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La variation des constantes physiques

Publié le 20 janvier 2012 par Serdj

Variation des constantes physiques et vitesse du temps

Contrairement à l'intuition, les constantes physiques peuvent varier ! Seulement si l'une d'entre elle varie, les autres aussi ! En fait, elles doivent varier toutes en même temps, en suivant des "lois de jauge" que je vais expliciter ici à l'aide d'une expérience de pensée très simple. Puis ensuite je passerai la vitesse supérieure et vous verrez que l'on peut faire varier la vitesse de la lumière !

Une expérience de pensée très simple sur la relativité du temps

Supposons que, après avoir ingéré une drogue magique, d'un seul coup la vitesse à laquelle votre cerveau pense accélère d'un facteur k, disons k=100 :  Alors que les autres auront l'impression qu'une seule seconde s'est passée, vous aurez l'impression que cent secondes (subjectives) se seront écoulées. Ou, si vous préférez, c'est comme si vous observiez tout à coup le monde comme un film au ralenti.  Nous appellerons donc k la "vitesse du temps subjectif". Ainsi si un évènement à une durée t pour un autre observateur, il aura pour vous une durée (subjective)  t' = t.k. En fait, c'est un simple changement d'unité de temps. Mais cela va changer pas mal de choses...
Notons tout d'abord que pour vous, a priori, seul le temps semble affecté : les distances et les longueurs ne changent pas. Si L est une longueur mesurée par une autre personne, et L' la longueur mesurée par vous, on a L' = L.
Mais si le temps est affecté, les fréquences le sont aussi : un phénomène dont la fréquence est f = 100 Hz vu par un observateur extérieur vous semblera avoir une fréquence f' de 1 hz :
autrement dit, f' = f / k
Notons que cela affecte toutes les fréquences, y compris celles de la lumière : En fait ce que vos yeux croient être de la lumière visible sera pour les autres des rayons ultra violets ! Mais passons outre, et supposons que vous pouvez y voir a peu près normalement.
Vous observez maintenant un match de tennis. Pour vous, la vitesse de la balle s'est réduite d'un facteur 100 : elle vous semble se déplacer à quelques centimètres par seconde seulement. Donc toutes les vitesse sont ralenties d'un facteur k.  Soit v une vitesse perçue par un observateur "extérieur" et v' la vitesse perçue par vous : on a v'= v / k. Toutes les vitesses seront ainsi affectées, même la vitesse de la lumière : c' = c / k (Attention : ici on ne change pas le phénomène physique, ce que nous allons faire plus loin, mais seulement l'unité de mesure).
Et les accélérations ? Elles sont évidemment réduites d'un facteur k2 : a' = a / k2
La balle de tennis heurte la raquette. La force avec laquelle elle la frappe ne change pas : vous voyez (au ralenti) la raquette reculer sous l'impact, de la même façon qu'en "vitesse réelle". D'ailleurs si vous pouviez mesurer la force de l'impact avec un dynamomètre à ressort, vous trouveriez la même valeur que n'importe qui. Donc les forces ne changement pas lorsqu'on ralentit le temps subjectif : F' = F. En particulier votre poids n'a pas changé non plus.
Mais qu'est ce qui a causé le recul de la raquette ? C'est évidemment l'inertie de la balle, on si vous préférez sa quantité de mouvement mi.v  (ici  mi est la masse inertielle de la balle : nous devons distinguer masse pesante et inertie parce que nous ne somme pas encore sûrs de leur équivalence si on change la vitesse du temps).  
Si un joueur au service frappe une balle initialement au repos, il lui communique une quantité de mouvement p = ∫F.dt, où F est la force subie par la balle. Mais pour vous,  la durée (subjective) de l'action a été multipliée par k. Comme la force n'a pas changé, la quantité de mouvement ne se conserve pas, elle est également multipliée par k :
p' = k.p
Comme la quantité de mouvement p est aussi le produit mi.v, on a :
p' = k. mi.v = mi'.v' = mi'.(v / k), et donc :
mi' = k2 . mi ; l'inertie (c'est à dire la masse inertielle) est donc multipliée par k2
D'ailleurs, si vous essayez d'attraper cette balle au vol,  elle vous semblera très difficile à bloquer, car possédant dix mille  fois plus d'inertie et cent fois plus de quantité de mouvement que ce que sa vitesse v' "vue par vous" semblait suggérer.
