En ce début d’année relativement calme en nouveautés (c’est habituel dans notre industrie qui s’endort au printemps après la frénésie automnale et hivernale liée aux sorties de Noël), les médias spécialisés commencent à pronostiquer quels seront les gros hits de l’année 2008, dont certains ont été imaginés il y a 2 ou 3 ans. De leur côté, les professionnels du jeu vidéo, rassemblés il y a quelques jours à la Game Connexion de San Francisco, présentaient des projets auxquels vous jouerez dans un ou deux ans. Ce décalage entre présent et futur est assez étonnant même si on peut le retrouver dans d'autres domaines (il suffit par exemple de voir parfois la tête de certains réalisateurs de cinéma en promo pour comprendre que leur esprit est déjà habité par la préparation du film suivant).
L’une des difficultés de ce blog, et sans doute l’une de ses limites, réside également dans cet écart généré par le temps nécessaire à la création et à la production des jeux.
Comme vous avez pu le constater, je parle finalement assez peu de mes propres productions ou, quand j’en parle, il s’agit de celles qui sont sorties il y a plusieurs mois, voire plusieurs années. Cela ne me gène pas de parler des productions de mes confrères. Bien au contraire, ça m'est sans doute plus facile. Mais parfois je brûle de pouvoir évoquer sur ce blog les problématiques passionnantes auxquelles nous sommes confrontés en ce moment. Concurrence oblige, cela m’est impossible. Les jeux vidéo, sont soumis à cette dictature de l’innovation, imposée en particulier par les évolutions hardware auxquelles ils sont liés. Et puis, quand ce n’est pas nous-mêmes qui décidons de ne pas communiquer trop tôt à cause de la concurrence, ce sont les éditeurs qui nous y obligent.
Plus les enjeux financiers augmentent, plus il est important pour eux de dominer la communication autour de leurs jeux. Les carnets de développeurs, très appréciés des gamers et des journalistes spécialisés, sont de plus en plus fréquemment intégrés à cette stratégie. Les infos exclusives valent de l’or. Elles permettent à certains éditeurs de contrôler totalement leur communication, comme, par exemple, d’imposer un visuel sur la couverture de tel ou tel magazine.
Conséquence : la loi du silence étend de jour en jour son empire. Les journalistes que j’ai rencontrés récemment sont de plus en plus nombreux à regretter le blackout total imposé par certains studios (c’est le cas de l’excellent Joypad de ce mois ci évoquant ses relations difficiles avec Rockstar, producteur de la série à succès GTA).
Prenez l’exemple de Mister Slime Jr que nous avons produit avec Paul Cuisset et dont je vous avais parlé ici même il y a quelques mois. Ce jeu DS est sorti en Allemagne fin novembre, où il a fait d’excellents scores. En France, où le jeu doit sortir fin avril, nous préférons laisser à l’éditeur responsable de sa commercialisation le soin de s’en charger. Mon petit doigt me dit que vous ne devriez pas tarder à en entendre…
Allez, je vais quand même terminer ce billet en vous dévoilant quelques confidences. En plus des nombreux projets en cours de production chez Lexis et dont je suis la création, je travaille depuis plusieurs mois en tant qu’auteur sur un nouveau concept de jeu qui… heu… attendez on sonne à ma porte…
Schtong Schtong…
- Dis donc Bill c’est pas le gars qu’a fait In Memoriam ?
- Ouais faut croire qu’il était pas superstitieux pour appeler son jeu comme ça…hu hu hu… Viens, range ton flingue et tirons-nous…
Illustration : GTA IV