçue, car Beecher est un personnage intelligent et attachant, mais pour le moment il a surtout l'air de passer par tous les stades "normaux" du personnage qui arrive en prison et qui subit tous les clichés du genre. La première fois qu'il a traversé l'écran en drag, dans une version défaite de son déguisement de l'épisode précédent, j'ai laissé échapper un coup de sifflet atterré, du genre "ouh, il a morflé", mais la suite des évènements n'était plus aussi impressionnante. Je crois que je suis tout simplement impatiente de le voir se prendre en main, mais c'est normal, je suppose, qu'on assiste à sa déchéance d'abord, remords inclus. Simplement ce n'est vraiment pas une intrigue qui me captive, même si elle est fondamentale pour ses évolutions futures.
Bon, cela étant posé, on va passer à mes personnages favoris. Rebadow, d'abord, qui commence à avoir des envies d'évasion. C'est à la fois amer et drôle de le voir ainsi espérer passer du temps dehors avant de mourir, parce qu'évidemment, avec sa tête inoffensive, Rebadow fait un peu rire quand il dit qu'il va s'évader, mais d'un autre côté, quand il essaye, eh bien ça fait mal au coeur de le voir échouer. Je constate d'ailleurs que Groves est vraiment un chic type, heureusement qu'il est enfermé pour un motif complètement barge parce que sinon il se ferait manger tout cru ; heureusement, tout le monde a peur que ce soit le contraire. Sa réputation le sauve, en fait. Enfin, sauf quand il s'agit du dentiste... Une scène proprement hilarante d'ailleurs.
Alvarez, ensuite, commence à sortir un peu de son intrigue de bébé, ce qui fait du bien car même si c'est une histoire bien menée, on commençait l'air de rien à en faire le tour. Alors juste à temps, on repart à l'autre bout de son arbre généalogique, ce qui offre des scènes solides, dont une, touchante, où son père et lui donnent le bain au grand-père (j'ai un truc avec les vieux qu'on torche, je crois, parce que le même type de scène dans la dernière saison de Sex & the City me tire des larmes aussi). Sa discussion avec Sister Peter Marie est d'ailleurs une bonne façon de saisir ce qui se passe dans sa tête quant à son futur. Il est intéressant de noter qu'il n'a pas cette conversation avec le père Mukada, et je trouve ça assez clair sur l'impact que ce dernier a, dans les faits, sur les prisonniers ; ou plutôt l'impact qu'il n'a pas. Mukada était là pendant toute l'histoire du bébé, et pourtant ce n'est pas à lui qu'Alvarez va confier sa vision bouchée de l'avenir... il faudrait que le ptit père Ray se réveille, sa transparence ne rend service à personne.
Dernier et non des moindres de mes personnages favoris à l'oeuvre dans cet épisode : Ryan O'Riley. Cette crevure a encore trouvé un moyen de pactiser avec encore plus de monde pour avoir encore plus les miches au chaud, tout en grapillant encore un peu de pouvoir. Ce mec est définitivement mon héros !
Après avoir bien léché le c*l du vieux Schibetta, obtenant ainsi la direction des cuisines, il va donc lui planter un poignard dans le dos sans même sourciller, en s'alliant à Adebisi. Ce dernier n'est pas une flèche, mais il a vite compris que s'allier à Ryan était dans son intérêt. C'est vraiment un tandem qui marche du feu de Dieu, parce que ni l'un ni l'autre n'ont la plus petite parcelle de conscience pour les empêcher de faire du mal. Oswald leur appartient, pour tout dire.
En contrepartie c'était une bonne idée de voir Ryan s'entretenir avec Sister Pete (encore elle), pour expliquer pourquoi il fait tout ça. A mon sens, c'était palpable depuis le début qu'O'Riley n'a pas le vice dans la peau (il a quand même une étonnante facilité à trouver des moyens tordus de tuer les gens, on peut pas lui retirer ça, mais enfin c'est pas par méchanceté), il veut juste s'en tirer à moindre frais. Mais ça va mieux en le disant, et expliciter son envie de vivre, au milieu de tous ces morts et tous ces problèmes de santé, c'était même une sorte de petit rayon de soleil. On le savait déjà humain, mais le voir évoquer les voyages qu'il pourrait faire avec Sister Pete était réellement touchant. Mon ptit Ryan, tant que tu te débrouilles aussi bien, ça va, mais malheureusement il y a certains impondérables que même le meilleur des comploteurs ne peut pas éviter...
