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Le 16/12 à 22h 10, sur ARTE : « LE CERVEAU ET SES AUTOMATISMES – L’INCONSCIENT ».

Par Ananda

Surtout, que le mot « inconscient » ne vous induise pas en erreur ! Il ne s’agit ici en aucun cas de théorie freudienne, mais de résultats d’expériences scientifiques dûment menées en laboratoire par des « fouilleurs de cerveau », les plus grands spécialistes actuels des neurosciences, au moyen de multiples tests et/ou de recours à l’IRM.

Le propos de ce documentaire scientifique allemand est de nous montrer combien et « comment l’inconscient influence notre corps et notre esprit ».

Il s’arrête, pour ce faire, sur le cas emblématique de l’amour.

« L’amour est le phénomène dans lequel nous sommes le plus assujettis aux automatismes de notre cerveau »…sans doute parce qu’il vise un but qui, en quelque sorte, nous dépasse, la perpétuation de notre espèce.

Les spécialistes du fonctionnement cérébral n’y vont pas par quatre chemins : nous sommes, proprement, « gouvernés par notre inconscient » ; en fait, aucune de nos décisions – ils insistent bien, « aucune » - ne s’avère être « guidée par notre pensée consciente », notre pensée raisonnable.

Pour ces neurologues de haut vol, la conscience humaine ne serait – tenez-vous bien – qu’ « une sorte de tour de passe-passe de notre cerveau pour nous faire croire que nous avons notre mot à dire », rien qu’ « un clap de fin quand tout est déjà décidé ».

On s’en doute déjà rien qu’à entendre cela, les implications philosophiques de semblables découvertes sont énormes…

Le premier exemple qui nous est donné concerne L’INTUITION HUMAINE.

Photographe de surf sur la côte californienne, Mickey a été étudié sous toutes les coutures. Il « ne réfléchit absolument pas aux masses d’eau qui déferlent autour de lui ». N’en ayant pas le temps, il agit, réagit d’une façon totalement automatique. Car la nature du monde dans lequel nous vivons, imprévisible, nous oblige à faire face à ce qui nous arrive avec la rapidité de l’éclair.

C’est ainsi que nous pouvons être vus à bon droit comme « des marionnettes entre les mains de notre inconscient ». Pour nous, si fiers de notre « libre arbitre », si imbus de notre raison, de notre pouvoir direct sur nos choix, cela la fiche plutôt mal.

Il faut pourtant, aux dires de ces impitoyables savants, s’y résigner : « nous ignorons pourquoi nous faisons ce que nous faisons ».

D’où vient donc que cet inconscient tienne en nous une si large place ?

La réponse, inattendue, fuse : « réfléchir fatigue notre cerveau » ; c’est tout bête, mais c’est ainsi.

La réflexion est, en ce qui la concerne, un pur produit de notre néocortex, ce « bonnet de bain » qui « gaine » l’ensemble de notre masse cérébrale.

La « prise de décision », quant à elle, est gérée par deux zones cérébrales qui travaillent main dans la main, le « cortex orbito-frontal », zone située « au-dessus des yeux », et l’hippocampe.

Nous possédons, emmagasinée dans notre cerveau, une « banque de données » constituée de « ce dont nous nous souvenons ». C’est à partir de cette banque de données que nous effectuons des choix et faisons face aux évènements qui surviennent au fur et à mesure.

Un neurologue le dit bien : « ce dont nous nous souvenons détermine ce que nous faisons ».

Bien avant que nous en ayons une quelconque forme de conscience, « les centres cérébraux de la peur et les centres du plaisir/récompense analysent chaque signal extérieur ». Le noble cortex ne reçoit les informations qu’en toute fin de processus, sous forme condensée, mais tout en ignorant absolument tout de leur provenance.

Ceci veut bien dire ce que ça veut dire : loin d’avoir disparu, notre «  cerveau primaire », si « archaïque » qu’il soit, nous gouverne toujours, et c’est la conscience qui a dû « composer avec lui », et non l’inverse.

Notre cerveau prend une décision au terme d’un processus qui, on l’a à présent évalué, dure deux cent millisecondes, et ce, répétons-le encore, « bien avant que le cortex en ait conscience ».

