Magazine Europe

A la tête du pays

Publié le 22 janvier 2008 par Steven Petitpas
A l'étranger, des tas de choses nous échappent. C'est évident. Quand, porté par le destin ou le hasard, on passe les frontières de nos contrées maternelles, il nous arrive souvent, par exemple, de ne plus comprendre ce qui se dit. Souvent, on ne pige plus ce qui se fait. On saisit mal qui se mange. On déchiffre peu ou prou ce qui se porte. Ah ! Les us et les coutumes ! Quelle belle mosaïque que ce monde ! Qu'elles sont belles, nos différences !
Seulement voilà, parfois, l'étrangeté n'est pas là où on l'attend. Parfois, l'étrangeté n'est pas chez l'autre, dans l'autre, dans ce qu'il fait ou ne fait pas. Parfois, fort subitement, très inexplicablement, l'étrangeté est en soi. Sur soi. Dans le miroir.
Pour vous expliquer la chose, je vais commencer par gloser autour d'une question simple : existe-t-il un type physique français ? Pour parler très brièvement, sachez que si vous m'aviez poser cette question il y a six mois, je vous aurais renvoyé sans ménagement à votre profonde balourdise : la France, au centre de l'Europe, forte de siècles de brassages culturels et ethniques, n'a pas pour habitant type un homme blond et élancé, un petit brun à la peau mâte ou un grand roux à la peau blanche (NLDR : on reconnaîtra dans les caractéristiques susdécrites les nationalités que l'on voudra). Non : il n'y a pas de Français type. Parce qu'il ressemble à tout, le Français, à sa façon, ne ressemble à rien. Si celui-ci n'est pas équipé de son béret ou de sa baguette de pain, bon courage, donc, à qui voudra deviner du premier coup d'oeil sa nationalité.
Ça, c'est, en substance, ce que je vous aurais répondu il y a quelques mois. Que vous soyez d'accord ou pas, peu importe, car c'était avant. Avant que je me regarde dans le miroir d'un air dubitatif, interrogateur. Avant que je me dise, incrédule, en pleine défiance de mon propre visage : "Mais... quoi ? Qu'est-ce qui cloche chez moi ?"
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Explication de la chose en deux petites anecdotes :
Nous sommes dans un pub anglais nommé "The Rose". Les gens s'agglutinent en masse, dansent au son d'une mauvaise musique, boivent avec foi, rient fort péniblement. Quoi de plus normal, jusque là, me direz-vous. Je suis, ce soir là, vêtu d'une tenue dont deux amis français (c'est important) m'ont un jour dit qu'elle me donnait un air "très anglais". Entouré de mes compères, j'essaie, sur la piste, d'adhérer à une ambiance un peu trop chargée pour moi. C'est alors qu'une femme s'approche. Ouvrant grand les bras, elle salue chaleureusement l'une de mes amies. Elles échangent quelques mots, visiblement très heureuses de se rencontrer ici. Soudain, le regard de la femme en question (âgée d'une trentaine d'années, anglaise) croise ma route. Elle a un sourire et chuchote quelques mots à notre amie commune. Intrigué, je lance un air pour le moins interrogateur à qui voudra s'en saisir. Prenant en pitié ma jeune personne et plus encore ma profonde paranoïa, elle s'approche de moi, et me souffle à l'oreille : "Toi ! Tu dois être français !"  Un peu surpris par tant de clairvoyance, je jette un oeil à l'immense miroir qui, tout à fait par hasard, se déploie sur le mur me faisant face. Quelqu'un aurait-il dessiné un drapeau tricolore sur mon front sans que je m'en rende compte ? Ce n'est visiblement pas le cas. C'est donc tout naturellement (et peut-être un peu naïvement) que je réponds : "Oui, je suis français ! Comment le savez-vous ?" Sa réponse enfonce passiblement le clou : "Parce que ! Ca se voit de loin ! Tu es forcément français !"  Hm ?
Je suis en classe. L'envie me prend de taquiner mes élèves de seconde qui passent leur temps à employer des mots allemands en lieu et place de mots français. Je m'aventure à dire : "Mais savez-vous que... je suis allemand ?" Pendant une seconde, l'interrogation s'accroche à leurs front et sourcils. J'ai réussi mon effet. Je lâche alors quelques mots germaniques, espérant pouvoir les faire douter une seconde de plus. Très vite, l'incrédulité s'empare d'eux. "Non ! Tu parles allemand avec un accent français !" (ce qui est plutôt vrai ; j'aurais mieux fait de ne rien dire). "Oui et puis même ! De toute façon ça se voit ! Il a une tête de Français !"  Argh.
Alors, existe-t-il vraiment un type physique français ? Si oui, ai-je vraiment la tête du pur petit froggy ?
Et toi, toi qui me lis ! A quoi ressembles-tu ?
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