De plus  si l'on considère que la première loi de Newton F = mi.a  s'applique à la masse inertielle, on a :
F'  =  mi'.a'  =  (k2 . mi) . (a / k2)  = mi.a = F, ce qui est cohérent.
Et l'énergie cinétique ?
Ec' = 1/2 mi' . v'2 = 1/2 (k2 . mi) . (v / k)2 =  1/2 mi . v2   = Ec, soit Ec' = Ec  : Ainsi l'énergie  se conserve par ralentissement du temps. C'est d'ailleurs logique : en mécanique quantique, l'énergie est précisément la quantité invariante par translation temporelle.
D'ailleurs l'énergie d'Einstein E = mi.c2 se conserve elle aussi.
Maintenant, vous attachez la balle de tennis à une ficelle de longueur R, et vous la faites tourner autour de vous.  La tension de la ficelle reste, comme toutes les forces, la même pour un observateur extérieur et pour vous. Mais pour vous, la balle tourne cent fois plus lentement que pour un observateur extérieur.  Or la tension de la ficelle vaut T=mi. v2 / R  pour un observateur extérieur, et mi'. v'2 / R pour vous.  Comme v' = v/k, on a encore une fois mi' = k2 . mi
Considérons maintenant un satellite artificiel qui tourne autour de la terre sur une orbite circulaire de rayon R, et avec une vitesse v. Supposons que Mg soit la masse de la terre, mi la masse inertielle du satellite, et et mg sa masse pesante (on dit aussi : masse grave). Le système étant en équilibre dynamique, on a: mi v2 /R2 = G Mg mg / R2,  (G est la constante de la gravitation universelle de Newton). Bien sûr pour vous ce sera mi' v'2 /R = G' Mg' mg' / R2, et puisque mi'. v'2 / R = mi. v2 / R, nous avons : G'.Mg'.mg' = G.Mg.mg
Mais est-ce G ou la masse grave qui varie, ou les deux ou aucune ?
Pour le savoir, revenons à notre balle de tennis ; remarquons que le poids (force) de cette balle est toujours identique : si elle pèse 1 Newton pour un observateur extérieur, elle pèsera également 1 Newton pour vous. Mais il y a une chose bizarre : si vous lâchez la balle, elle tombera vers le sol sous l'effet de la pesanteur, mais vous la verrez tomber au ralenti : l'accélération g de la pesanteur, comme toutes les accélérations, s'est réduite d'un facteur k2 :  g' = g / k2
Comment est-il possible que l'accélération de la pesanteur se soit ainsi réduite alors que la balle pèse le même poids ? En fait il faut revenir à l'équation d'un corps en chute libre :
La force d'attraction gravitationnelle F = G m gM g / R 2  est la cause de l'accélération g de la chute selon la loi de Newton F = m ig  donc g =   G (m g  / m i) M g / R 2 Pour vous on aura g'= G' (m' g  / m' i) M 'g / R 2 , ce qui nous ramène à G'.Mg'.mg' = G.Mg.mg  ou par symétrie à
G' mg'2 G mg2ce qui ne nous avance pas beaucoup.
La physique quantique va nous fournir un moyen d'aller plus loin :
Considérons un photon d'énergie E = h.f, où h est la constante de Planck et f la fréquence du photon.  Pour vous, observant au ralenti, cette énergie sera  E' = h'. (f / k) et puisque les énergies se conservent, nous avons E'=E et donc  h' = k.h : la constante de Planck est multipliée par k.
Remarquons qu'il existe en physique quantique une unité de distance fondamentale, la longueur de Planck, qui vaut Lp =  √(hG/c3) .  Comme les longueurs restent inchangées, on doit avoir √(hG/c3)  = √(h'G'/c'3) , d'où l'on tire   G' = G / k4
Puisque la constante de la gravitation se trouve ainsi divisée par k4, les masses graves doivent être multipliées par k2 
Ainsi, en voyant les choses au ralenti, tout se passe comme si les masses (graves et inertielles) étaient toutes deux multipliées par k2, mais que "pour compenser", la constante de gravitation était divisée par k4. Les masses inertielles et gravitationnelles évoluant de la même façon, nous pouvons les confondre et parler de LA masse m d'un objet.
Il existe aussi une unité de temps fondamentale, c'est le temps de Planck, qui vaut Tp = √(h.G/c5) . Pour vous,  on aura Tp' = Tp . k =  √(h'.G'/c'5)  √(h. G' / (c/k)5) ,  d'où l'on tire également: G' = G / k4 (ouf !)
Considérons maintenant la force électrostatique qui attire ou repousse entre elles deux charges électriques q1 et q2. Cette force, comme toutes les forces, ne varie pas.  Comme la force électrostatique (selon la formule de Coulomb) vaut q1 . q2 / 4πε0r2, nous avons q1 . q2 / 4πε0r2 = q'1 . q'2 / 4πε0'r'2 donc q2/ε0 = constante de la même façon que pour la gravitation nous avions mg2 G = constante.

