Magazine Médias

Emploi, entreprises : l’erreur économique fondamentale de Sarkozy et Hollande

Publié le 09 février 2012 par Copeau @Contrepoints

La philosophie économique, fondée sur la taxation et l’aide publique à l’endettement, constitue une erreur fondamentale des deux candidats socialistes à la Présidentielle, celui de gauche et celui de droite. Analysons-la.
Par Vincent Bénard

Emploi, entreprises : l’erreur économique fondamentale de Sarkozy et Hollande

Il n’y a plus guère de différence entre Nicolas Sarkozy et François Hollande. Le second nommé promet d’augmenter les impôts s’il est élu, et de créer une grande structure publique de financement des PME par le biais de crédits bonifiés. Nicolas Sarkozy, par anticipation, applique déjà ce programme, seuls les détails diffèrent.

Proposition Sarkollande : Une « banque publique d’investissement » pour les PME ou l’Industrie

Ainsi, la Banque publique de l’Industrie, filiale d’OSEO, annoncée par le président, serait dotée de 2 milliards de fonds propres. Je dis « serait », parce que le président d’OSEO, interrogé par Hedwige Chevrillon sur BFM, n’a pas été fichu de répondre à la question de la provenance de ces fonds. « L’argent viendra… d’où il viendra… », a-t-il déclaré dans une séquence digne d’un sketch des inconnus.

François Hollande annonce quant à lui que cet établissement public de crédit sera doté, non pas de 2, non pas de 5, pas de 10, non, de 20 milliards de fonds propres, qui dit mieux ? Fonds propres dont la provenance, à ce stade, est tout aussi mystérieuse. Les milliards virtuels valsent au son du pipeau.

Fiscalement, le candidat Hollande, bien qu’affichant fièrement un refus de la TVA sociale au nom du pouvoir d’achat, annonce également… une hausse des charges pesant tant sur la part salariale que sur la part patronale des salaires, sans doute au nom du pouvoir d’achat, aussi. Ah, non ? Et bien sûr, il annonce des hausses d’impôts drastiques sur ces salauds de riches, qu’il n’aime pas, bien qu’il ne dédaigne pas profiter de leur aisance. Bref, à l’inconsistance, François Hollande ajoute l’hypocrisie la plus crasse.

Nicolas Sarkozy, lui, avait en d’autres temps promis qu’il n’augmenterait pas les impôts. Si vous y avez cru… Ainsi, la hausse de la CSG, des prélèvements « libératoires » (il faut le dire très vite) sur les dividendes, portent la taxation sur les revenus de l’épargne productive à 40, contre moins de 30 en début de mandat. Personne n’a jamais autant taxé l’épargne que Nicolas Sarkozy.

Et n’oublions pas les contribuables de la classe moyenne. En oubliant d’indexer les tranches du barème de l’IRPP sur l’inflation pour 2012 (et 2013), il obère le pouvoir d’achat de tous les contribuables d’autant. Ainsi un célibataire au revenu médian devrait voir son imposition grimper de 12% en 2012.

Bref, les contribuables, salariés ou épargnants, de toutes conditions, vont, pardonnez moi, « morfler ».

À long terme… Peut être

L’imbécillité de ces politiques, sur le long terme, n’échappera à personne de sensé.

Certes, le long terme parait bien… Lointain. Avec la chute libre qui attend la zone Euro, malgré les bricolages successifs du duo Merkozy et du plombier Mario, nous pourrions découvrir rapidement que les effets à long terme des mesures proposées par nos candidats à l’élection présidentielle n’ont guère d’importance, tant une faillite financière généralisée hors de tout contrôle paraît envisageable.

Mais affectons de croire que de rafistolage en points de sutures, les grands pays de la zone euro arrivent à éviter l’effondrement. Les politiques proposées par les frères jumeaux socialistes de gauche-salade de truffe et socialiste de droite-caviar sont elles de nature à permettre une renaissance entrepreneuriale de la France ?

Certainement pas.

Comme je me tue à l’écrire, la France souffre d’une très grave incapacité à permettre à ses petites entreprises de grandir.

Grandir en France, un vrai challenge

Quelques chiffres : l’Allemagne compte 30% de population en plus que la France, mais 78% d’entreprises de 50 à 5000 salariés en plus (57000 contre 32000), et parmi ces entreprises, 133% d’entreprises de taille intermédiaire de plus (250-5000 salariés) : 10500 contre 4500.

Pourquoi les petites entreprises françaises ont elle plus de mal que leurs homologues allemandes à grandir ? La réponse n’est pas unicausale, et il n’est pas possible de revenir sur toutes les différences de politiques (notamment monétaire) conduites entre les deux pays après la guerre, qui ont été largement déterminantes sur le modèle de développement industriel suivi par les deux pays.

Mais il est une constante qui n’avantage guère l’hexagone depuis les années 70 : former le capital nécessaire à la croissance est trop difficile en France ! Et comment les entreprises pourraient elles former ce capital, quand on voit tous les bâtons dans les roues que l’État oppose à cette formation ?