Moralité : il va falloir revoir nos conceptions sur l’intuition ; elle que nous prenions jusqu’alors pour un don s’appuie en réalité « sur l’expérience » ainsi que sur « d’innombrables répétitions ».

Beaucoup de processus, du reste, s’effectuent dans notre cerveau avec une telle rapidité que nous n’avons nullement le temps de les voir consciemment venir.

De même, « un flot ininterrompu de données » est-il perçu par notre extraordinaire machine cérébrale.

Ce qui n’empêche en rien notre inconscient d’être sujet à des erreurs, desquelles, pis encore, nous avons un mal fou à nous rendre compte.

Un phénomène, particulièrement, nous influence sans cesse : « l’effet d’amorçage ». C’est, par exemple, à cause de cet effet que « nous tombons amoureux de quelqu’un avec qui nous venons de vivre quelque chose de passionnant ».

Pour le mettre pleinement en relief, des tests ont été mis au point et menés, à l’UNIVERSITE DE YALE (U.S.A). Leurs résultats sont assez étonnants, jugez-en par vous-mêmes : « nous trouvons les gens plus sympathiques lorsque nous faisons leur connaissance en buvant une boisson chaude » (ceci expliquera, sans doute, le fameux « tu viens prendre un café ? »), ou encore, « les gens assis sur des chaises dures négocient plus âprement ». Où est la raison dans tout ça ? Force est de constater et d’admettre qu’ « elle n’a pas beaucoup d’influence ni sur ce que nous sommes, ni sur ce que nous faisons »…

Ce que nous apprenons, nous l’apprenons de nos expériences passées, qui nous marquent de leur empreinte sans que nous ayons à réfléchir, tout comme nous agissons sans que notre réflexion proprement dite y ait le plus souvent la moindre part.

Quelle part tient la conscience dans la coordination de nos mouvements ? Strictement aucune.

Et tout ceci parce que l’activité néocorticale est, énergiquement, trop coûteuse ! Parce que « notre cerveau brûle autant de sucres et d’oxygène que nos muscles »…

Souvenons-nous du 16 juillet 1969, lorsque la mission lunaire APOLLO 11 avait évité de justesse l’échec grâce à l’intuition de Neil ARMSTRONG, lequel avait, à la dernière minute, pris la décision fort bien inspirée de passer en mode de pilotage manuel du module lunaire en train de remonter vers la capsule spatiale mère…Les intuitions nous guident ainsi…vers de véritables coups de génie capables de nous sauver in extremis. Car elles réagissent au quart de tour.

Pourtant, il serait faux de croire qu’elles sont toujours fiables et infaillibles. « Une intuition peut parfois aussi être mauvaise » précise un scientifique.

L’Australien Alan SNYDER s’est, lui, spécialisé dans un domaine des plus fascinants : l’étude des « routines de pensée inconscientes ».

Il le proclame : « la créativité est un acte de rébellion ».

Dans son laboratoire de SYDNEY, il a mené des tests au cours desquels chaque personne devait résoudre 27 équations avec des allumettes. Ce test lui a permis de mesurer à quel point les gens devenaient vite « aveugles à toute nouvelle idée ». « Préjugés, routines, systèmes de filtres inconscients » ont tôt fait de se mettre en place, et de s’encroûter dans l’esprit. Le cerveau humain apparaît ainsi fabuleusement conservateur. Dans cette optique, la créativité ne résulterait pas, ainsi qu’on le croyait jusqu’à maintenant, de stimulations de certaines parties du cerveau, mais tout au contraire de leur « débranchement ». Pour devenir – ou rester- créatif, l’être humain serait contraint de lutter sans cesse contre la tendance innée de son cerveau à la paresse et au conservatisme !

Voilà qui expliquerait bien des phénomènes d’inertie socioculturelle, de même que la relative rareté des esprits véritablement créatifs.

Enthousiasmé par ses découvertes, Snyder va jusqu’à prédire : « dans vingt ans, nous disposerons d’un mécanisme artificiel qui nous permettra de voir le monde d’un œil neuf » en nous défaisant des automatismes de la pensée qui nous entravent par déconnexion des réseaux neuronaux qui leur correspondent.

Mais quid de l’amour, de l’état amoureux, et que s’y passe-t-il ?

