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La stratégie gagnante de Sarkozy pour la présidentielle

Publié le 14 janvier 2012 par Rcoutouly

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Il y a quelques mois, la grande majorité des observateurs pensaient que les chances du président actuel de gagner la prochaine présidentielle était très faible. La situation a changé et il est plausible d'envisager sa victoire au printemps.

Depuis des mois, Nicolas Sarkozy le sait : il n'a aucune chance contre François Hollande au deuxième tour car sa cote de popularité dans le pays est très faible. Sa stratégie consiste donc à gagner l'élection au premier tour : pour cela, il faut qu'il soit dans le binôme de tête et que son adversaire n'y soit pas. Il faut donc impérativement refaire le "coup" de 2002 en permettant à la fille de Le Pen d'être au deuxième tour face à lui.

Pour parvenir à cet objectif, le président pratique une double manoeuvre.

1-Faire le vide autour de lui, favoriser l'émiettement des voix à gauche, apparaître comme le seul candidat crédible à droite:  

L'abandon de Borloo, la marginalisation de De Villepin et de Morin face à la puissance de feu de la machine UMP condamnent les petits candidats à droite à de la figuration stérile. Parions aussi que les Boutin et autres Dupont-Aignan auront bien du mal à dénicher les 500 signatures.

Par contre, il ne faut pas trop s'inquiéter pour les signatures de Marine Le Pen. Sarkozy ayant besoin d'elle au second tour, elle trouvera les maires compatissants qu'elle réclame. 

De même, tous les petits candidats de gauche trouveront des signatures. L'émiettement à gauche limitera les voix qui se porteront sur Hollande. Or, il est impératif pour la droite que celui-ci devienne le "troisième homme" au premier tour. Le charisme de Mélanchon et la dynamique du Front de Gauche sont donc utiles à son projet.

Le président actuel peut regretter la "mauvaise" campagne d'Eva Joly: en utilisant sa candidature comme une tribune, l'ancienne magistrate n'enthousiasme pas les foules. Elle a choisi de travailler des questions de société qui nourrissent le débat et portent à polémique. Cette stratégie provient sans doute de la volonté justement de ne pas être tenu pour responsable de l'absence de la gauche au second tour. Eva Joly donne de la surface médiatique à EELV mais limite ses voix. A cet égard, Sarkozy doit regretter l'absence de Nicolas Hulot qui aurait eu probablement une autre surface médiatique et aurait drainer davantage de voix.

2-Marginaliser Hollande par une campagne médiatique offensive:

Toutes les semaines, l'équipe Riposte de Sarkozy se réunit. Elle choisit avec le président les thèmes qui, selon un échéancier précis, seront matraqués dans les médias.  Le jour dit, profitant de la formidable caisse de résonance que constitue quelques dizaines de ministres, chacun y va de son argument sur le thème du jour. Les médias inondés par le thème choisi, souvent polémique, le répète en boucle. L'occupation du fil de l'information occulte complètement l'adversaire. Hollande et son équipe se retrouvent alors en position défensive, répondent parfois avec maladresse ou se contredisent. Le président boit du petit lait.

Sarkozy a perfectionné ainsi sa stratégie médiatique de 2007. Il ne la pratique plus seul mais en meute.  Mais la "bande" de ministres et de ténors de l'UMP au travail utilisent les mêmes méthodes. Elle consiste à donner, chaque jour, "en pâture" aux journalistes, une histoire singulière. C'est le procédé du storystelling qui consiste à raconter des histoires à l'électeur plutôt qu'à lui proposer des arguments. C'est moins ennuyeux et plus difficile à combattre. Quand, le lendemain, le PS tente de répondre, les médias sont passés au nouveau thème qui fait polémique, la réponse est noyée, le candidat socialiste décrédibilisé. 

Chaque jour, l'histoire est différente, l'angle d'attaque varié : l'adversaire ne sait où donner de la voix. Un jour, on parle de l'"histoire" de la  TVA sociale, illustrant ainsi le "volontarisme" présidentiel. Le lendemain, on annonce la taxe Tobin, prenant à contre-pied les propositions de la gauche. Le feuilleton de Seafrance occupe les esprits, montrant le gouvernement à pied d'oeuvre. Puis, on attaque frontalement la disparition du coefficient familial dans le programme du PS.

On rajoute à l'idée polémique du jour, à l'histoire racontée, quelques faits ou arguments que les médias s'empressent d'utiliser en boucle sans forcément les vérifier. Ces micro-arguments, travaillés au préalable, souvent simplistes, restent dans l'esprit des électeurs.  Tous les Français ont cru à l'histoire -pourtant fausse- de la taxe Tobin suédoise.

Face à cette occupation médiatique, Hollande peut paraître mou, falot, hésitant et fragile. L'objectif est clair : pousser l'électeur de gauche dans les bras de Bayrou ou de Mélanchon ou lui suggérer de prendre sa canne à pêche le jour du premier tour.

3-Que peut faire Hollande?

Face à cette offensive, Hollande doit impérativement exister dans le champ des médias.

Il peut le faire en pratiquant plusieurs méthodes convergentes.

-en montant, avec ses équipes, un contre-plan storystelling. Même si la surface médiatique de ses conseillers n'est pas comparable à celle de la "meute" de ministres qui entourent Sarkozy, il peut envisager, à son tour, une ou deux fois par semaine, de proposer des "histoires" aux médias qui en sont friands.

-en travaillant la riposte aux storystellings de l'Elysée. Il faut en quelques heures, trouver le bon contre-argument, ou la contre-histoire, et la diffuser en boucle, en utilisant tous les outils actuels, y compris internet et Twitter.

-en contrepoint à cette méthode, utiliser quelques rendez-vous médiatiques pour montrer une autre image de la politique que celle des petites histoires quotidiennes dont on cherche à faire le Buzz. Les citoyens français attendent, au contraire, une façon plus responsable de faire le métier de politicien. Il faut retrouver l'esprit de la primaire socialiste.

Pour cela, il faut proposer des vrais solutions argumentées et responsables. Prenons le chômage et l'emploi, l'inquiétude majeur des Français, Hollande ne peut pas se contenter de son contrat de génération comme unique riposte. Il doit inventer d'autres réponses, proposer d'autres sujets de débats pour redevenir crédibles.

L'élection présidentielle se jouera dans le grand cirque des médias classiques et d'internet. C'est dans l'habilité du candidat socialiste à inventer des histoires qui intéresseront les citoyens que sa présence au second tour se fera. C'est là que sa victoire finale se gagnera.


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