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Les malheurs de Monsieur le Comte !

Publié le 14 février 2012 par Copeau @Contrepoints

Monsieur le Comte en voulant être trop gentil venait de rentrer dans le triangle des Bermudes amoureux : la terrible Friend Zone. En ce jour de Saint-Valentin, Contrepoints vous propose, pour vous messieurs, quelques conseils de séduction de bon aloi à partir du cas de Monsieur le Comte.
Par Philippe, psychothérapeute

Les malheurs de Monsieur le Comte !

Laquais stylé !

Il en a des gros malheurs monsieur le Comte. Voici un mois qu’il travaille d’arrache-pied pour lever une gonzesse et hop, la voici qui se défile en prononçant la phrase qui tue : je préfère qu’on reste amis. Il en est tellement abattu qu’il m’appelle un vendredi soir pour m’en parler. Et comme il n’est pas loin de chez moi et que j’organise une petite soirée, je lui dis de passer à la maison. À défaut de régler tous les problèmes, l’alcool noiera sa peine.

J’ai suivi ses progrès comme un turfiste dans les tribunes du champ de courses. J’avais misé sur Monsieur le Comte, un bon canasson bien entrainé et je pensais gagner. Et puis là, l’erreur, le pauvre s’est laisser entrainer dans des discussions trop intimes, de la psychologisation de bistro. La gonzesse lui a parlé de ses relations désastreuses avec son papa et il s’est senti obligé de lui parler ses relations avec sa maman. De dragouille soft avec partie de jambes en l’air à la clé, la situation s’est muée en séances de psy de groupe.

De partenaire sexuel potentiel, monsieur le Comte est devenue le bon pote asexué, la version masculine de la bonne copine moche à qui une nana jolie raconterait tous ses déboires amoureux. La situation s’est complètement désérotérisée, désexualisée, ce n’était plus une femme et un homme mais deux compagnons d’infortune qui se parlaient. Monsieur le Comte en voulant être trop gentil venait de rentrer dans le triangle des Bermudes amoureux : la terrible Friend Zone.

La friend zone, ou zone d’amitié, est un terme décrivant une relation dans laquelle l’un des partenaires veut devenir sexuellement intime tandis que l’autre préfère rester ami. Cette zone est considérée comme étant l’écueil à éviter notamment pour un homme. Une fois qu’une relation est entrée dans cette Friend Zone, il est généralement difficile d’en sortir. L’homme n’est plus envisagé par la femme comme un mâle potentiel mais comme un simple ami, une oreille attentive. Pour ne pas rentrer dans cette Friend Zone, monsieur le Comte aurait du éviter les erreurs de bases.

Sans doute que les sites de séduction qui traitent de tous ces sujets, en donnant des explications et des conseils restent un peu trop laconiques et peuvent choquer les types les plus sensibles qui n’ont aucune envie de se transformer en goujats maltraitants. Parce que finalement, l’idée n’est pas de passer de trop doux à trop dur mais d’être juste ferme et de marquer des limites infranchissables auxquelles on se tiendra. L’idée c’est de savoir ce que l’on vient échanger, ce que l’on vend et ce que l’on achète ; en se souvenant que lorsque l’offre ne correspond plus à ce que l’on recherchait, il faut tenter de reprendre le contrôle de la relation et si cela s’avère impossible, la terminer. Alors reprenons un par un les points développés par l’excellent article traitant de la Friend zone dans Artdeseduire.

Ainsi, il n’aurait pas du se montrer trop disponible apparaissant ainsi comme un pauvre needy, tel que les sites de séduction appellent ces gentils garçons qui se montrent trop en attente. Dans une relation commerciale, le needy serait le client tellement captif que vous êtes sur de lui fourguer n’importe quoi à n’importe quel prix : le pigeon parfait !

Needy en anglais signifie dire collant, désespéré et en manque. Quelqu’un est needy quand il est collant et en manque d’attention et d’affection. L’origine du comportement needy est soit le manque de confiance en soi, soit l’obsession amoureuse non assouvie (ou one-itis). Un comportement needy du partenaire peut s’avérer assez rapidement un vrai cauchemar à vivre au quotidien. Toute personne équilibrée a naturellement tendance à éviter les partenaires needy. Le needy apparait immédiatement sans mystère et donne à la femme l’image du pauvre type totalement esseulé dont la vie est totalement vide et vaine. C’est extrêmement dur de ne pas se montrer needy quand on a craqué pour quelqu’un et qu’on est un type sensible. C’est justement là qu’il faut rameuter la testostérone pour se souvenir que l’on est un mâle : mâle sensible mais mâle d’abord.

Monsieur le Comte a accepté son mauvais comportement d’emblée en l’autorisant à le malmener. C’est ainsi qu’elle annulait des rendez-vous avant de les confirmer. Et notre brave needy, trop heureux de la voir, fonçait dans le panneau en frétillant et en remuant la queue comme un chien fidèle là où il aurait du gentiment mais fermement lui dire qu’il n’était pas son larbin. Parce que comme j’ai eu l’occasion de lui dire, de Comte à laquais ou majordome, la dégringolade est rapide ! On reste tout aussi stylé et bien éduqué, mais on finit par devenir le larbin plutôt que le maitre. Il y a deux manière de conduire une Mercedes, soit en en étant le propriétaire, soit en conduisant le propriétaire assis à l’arrière et cela change tout.