  • Les salariés les plus aisés, ceux qui pourraient accumuler assez de capital pour lancer leurs propres projets, ou financer ceux des autres, sont fortement taxés, ce qui prend à ceux qui savent créer de la valeur de l’argent au profit de l’État, qui ne sait qu’en détruire, et ce qui ne les motive pas à prendre un risque qui ne leur vaudra guère de considération mais bien des tracas administratifs et fiscaux.
  • Les créateurs d’entreprises en croissance sont incités à conserver plus de 25% des parts, car au dessus de ce seuil, ils ne paient pas l’ISF, en-dessous, si. En outre, l’exonération ne joue que pour les dirigeants actifs, ce qui pousse les vieux dirigeants à ne pas passer la main.
  • Les entreprises subissent un des taux d’IS les plus élevés d’Europe à 33,3%, qui obère leur capacité à fixer du capital. En outre, des taxes « intermédiaires » entre la TVA et l’IS subsistent, bien qu’en baisse globale par rapport à l’ancienne taxe professionnelle.
  • Les entreprises sont incitées, par une fiscalité pro-crédit, à privilégier le financement par la dette sur le financement par l’augmentation des fonds propres : les intérêts versés aux créanciers sont déductibles de la base imposable à l’IS, pas les dividendes versés aux actionnaires. Le FMI est intarissable sur les effets pervers de cette distorsion, qui fragilise les entreprises en période de mauvaise conjoncture.
  • L’épargne « réglementée », en France, est ultra majoritaire (livret A, assurance vie, Livret de Développement Durable) et les sommes versées dans ces instruments opaques vont principalement à l’État, soit parce que les règles régissant les collecteurs d’épargne (Bâle III, Solvency) avantagent fiscalement l’investissement dans les dettes souveraines, soit parce que l’organisme collecteur, en l’occurrence la CDC, sont tenues d’orienter cet argent en partie dans le logement social, autre tonneau des danaïdes de la folie dirigiste française.

Bref, les entreprises françaises, et particulièrement les PME, qui voudraient grandir, ont le plus grand mal à trouver des investisseurs locaux.

OSEO PME, une mauvaise réponse à une bonne question

Qu’à cela ne tienne : « il y aura du crédit public » ! Les PME n’ont pas assez de capital, endettons les grâce à la nouvelle filiale d’OSEO PME* !

Ce choix politique constitue un contresens économique majeur.

  • OSEO PME ou toute structure similaire, de par sa nature publique, emprunte elle même moins cher qu’un intermédiaire d’investissement privé : elle peut donc prêter moins cher qu’une banque 100% privée. Certains y voient un avantage. Ils ont tort.
  • En effet, un crédit artificiellement bon marché favorise des investissements de mauvaise qualité.
  • Une entreprise normalement constituée devra d’abord essayer d’obtenir un prêt OSEO PME, supposé être moins cher. Mais si elle ne l’obtient pas, elle devra aller voir une banque classique sans avoir eu la caution d’OSEO PME, ce qui, d’une part, laissera croire au banquier classique que le dossier n’est pas des meilleurs, et d’autre part, que l’entreprise candidate aura peut être affaire à des concurrentes, qui elles, auront obtenu l’aval d’OSEO PME. La banque privée va donc certainement durcir ses critères d’octroi de prêts aux entreprises qui n’auront pas été sélectionnées par OSEO PME.
  • Ces structures publiques PRÊTERONT de l’argent mais n’investiront pas : les ratios d’endettement des entreprises concernées seront donc augmentés, alors qu’il faudrait les réduire.
  • Enfin, il n’est pas exclu que l’État se serve d’OSEO comme il se sert de la CDC : pour financer ses lubies politiques ou les projets des amis du pouvoir, sans considération pour la valeur économique nette réelle des projets présentés.

Le tissu de petites entreprises françaises sera donc à la fois privé de fonds propres par un État glouton et incité à accumuler des ratios déraisonnables de mauvaise dette subventionnée : il ne pourra pas grandir autant que celui d’outre Rhin, et cette croissance sera moins saine, moins « durable ».

Changer de cap ou mourir à petit feu…

Tous les candidats parlent de « réindustrialiser » la France, mais tous font l’inverse de ce qu’il faudrait faire pour faire naître et grandir des entreprises viables, industrielles ou autres : réduire le coût de la formation du capital, et réduire la part des dettes dans les bilans…

Évidemment, pour financer cette baisse de la fiscalité sur la formation du capital, une seule voie est intelligente : celle de la réduction des dépenses publiques. Il faut arrêter de siphonner les impôts et l’épargne des français au profit de l’agent économique le plus inefficace qui soit. Visiblement, les actes de MM. Sarkozy et Hollande montrent qu’au-delà des mots, ils n’ont cure de ces simples considérations de bon sens.

Même si la providence nous permet d’éviter de sombrer complètement avec la zone euro à court terme, les politiques actuelles ne nous promettent rien d’autre qu’une poursuite accélérée du déclin de l’hexagone face aux concurrents qui sauront se réformer.

—-
Sur le web

*Il est possible que François Hollande lui donne un autre nom. Peu importe…

——
Lire également :

Jamais personne n’a autant taxé l’épargne que Sarkozy
Passer de la société du crédit à celle du capital
Le FMI voudrait en finir avec la distorsion dette capital
Ne pas surtaxer le succès pour conserver de bons salaires
L’État, un considérable destructeur net de valeur


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Copeau 583999 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte