Le roi est nu

Le 7 juin 1999, lors d'un débat télévisé sur Antenne 2, un homme politique français déclarait ceci : " L'affaire de la taxe Tobin est une absurdité. [...] Parce que nous, nous taxerons et aucun autre pays ne le fera. Si nous le faisons en France, on va encore le payer de dizaines de milliers de chômeurs supplémentaires. Ce que vous ne comprenez pas, c'est que le monde a changé, le monde est devenu un village. Et à chaque fois que nous pénalisons la création de richesse sur notre territoire, nous favorisons la création de richesse chez les autres. Les chômeurs pour nous, les emplois pour les autres ".

Cet homme politique s'appelait Nicolas Sarkozy. Il se fait désormais l'apôtre de cette taxe et surtout veut la mettre en place sans attendre l'accord d'autres pays. Ses thuriféraires justifient ce virage à 180° en rappelant que " seuls les imbéciles ne changent pas d'avis ". Comme si cela impliquait que ceux qui ne changent pas d'avis sont des imbéciles ! En réalité, on n'a aucune raison de changer d'avis lorsque les éléments qui motivaient notre position initiale n'ont pas varié.

Notre grand timonier ignore tout de la démocratie et confond les institutions européennes avec son conseil des ministres, où sa parole est d'or et où il peut distribuer à son aise, avec la délicatesse qui est sa marque de fabrique, satisfecit et réprimandes. Notre Union européenne nécessite certes des évolutions mais elle demeure l'assemblage d'égaux et nos partenaires ne peuvent accepter de se voir imposer par un Napoléon de pacotille des mesures efficaces uniquement dans le cadre d'accords transnationaux.

Le plus terrible est que subsiste toujours un nombre de braves gens séduits par les rodomontades de notre bravache : " Ah, au moins, lui, il se démène, il prend à bras-le-corps les problèmes, il agit ! Les autres ne savent que critiquer ".

Mais quand donc viendra le petit garçon du conte d'Andersen pour leur dire : " Le roi est nu ! "