Il était parti en Guyane. Grossière erreur.
En métropole, François Hollande usa de son avantage avec son premier discours de campagne au Bourget, près de Paris. Une
avalanche de propositions concrètes et précises surprit l'équipe élyséenne.
Le Monarque était trop loin pour caler les éléments de langage. Nous n'avions qu'un cliché de Sarkozy sur une pirogue,
au milieu du fleuve Maroni. François Hollande, lui, s'affichait au milieu de 25.000 sympathisants. La comparaison des deux images était terrible pour le Monarque.
On aurait dit Louis XVI.
Ce n'était pas le dernier coup dur de cette mauvaise séquence.
Pris de court
Dimanche 22 janvier, François Hollande tenait son premier meeting de campagne au Bourget. Nicolas Sarkozy avait demandé
à Brice Hortefeux de concocter quelque contre-feux. La cellule Riposte de l'UMP avait donc préparé un faux programme du
candidat socialiste, qui fut mis en ligne en fin de journée, dans l'indifférence quasi-générale. C'est le journaliste Arnaud Leparmentier qui avait vendu la
mèche. Les vigilants sont partout. Les manipulations aussi.
Dans la cellule, Guillaume Peltier tient une place de choix. Il présente bien. Il est déjà
sur les plateaux télé depuis qu'il a rejoint le secrétariat national de l'UMP. L'ancien frontiste est une machine à slogans. Trois jours plus tôt, il s'est amusé qu'on le compare à Karl
Rove.
A l'Elysée, Nicolas Sarkozy s'est essayé à remonter le moral de ses visiteurs « à coups de cric », a
rapporté Brice Hortefeux au JDD. L'inquiétude est donc réelle.
« J’ai vu pour la première fois une lueur d’inquiétude dans ses yeux. S’il ne remonte pas dans les quinze jours, c’est fini » a confié un autre proche anonyme de notre
Monarque.
Au Bourget, François Hollande avait surpris l'UMP: des
slogans qui faisaient mouche, des propositions en cascade. Le candidat avait fait fort: « L'égalité, c'est l'âme de la France !
». « La France n'est pas le problème, la France est la solution ».
La cellule Riposte de l'UMP fut prise de court. Elle n'avait pas anticipé que le candidat socialiste livrerait autant de
propositions. Et il était impossible de joindre facilement le Monarque, d'organiser un meeting pour caler la réplique et les éléments de langage. Le premier communiqué fut laissé
à Constance Legris,
une obscure députée inconnue de l'UMP. Elle dénonça « les formules creuses, des banalités, des généralités, des promesses vagues et beaucoup d'incantations et de voeux
pieux ». Le communiqué semblait écrit à l'avance. Tout comme la critique de Thierry Mariani, qui s'emporta contre « le vide abyssal du projet socialiste ». Valérie
Rosso-Debord, pourtant plus expérimentée, salua le ton du candidat socialiste, mais rappela son désaccord sur le fonds, sans plus de précisions. Xavier Bertrand dénonça un « catalogue
de bonnes intentions ». ll y a quelques jours, les mêmes fustigea la « folie ». On progresse...
Paumé sur une pirogue
Car Nicolas Sarkozy, lui, était parti en Guyane. Pour la troisième fois en 5 ans de présidence, il s'est rendu dans les
DOM-TOM pour les voeux de nouvelle année. Il avait même calé un discours, à 15 heures, heure de métropole, pour coïncider avec l'intervention de François Hollande. L'opération rata.
Les chaînes d'information étaient sur le candidat socialiste qui démarra pourtant avec 15 minutes de retard.
« Ici, ce n'est pas le Far-West. Ici, cela ne sera jamais le Far-West » scanda-t-il, sans conviction. Il était devant une petite toile bleue, habituelle pour ces déplacements
filmés. Il promit de mieux lutter contre l'orpaillage clandestin. Qu'a-t-il fait depuis 2007 ? « Nous avons engagé une lutte sans précédent contre l'orpaillage clandestin mais ça ne
suffit pas. Alors, que faut-il faire? Toutes les prises d'or aux orpailleurs clandestins seront consacrées aux investissements pour la forêt, pour ses habitants et ceux qui sont loin de
Cayenne ». Le territoire est grand comme le Portugal mais compte moins de 2.000 gendarmes et policiers. Un vrai scandale ! En Guyane, le taux de délinquance reste
environ 15 fois supérieure à celui connu en métropole.
En arrivant à Cayenne, cette ville où il avait fait muter l'ancien conseiller de Michèle Alliot-Marie, David
Sénat parce qu'il le soupçonnait d'avoir donné des tuyaux à la presse dans l'affaire Bettencourt, le Monarque a confié: « je suis là et je reviendrai ». Il reviendra
effectivement ce mardi en métropole, pour des voeux à Marseille au monde de la
culture.
En Guyane, il a eu chaud, très chaud. Il s'est montré en pirogue sur les berges du fleuve Maroni, dans la forêt
amazonienne, avec Claude Guéant, Nathalie Kosciusko-Morizet et Marie-Luce Penchard. Il avait gardé veste grise et cravate bleue. La scène était étrange. Il avait chaud. Il venait de visiter un
village amérindien. Il confia à l'un des journalistes qu'il pensait à Ingrid Betancourt, l'ex-otage franco-colombienne libérée en 2009.
Avant de partir, Nicolas Sarkozy avait cru joué un bon coup en se félicitant si rapidement de l'arrestation des patrons
deMegaupload par le FBI. Le site mafieux avait même été fermé.
En France, la loi Hadopi préfère pourtant tacler les internautes quitte à laisser les gros « dealers » du piratage des oeuvres à l'abri. Le Monarque pense encore que sa
posture le sauvera.
Ces affaires qui l'attendent
La Cellule Riposte de l'UMP n'avait rien à dire pour contrer les nouvelles révélations de Mediapart sur l'affaire de l'hippodrome de
Compiègne. On se souvient que le ministre du Budget et maire de la ville voisine de Chantilly Eric Woerth avait été accusé au printemps 2010 d'avoir accepté bradé l'hippodrome de Compiègne, une
zone voisine. Comme il était ministre à l'époque des faits, ce fut à la Cour de Justice de la République de s'en occuper.
Et justement, les experts désignés par cette dernière évaluèrent à 8 ou 10 millions d'euros la valeur des 57 hectares de
terrains vendus pour 2,5 millions d'euros à la Société des courses de Compiègne.
Patratras.
Le Président de la République reprochable avait bien fait de se débarrasser de cet encombrant fidèle.