Tout d’abord, nous disent les neuroscientifiques, « être amoureux, c’est être stressé ». Comme dans tous les cas de stress, « notre amygdale s’active », nous conduisant vers un « état de panique » qui lui - même, nous rendant confus, nous prédispose à l’aveuglement. « L’amour est aveugle », n’est-ce pas ?

Les endorphines (sources d’euphorie) et la sérotonine (génératrice d’ « humeur au beau fixe ») concourent à ce que l’amour rende tout à la fois « accro et indulgent ». En outre, l’hypothalamus entre en lice, qui « rétrécit notre champ de vision », et « les femmes amoureuses se mettent à produire davantage de testostérone », tandis que les hommes en état d’amour, eux, en produisent moins. Cet « effet d’ivresse » que nous venons de décrire « s’estompe » cependant, « après six à neuf mois ». Heureusement prend le relais l’influence d’une autre hormone, l’ocytocine, qui, déterminant d’une façon plus générale l’EMPATHIE, « nous pousse à une relation durable ».

« Dans le cerveau des couples heureux, nous révèle-t-on, les centres cérébraux de récompense sont encore très actifs », et ce « même après vingt ans de vie commune »…le miracle de l’amour, en somme !

On a cherché, encore par des tests, à déterminer quels étaient les paramètres intervenant dans le choix d’un partenaire amoureux, et voici ce qu’on a trouvé :

-« les vêtements nous renseignent sur la classe sociale et le niveau d’études » de la personne rencontrée.

-« les attitudes corporelles » et le visage nous fournissent, à notre insu, d’importantes indications sur le niveau de testostérone ou d’œstrogènes du/de la même personne.

Dans tous les cas de figure, c’est bien « notre cerveau » qui « nous renseigne ».

Des tests conduits en ALLEMAGNE ont prouvé que « l’activité cérébrale programme la décision 7 à 10 secondes avant que n’intervienne la décision consciente » qui s’ensuivra, et que « notre conscience ne peut pas détecter les décisions inconscientes » ; ainsi des circuits électrochimiques totalement automatiques décident-ils seuls.

On a, également, eu l’occasion de noter, « chez les personnes amoureuses, une activité particulière des noyaux accubans » qui, nous déclare une scientifique, tendrait à établir le fait que « l’amour est bel et bien une drogue ».

Le documentaire aborde même le cas des disputes conjugales : pendant ce genre de discussions vives, les tests paraissent indiquer que « les arguments sont parfois moins importants que les chaises sur lesquelles on est assis », cependant qu’ « un éclat de rire ou une tasse de thé chaud suffisent à désamorcer une dispute », et pour cause (dans le cas de l’éclat de rire) : « nous rions parce que ça nous rapproche » et « réagissons étonnamment bien au rire ».

Mais d’autres recherches mettent aussi en relief le pouvoir de l’inconscient sur notre comportement et sur nos choix. A PASADENA (U.S.A), dans son laboratoire, Antonio RANGLE a fait tourner son test autour d’une « dégustation de vin » : quand il a fait accompagner la dégustation d’une annonce apprenant que le prix dudit vin s’élevait à 90$, il a été surpris d’obtenir, chez les dégustateurs, l’activation d’une zone cérébrale. Par contraste, lorsque l’annonce du prix ne mentionnait que 10$, aucune zone cérébrale ne manifesta d’activation. Voilà qui était révélateur d’une chose : « notre cerveau prend plus de plaisir quand il pense que nous sommes en train de déguster un bon vin », un vin plus onéreux.

Quoi d’étonnant, donc, à ce qu’au supermarché aussi l’inconscient gouverne le choix des acheteurs ? On le sait maintenant : lorsque le noyau accubans est excité, le chariot se remplit, alors que quand c’est l’insula qui est excitée, il n’y a aucun achat.

La fin du documentaire s’annonce ; voici venu le temps des conclusions.

Nous sommes le jouet de notre cerveau profond, pour le meilleur et pour le pire. Finalement, notre raison, à laquelle nous attachons tellement d’importance, n’est qu’une toute petite part de notre humanité.

Et pourquoi pas ? « Cela n’a pas grand intérêt de réfléchir longuement à tout ». « Les expériences que nous faisons » se chargent bien assez, à elles seules, de changer notre cerveau en y ouvrant « de nouvelles connexions ».

P.L


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