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L'Acropole comme une invocation

Publié le 02 février 2012 par Aurélien
Les flaques de glace, encore intactes, craquent sous mes pas. L'Acropole est baignée d'un soleil doux, marbre très blanc sur ciel très bleu, elle très irréelle, comme un rêve qui se matérialise, une invocation qui perdure, un mirage qui se fait chair.
Pendant quelques instants, dans un grand silence d'or, il n'y a que les colonnes aux cannelures de marbre et leur fond de ciel azur, immobiles, illogiques, apparues, tombées du ciel comme ces pierres aux formes étranges qui peuples les déserts des tableaux de Chirico.
L'Acropole comme une invocation Au pied de la colline, tout autour il y a la ville blanche, qu'on n'entend pas car les remparts en coupent le son. Imperméables au temps de la réalité physique, les temples insolents affichent leur énigme: tordues, ces colonnes du Parthénon, qui s'affinent comme elles s'élèvent et qui s'incurvent vers l'intérieur du temple; et cette entorse à la géométrie sidère, comme les châteaux gonflables qu'on monte sur la plage, ce marbre qui échappe à la ligne droite et qui libère de l'attraction terrestre le poids immense des triglyphes et des métopes; et ce Parthénon tombé du ciel semble hésiter à repartir là d'où il est venu.
L'Acropole comme une invocation Plus à gauche, les Caryatides restent dans l'ombre et refusent d'être vues.
Je marche et le décor ne s'évanouit pas. Les premiers coups de burin des ouvriers résonnent, rythmés, dans le soleil du matin, et bientôt quelques touristes sont là, Japonais, Américains, comme si mon rêve se sentait obligé de peupler ces ruines qu'on ne touche pas.
Puis je m'approche des remparts et je m'accoude. Le vacarme de la ville blanche m'assaillit. Athènes s'étend à perte de vue, ruine elle-même tant elle est blanche et chaotique et resplendit. Hier au coucher du soleil, les dômes d'or des églises scintillaient comme les étincelles du soudeur.
L'Acropole comme une invocation La ville basse se poursuit jusqu'au Pirée, jusqu'à la mer. Elle est loin l'Athènes de Thémistocles, qui attaquée par les Perses abandonnait sa ville et s'embarquait sur ses trirèmes, et laissait l'ennemi saccager l'Acropole pour finalement remporter sur la mer la victoire finale. Un siècle d'hégémonie athénienne débutait, qui inventait la philosophie, le théâtre et l'histoire. Aujourd'hui le tissu de la ville ne s'arrête qu'à la mer même, aux montagnes noyées dans la brume.
Penser que: tout vient d'ici, de ce lieu qui semble ailleurs, au-dessus, enclavé, hors de l'espace et du temps qui tout corrompt.
L'Acropole comme une invocation

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