Le prix de l'intrigue la moins intéressante de l'épisode revient au joueur de basket professionnel (j'ai même pas retenu son nom) qui rejoint la prison. Déjà j'ai pas compris, au vu de la reconstitution, comment il a pu être jugé de viol, mais en plus, son personnage est, pour le moment, sans intérêt, si ce n'est qu'il déclenche chez Hill une très mauvaise réponse. Jusqu'au dernier moment j'ai espéré que Hill ait le courage de s'éloigner de l'influence du sportif, mais non.
En tous cas l'épisode, à travers la maladie et la santé, est là pour nous parler de notre rapport au corps. C'est quelque chose qui m'a rendue mal à l'aise parce que, bon, déjà à titre perso, et ensuite parce que le rapport au corps était plus exploré pendant les commentaires de Hill que par les images. Rebadow, par exemple, ouvre l'épisode en atterrissant à l'hôpital mais la vérité, c'est que sa santé ne le préoccupe pas vraiment. Le grand-père d'Alvarez, pour des raisons évidentes, ne se plaint pas non plus de son état de santé. L'affaire du dentiste n'est là qu'à titre de comic relief. Le plus dingue, c'est que toute l'histoire de Beecher depuis que ce dernier a commencé à consommer de la drogue consiste à le voir poursuivre un détachement de son propre corps, pour des raisons évidentes. Naturellement, la scène de rêve/trip de Hill est entièrement dédiée, au propre comme au figuré, à le voir sortir de sa condition physique. Enfin, Kareem Saïd a passé tout l'épisode à faire semblant d'avoir un esprit plus fort que la matière, et il faudra attendre la toute fin dudit épisode pour qu'il découvre que ça ne marche pas comme ça (après, une fois de plus, un entretien avec Sister Pete, décidément très en forme dans cet épisode, mais par contre, peut-être pas aussi convaincante qu'elle le souhaiterait).
Alors du coup, j'étais plus intéressée par le fait que McManus et Glynn se retrouvent au gymnase de la prison (déjà parce que c'est quand même incongru qu'ils utilisent l'équipement de la prison, et ensuite parce que c'est pas vraiment les gars qu'on se figure être les plus attentifs à leur physique...), et j'aurais pensé qu'on verrait aussi des gars comme Adebisi prendre soin de leurs biceps. Il y a cet autre versant du rapport au corps qui n'était pas évoqué, et du coup ça m'a laissé un goût un peu amer sur l'épisode. Peut-être tout simplement que le thème du discours de Hill n'était pas entièrement en adéquation avec les intrigues en cours, parlant du fait que le corps et l'esprit ne font qu'un pendant qu'on voyait surtout les personnages s'efforcer de fuir leur corps, je ne sais pas.
Mais comme dernière note positive, je voudrais insister sur le fait qu'on aura assisté dans cet épisode à deux scènes marquantes du point de vue des dialogues, aussi : le fameux laïus d'Augustus Hill expliquant que sa nouvelle addiction est de rester clean (que justement j'évoquais dans le post précédent), et un excellent dialogue entre le directeur Glynn, Sister Peter Marie et le père Mukada, sur les vieux en prison, plutôt du côté de l'humour cette fois, mais apportant aussi un aperçu des échanges en coulisses, moins guindé que lors de leurs réunions, et plus sincère, aussi (Glynn trouvant même le moyen de faire une blague sur sa belle-mère). C'étaient deux séquences dont je me rappelais avec une grande précision, et j'ai été contente de les retrouver. L'un dans l'autre, un bon épisode, mais peut-être un peu maldroit par moment.