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La preuve irréfutable de l'existence de Dieu

Publié le 04 mars 2008 par Frison
L'existence de Dieu est une question philosophique majeure qui a occupé de très nombreux penseurs à travers les siècles. Aujourd'hui, l'état de l'Art consiste à dire qu'il s'agit d'une question insoluble ou plutôt, indémontrable.
Il ne serait pas possible de prouver l'existence de Dieu. Il serait également impossible de prouver sa non-existence.
Or, bien évidemment, même si c'est loin d'être un sujet de préoccupation majeur pour un étudiant en Yéchiva, n'importe quel juif un peu versé dans l'étude des textes sait qu'il existe une preuve complètement irréfutable de l'existence de Dieu.
Je sais, vous vibrez d'impatience, mais avant de vous donner cette pépite, il nous faut faire un bref rappel historique et culturel sur deux grands maîtres de la tradition juive: Maïmonide et le Raavad.
Maïmonide, tout le monde connaît, "De Moïse (le prophète) à Moïse (Maïmonide), il ne s'est levé aucun homme comme Moïse".
Talmudiste, penseur nourri de philosophie aristotélicienne, décisionnaire sans équivalent, Maïmonide (ou Rambam: Rabbi Moché Ben Maïmon) a marqué jusqu'à aujourd'hui notre façon d'envisager la Thora et le judaïsme.
Son oeuvre maîtresse ? Plus que le Guide des Egarés, c'est le Michné Thora qu'il faut retenir: somme inégalée de l'ensemble des lois recensées dans le Talmud, compilées, assemblées, structurées et synthétisées dans un hébreu d'une limpidité de cristal.
Oeuvre majeure, mais évidemment très critiquée. Pourquoi ? Parce que Maïmonide a eu l'outrecuidance de penser avoir produit le "code ultime" qui rendrait caduc toute référence au Talmud pour les décisions pratiques et la fixation de la halakha.
Aucune source en effet n'apparaît dans le Michné Thora de Maïmonide. Ambition peut-être un peu démesurée, même pour le grand Maïmonide.
Et c'est là qu'apparaît Rabbi Avraham ben David de Posquières, dit le Raavad. Posquières étant un charment (j'imagine) village de Provence où vécut et enseigna cet éminent maître.
Le Raavad (ou Reeved selon l'accent ashkénaze), a été un des plus virulents commentateur de Maïmonide. Quasiment à chaque passage du Michné Thora, le Raavad intervient, remet en cause, critique, met en pièces les assertions (non sourcées il faut le rappeler de Maïmonide).
L'énergie du Raavad, il la puise dans une volonté de contrer ce qu'il lui apparaît comme un risque majeur pour les juifs: qu'ils ne s'en tiennent qu'à la lecture d'un code de lois, sans s'immerger dans l'Etude, la vraie, c'est à dire celle du Talmud et de ces commentateurs.
Match nul: les oeuvres de synthèses halakhiques ont proliféré à la suite du Rambam. Le Choulkhan Aroukh de Rabbi Yosef Caro au 16ème siècle, puis le Michna Beroura au 19ème ou le Yalkout Yosef du Rav Itzhak Yosef, basé sur les responsa et les décisions de son père le Rav Ovadia Yosef.
Maïmonide n'a donc pas produit le code ultime, mais il a lancé une tendance de fond qui ne s'arrêtera plus.
Mais ces oeuvres n'ont pas supprimé, loin de là, les Yéchivot et centres d'étude dans lesquels la Guemara est toujours l'objet de préoccupation principale. Le Raavad est donc légitimé dans sa critique: en effet, la vitalité du judaïsme n'a pu prospérer que par la continuité de l'étude du Talmud, jusqu'à aujourd'hui.
Toujours est-il que la lutte entre ces deux là a été acharnée, sur des sujets aussi divers que le statut du mont du Temple, les endroits où on peut embrasser sa femme (Rambam dit partout, le Raavad s'y oppose), la question de savoir si l'interdiction noachide de "Ever min hahai" s'applique aussi à la volaille et même sur un sujet qui nous paraît aujourd'hui recueillir l'unanimité des forces vives du judaïsme: la corporéalité de Dieu.
En fait le Rambam et le Raavad sont d'accord pour dire que Dieu n'a pas de corps et que les anthropomorphismes de la Thora sont évidemment d'ordre allusif, mais si le Rambam considère qu'un tenant de la position inverse est un hérétique, le Raavad considère seulement qu'il a fait une erreur intellectuelle qui n'est pas passible du qualificatif d'hérésie avec tout ce que cela peut impliquer en pratique.
Bref, ils ne sont d'accord sur presque rien.

Mais, revenons donc à notre sujet. Le début du Michné Thora de Maïmonide concerne les "Halakhot" dites de "connaissance". C'est en réalité une introduction aux fondements sur lesquels repose la foi juive.
Ca commence comme ça "Le fondement des fondements et le pilier des sagesses est de savoir qu'il existe une cause première (Matsouï Richon)" .
Mine de rien, cette phrase (et bien d'autres ensuite, notamment dans le Guide des Egarés) est une réfutation formelle avant l'heure des théories de Spinoza. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que celui-ci revient souvent longuement sur l'oeuvre de Maïmonide, qu'il sait très explicitement opposé à sa thèse panthéiste.
Après un bref développement sur cette notion de "Cause première", le Rambam poursuit: "Cette cause première, c'est le Dieu du monde, le maître de la terre."
A ce moment là, l'étudiant en Yéchiva va chercher fébrilement ce qu'en dit le Raavad. Et vous savez quoi ? Le Raavad n'en dit rien.
C'est donc qu'il n'a rien à dire sur le sujet et qu'il est (pour une fois) en accord avec Maïmonide.
Résultat: la proposition "Dieu existe" n'est pas remise en cause par le Raavad, c'est donc qu'elle est vraie.
CQFD ;-)

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