Catherine Millot (à ne pas confondre avec Catherine Millet, écrivain aussi) est écrivain et psychanalyste, auteur de plusieurs livres, mais O Solitude est son premier roman. Je parle de « roman » parce que c’est écrit dessus, comme disait un célèbre fromage, mais la dénomination est trompeuse à mon avis.
Le titre lui, annonce bien la couleur puisque Catherine Millot se donne pour ambition de vanter les mérites de la vie solitaire, « Ecrire, cette fois-ci, pensais-je, ce serait pour dire à mon tour le bonheur de vivre seule. » Pour illustrer son propos, elle convoque d’autres solitaires, des artistes comme le peintre Caspar David Friedrich ou le musicien Purcell, des personnages tirés de la littérature, l’œuvre de Proust est souvent citée, ainsi qu’ Edgar Poe, mais ce sont aussi et surtout Roland Barthes écrivain philosophe et W.H. Hudson naturaliste, fou des oiseaux et de la Patagonie qui lui fournissent de nombreuses pages enrichissant son livre de références vécues.
Mais c’est aussi ce qui me fait tiquer, quand je vois le terme « roman » imprimé sur la couverture de ce livre. Car en fait, le texte est un vaste mélange des genres, la biographie avec Barthes et Hudson ainsi que l’essai psychanalytique – le naturel revenant au galop. Et là Catherine Millot nous entraîne dans des considérations que j’aurais peut-être appréciées si j’avais un essai entre les mains, mais qui m’ennuient un peu, d’abord parce que glissées à mon insu dans un roman et ensuite parce que ça ressemble furieusement à du jargon roboratif, j’en citerai cet exemple « Si l’expérience de la perte est coextensive à l’émergence du moi, avec sa signification protectrice et défensive, la voie de retour consisterait à parvenir à faire relâche avec ce moi et avec les défenses dont il est bâti. »
En rédigeant cette chronique, je m’aperçois que je ne sais pas quel avis porter sur ce livre, car si les points négatifs sont nombreux, le mélange des genres et le charabia du psychanalyste, j’y ai aussi trouvé plusieurs centres d’intérêts, les longues pages sur Hudson m’ont donné envie de le lire, et ce que Catherine Millot dit de la solitude choisie semblait parfois correspondre à mon propre portrait, même si ses propos ne sont pas exempts d’évidences « La vieillesse est un bel âge de la vie, pour peu qu’elle ne soit pas grevée par la maladie ».
Donc, puisque ce livre ressemble à un cocktail, en voici la recette après l’avoir dégusté, un tiers de lecture agréable et instructive dilué dans deux tiers de verbiage chiant !
« Plus anciennement, les anachorètes, que l’on imagine adeptes de la solitude la plus rigoureuse, n’étaient en réalité pas dépourvus de vie sociale. Parmi eux, les Nitriotes, qui formaient une vaste colonie dans la montagne au sud d’Alexandrie, se réunissaient une fois par semaine. De longue date, on connaît les bienfaits de la solitude pour la vie spirituelle, mais aussi sa nocivité certaine, si elle est trop absolue. C’est alors l’acédie, une forme de mélancolie, qui menace celui qui s’est retiré du monde. »
Catherine Millot O Solitude Gallimard