On ne peut donc jamais dire : il n’y a rien à voir, il n’y a plus rien à voir. Pour savoir douter de ce que l’on voit, il faut savoir voir encore, voir malgré tout. Malgré la destruction, l’effacement de toute chose. Il faut savoir regarder comme regarde un archéologue.
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L’écorce n’est pas moins vraie que le tronc. C’est même par l’écorce que l’arbre, si j’ose dire, s’exprime. En tous cas se présente à nous. Apparaît d’apparition et pas seulement d’apparence. L’écorce est irrégulière, discontinue, accidentée. Ici elle tient à l’arbre, là elle se défait et tombe entre nos mains. Elle est l’impureté qui vient des choses mêmes. Elle dit l’impureté – la contingence, la variété, l’exubérance, la relativité – de toute chose. Elle se tient quelque part dans l’interface d’une apparence fugitive et d’une inscription survivante. Ou bien elle désigne, précisément, l’apparence inscrite, la fugitivité survivante de nos propres décisions de vie, de nos expériences subies ou agies.
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A propos de « Ecorces », lire ici ma note de lecture publiée le 17 décembre 2011 : http://www.e-litterature.net/publier3/spip/spip.php?page=article5&id_article=89
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A propos de Georges Didi-Huberman, Survivance des Lucioles, Paris : Éditions de Minuit, 2009, 141 p. ISBN 978-2-7073-2098-8, lire : http://www.fabula.org/revue/document5425.php ou écouter : http://www.dailymotion.com/video/x8v1dk_seminaire-des-luciolles-1_creation