Face à la décision de l'Agence de Biosécurité américaine (NSABB), il y a une semaine, de bloquer la publication des recherches sur le « supervirus » de la grippe aviaire H5N1, au nom de la biosécurité, 39 chercheurs viennent d'annoncer une suspension de leurs recherches sur la souche H5N1 hautement pathogène et à transmission interhumaine, pour un moratoire de 2 mois, afin de laisser le temps d'un débat, international.
Ces chercheurs communiquent au 20 janvier sur les sites Web de Nature et Science.
Parce que cette nouvelle souche hautement pathogène du virus aviaire H5N1, développée sur des furets par un biologiste hollandais peut facilement infecter les humains et causer une pandémie meurtrière, en décembre, l'Agence de Biosécurité américaine (NSABB) avait bloqué la publication des recherches, pensant qu'elles pourraient poser un risque pour la biosécurité. Le NSABB a ainsi déclenché un grand débat sur l'opportunité de dissimuler des détails importants au public mais en laissant l'accès aux chercheurs qui étudient le virus et aux autorités sanitaires. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait alors rappelé les risques de telles recherches, les conditions de sécurité à respecter et la nécessité de « partager » les données entre chercheurs et états membres.
Les organisations ont besoin de temps pour réagir : La revue d'actualités du groupe de Science, ScienceInsider a interviewé Ron Fouchier aux Pays-Bas, qui a mené l'une des recherches sur le « supervirus » H5N1. 3 chercheurs sont à l'origine de ce moratoire, Adolfo Sastre-García, du Mount Sinai Medical Center (New York) subventionné par le National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID), Yoshihiro Kawaoka également coordinateur d'une étude sur le virus H5N1 examinée par le NSABB et le chercheur néerlandais Ron Fouchier. Sensibilisés par les différents organismes qui financent les recherches, mais aussi les aussi les institutions sanitaires et politiques, les scientifiques ont jugé logique de faire une pause, pour réfléchir au cadre à donner, à l'avenir, à ce type de recherche. « Les organisations ont besoin de temps pour réagir », précise Ron Fouchier.
Les chercheurs sont favorables à un débat avec l'ensemble des parties prenantes, chercheurs, institutions, politiques et financeurs. L'OMS a prévu d'organiser une réunion dans les 2 prochaines semaines. Les sociétés savantes, comme l'American Society for Microbiology ou la New York Academy of Sciences se mobilisent. Les spécialistes des maladies infectieuses ont besoin aussi de pouvoir s'exprimer et expliquer l'importance de ces recherches et comment elles peuvent être menées en toute sécurité, explique le chercheur.
Un vrai risque bioterroriste ? Le chercheur écarte cette possibilité, « les bioterroristes ne peut pas reproduire ce virus », explique-t-il, « il est trop complexe et nécessite bien trop d'expertise ». Les chercheurs regrettent donc sur le fond l'interdiction de publication du NSABB qui « donne très peu de crédit aux avancées en santé publique apportées par ces recherches", et discrédite la communauté des chercheurs.
Sources: Science H5N1 and Biosecurity, Nature(2012) doi:10.1038/481443aPublished online 20 January 2012 “Flu researchers pause for thought” Science Insider “Flu Researcher Ron Fouchier: 'It's a Pity That It Has to Come to This'
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