Bon, et alors ?

La conclusion de tout ceci, c'est que lorsqu'on change d'échelle de temps, il faut réajuster toutes les autres unités, et les lois de la physique restent parfaitement valables, ce qui vous interdit de définir une quantité mesurable qui serait "la vitesse du temps". Mais que se passerait-il si on faisait varier la vitesse de la lumière ?

On passe la vitesse supérieure

La récente découverte (fin 2011) de particules (des neutrinos) se propageant apparemment légèrement plus vite que la lumière nous incite à chercher ce qui se passerait si l'on faisait varier cette vitesse de la lumière : en particulier, est-il possible de "réajuster" toutes les autres constantes physiques de manière à ce que les lois de la physiques restent valables, de la même façon que lorsqu'on se contentait des changer d'échelle de temps comme je l'ai fait ci-dessus ?
Signalons tout d'abord que en relativité restreinte il n'est nul besoin de postuler, comme l'écrivent à tort pas mal de livres de physique, la constance de la vitesse de la lumière : la seule existence d'une vitesse limite à la propagation de l'information suffit pour démontrer les équations de la relativité. Si cette vitesse limite n'est pas la vitesse de la lumière mais se trouve être une vitesse différente c' = c(1+ε) alors il faut récrire les équations de la relativité, soit en replaçant c par c' et les équations gardent la même forme mais par contre certains résultats expérimentaux deviennent non conformes à la théorie, soit on remplace c par c(1+ε) et là c'est la théorie qui bascule dans le gouffre car les équations ne sont plus les mêmes  !
 C'est ici qu'interviennent les relations "de jauge" découvertes par Jean-Pierre Petit, un astrophysicien qui a montré que l'on pouvait faire varier toutes les constantes physiques y compris la vitesse de la lumière à condition de réajuster les autres pour qu'elles respectent des "super lois" qui sont ces fameuses relations de jauge :
Ainsi supposons que :
  • tous les temps varieront comme t
  • toutes les longueurs varieront comme R, une "longueur caractéristique"
  • toutes les énergies seront conservées
Comme une vitesse c'est une distance divisée par un temps nous allons poser R = ct.
Considérons les longueurs : une des quantités classiques de la relativité générale est le rayon de Schwartzschild Rs = 2GM/c2  donc GM/c ~ R
 
La constante d'Einstein 8πG/c2 doit rester constante donc G ~ c2 donc m ~ R
Ce qui donne au passage la loi de variation de la "constante" de la gravitation : G ~ 1/R
Comme l'énergie mc2 doit rester constante on a c ~ 1/√R  : ah ah ! la vitesse de la lumière pourrait donc varier ?
Une autre longueur physique est la longueur d'onde de Compton des particules, L=h/mc qui doit rester proportionnelle à R donc h ~ R3/2
Du coup la longueur de Planck Lp qui vaut Lp =  √(hG/c3)  varie comme R
On trouve également que la constante de structure fine α est constante, de même que la permittivité ε0 du vide, alors que μ0 ~>R et la charge de l'électron e ~ √R

Bon, et alors ?

Et alors ce modèle nous donne des relations qui lient entre elles toutes les constantes élémentaires, mais en fait on ne peut monter aucune expérience qui montre une variation de ces constantes car les "règles de mesures" varient avec elles. Cela semble donc très théorique, toutefois il y un fait observable que la théorie est la seule à expliquer parfaitement :
Il s'agit de l'incroyable homogénéité de l'univers primitif, qui a conduit les physiciens à imaginer des théories complètement loufoques (à mon sens) comme celle de l'inflation.  Dans le modèle cosmologique classique, il y a une brisure de symétrie au tout début de l'univers, qui s'étendait alors plus rapidement que la lumière, mais dont l'horizon cosmologique était limité par R = ct.
Mais si l'on admet que la vitesse de la lumière suivait la loi  c ~ 1/√R, où R est le rayon de l'univers, alors elle était bien plus élevée dans le passé lorsque l'univers était plus petit (R plus faible) et l'horizon cosmologique se calcule en intégrant ∫c(t)dt entre 0 et l'instant t présent, soit ∫dt/√R, mais comme t ~R3/2 on a dt = √R dr ; donc horizon = ∫ dR = R c'est à dire que l'horizon cosmologique est à tout moment proportionnel (égal ?) au rayon de l'univers et explique pourquoi l'univers primitif peut être homogène, et ça, sans l'inflation, sans constante cosmologique et sans  prise de tête !
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