Il lui a laissé le temps de s’épancher sur sa vie d’avant, l’ex, les parents, etc. Et là, ce n’était pas possible. Quand une relation s’amorce, on parle de l’avenir, on rigole et on flirte, on ne se confie pas lourdement comme dans le cabinet d’un psy. Monsieur le Comte aurait du mettre le holà fermement quitte à se moquer gentiment d’elle pour recadrer la relation et prendre le contrôle. Les confidences, c’est plus sympa sur l’oreiller quand on fume sa clope après avoir tiré sa crampe. C’est là que l’intimité doit naitre.

Monsieur le Comte a trop tôt manifesté son intérêt pour elle et ses charmes. A priori, s’il déjeune et dine avec elle, c’est qu’il est intéressé et point trop n’en faut. Ou alors, il aurait fallu qu’il passe directement à une seconde étape en décidant de l’embrasser ou en lui proposant de tirer un coup. Là, c’était direct et sexualisé et il n’y avait pas d’équivoques. La position de l’amoureux transi n’est jamais la bonne parce que l’on se dévalorise. Or comme nous l’apprend la sociobiologie, un mâle qui fait la cour ne fait rien d’autre que de vendre son patrimoine génétique. Le mâle doit astucieusement jouer le beau et non être le spectateur de la beauté de la demoiselle. L’amour courtois c’est joli dans les romans mais ce ne sont que des romans. Le type trop romantique devient vite un casse-couilles grotesque et pesant.

Et pourtant monsieur le Comte est un jeune homme brillant qui s’est aperçu de toutes les erreurs qu’il commettait mais il n’a pas pu s’en empêcher. Parce que monsieur le Comte a mis tous ses œufs dans le même panier. Plutôt que de se souvenir qu’à Paris, c’était lui l’homme célibataire et bien né qui pourrait mener les débats et choisir qui il voulait, il s’est comporté comme un mort de faim persuadé qu’en dehors d’elle, il n’y aurait point de salut. Il a souffert de one-itis, cette curieuse maladie psychique qui vous fait vous dire que la vie ne repasse jamais deux fois le même plat et que c’est la seule et l’unique. Ainsi si la demoiselle ne répondait pas dans la minute à un SMS, il n’en dormait pas de la nuit. C’est mignon mais finalement très immature.

Les manuels de séduction, parce que c’est du bon sens, recommandent à ce moment là de faire machine arrière et de pratiquer le FO (freeze out) qui consiste à ne pas répondre à la demoiselle ou alors de manière très laconique pour montrer qu’on a une vie tellement remplie qu’on n’a pas le temps de ramer comme un fou pour une gonzesse. À ce moment là, c’est elle qui va faire des efforts parce que justement monsieur le Comte aurait repris le contrôle !

Mais non, camé jusqu’aux yeux, malade de one-itis, monsieur le Comte a vu les choses, les a comprises mais sa passion l’a entrainée jusqu’à l’inéluctable. Un jour il a reçu un mail dans lequel la demoiselle serait ravie qu’il vienne lui faire des travaux chez elle et lui donne quelques leçons de conduite mais qu’elle n’envisageait rien d’autre qu’une amitié. Bref, il a vu les choses, n’a pas voulu reprendre le contrôle de peur de tout perdre et au total, il a tout perdu en connaissant la suprême humiliation d’être traité comme un gros laquais que la demoiselle dévalorisait inconsciemment suffisamment pour imaginer qu’il lui rendrait servie sans attendre ‘autre réciprocité que de pouvoir la contempler !

On peut comprendre que monsieur le Comte ait eu les nerfs, qu’il ait été partagé entre l’envie de coller des baffes à la demoiselle et celle de s’engager dans la légion sous un faux nom pour tout oublier.

Si je parle aussi librement de ce qui lui est arrivé, c’est que j’aurais pu connaitre les mêmes mésaventures à l’époque où j’étais un brave garçon sensible bourré d’empathie. Vous savez le genre de brave mec qui ne sait pas dire non parce que son éducation et son inclination l’incitent à toujours résoudre tous les problèmes et à comprendre tout le monde.

Et puis un jour, j’ai appris à faire la différence entre gentillesse et faiblesse. J’ai appris à me constituer une sorte de donjon qui serait imprenable, une sorte de tour massive qui abriterait les codes sources de mon système d’exploitation et qui serait à l’abri de toutes attaques extérieures. Et aussi à intégrer dans ma manière de voir, une sorte de système intégré, un genre de compteur assez simple qui prévient immédiatement quand on passe du mode gentillesse au mode faiblesse, du mode « altruiste » au mode « je me fais enculer à sec et j’en redemande parce que je suis con ».

Cette prise de conscience je la dois à un type que j’ai reçu la première année que j’exerçais. Je crois que je n’ai jamais reçu un patient plus abject que lui sachant que ma clientèle est sympa à 99,99%. Mais je suis content que la Providence ait placé ce sale type sur ma route. Sinon, je serais encore comme monsieur le Comte : trop bon, trop con.

Un jour si vous êtes sage, je vous parlerai de ce rendez-vous houleux avec ce sale type.

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