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Echo poétique : Patricia LARANCO et Arnaud DELCORTE.

Par Ananda

…Et j’écris  - sans relâche – à l’intention d’yeux vides qui ne liront pas

J’écris (« je crie » pourrait-on dire – car, dans j’écris il y a « cri(s) ») sans repos sans répit pour leur indifférence, pour leur silence, pour leur absence, pour cette distance qu’ils dressent.

C’est absurde, je sais, je ne sais trop pourquoi je le fais, mais certes, j’écris.

Seule avec ma solitude graphomane – je griffonne, je griffe toute page. Toute page est ma plage nue, celle où je balance mes bouteilles-à-la-mer.

Dérisoire effort. Marqué, sapé, rongé par les abîmes et les amibes du doute.

Oui, j’écris. Comme l’on commet quelque passage à l’acte gratuit.

Avec une constance qui n’a d’égale que celle du mutisme obstiné du monde.

J’élabore et je couche des phrases, trains de pattes de mouches qu’ils ne liront pas ; qui ne seront jamais mués en caractères d’imprimerie dans le giron d’un livre.

J’écris. Pour le sport. Et puis parce que les mots jaillissent tout seuls. Parce que les mots s’expulsent eux-mêmes de leur propre chambre magmatique.

J’écris. Et même pas par choix.

Comme on jette des confettis.

Les confettis qu’on fête et qui retombent, ensuite, sur le trottoir, dégrisés.

Quelle est la chance, la probabilité que ces mots ne finissent pas par brûler, par se consumer dans l’incendie de quelque grenier oublié, sordide ?

Mais j’écris. Acte monomaniaque, qui se suffit à lui-même. Qui peut-être, comble le vide consubstantiel à toute parole.

Une petite trace. Une furtive empreinte. Arrachée, à la dérobée, au pouvoir du Temps nettoyeur ; conquise, même à l’insu de tous et de tout, sur le roulis du Grand Vacarme. Un pari…peut-être un espoir ; volé à la lucidité.

Aussi fragile, hasardeux que des marques de pattes de passereau sur la neige.

Patricia Laranco

ECRIRE

Il y a écrire et écrire

Aujourd’hui j’écris du bout des tempes

Comme un plaidoyer morose pour l’avenir ou la fonte des glaciers

Du cœur

Ce futur de nos pairs qui nous anime à peine

J’intervertis les sens dans ma fragile retraite d’argent

Et refuse

J’écris ces champs bourrés d’insectes qui nous frôlent les cuisses qui nous caressent

J’écris les ébats langoureux que connaissent nos filles et nos mères

J’écris la résilience de l’homme avec une certaine sensualité

Connaissance et conscience

J’ouvre

Une nouvelle partie de jeu au monde impromptu

Un semblant de révélation à la saveur trop rare et écœurante de papaye mure

Comme toi

J’écris pour défier le temps

Mais qu’est-il vraiment que je puisse défier

Ni mon ombre

Ni l’ombre de mon chien

On connait la chanson

J’écris pour en finir avec la vie qui m’épuise

Avec ses litanies de civilités hebdomadaires

Qui me font rire ou sourire ou franchement chier

J’écris pour me libérer ou pour mieux me lier

Car j’aime ça

Autant que l’alcool

Autant même que les hommes

La peau a ça de bien qu’elle ne parle pas

Même sous la pression

Même sous la torture

La peau ne dit mot et ne saurait sérieusement s’écrire

Elle goûte et elle sent

Elle perle de plaisir

Elle brille ou s’éteint comme un astre noir baigné de lune

J’aime écrire et ça défie

Ca dépasse

Les commentaires

Comment commenter l’obsessionnel en nous les mots seraient caducs

J’aime écrire comme j’aime adouber certains corps offerts

Qui nous décuplent les tissus

J’aime les honorer

Puis les maltraiter

Avec politesse et sophistication

Et parfois sans

J’aime écrire lorsque le désir point en moi et que je le sens là prêt à éclore entre mes doigts

Ou lorsqu’il se perd

En colliers de solitude

J’aime ce goût du verbe tendu

A l’hypoténuse

Et de toi

Cette chair diaphane

Que je m’évertue à dévêtir.

Arnaud Delcorte

Le 24/09/2009.


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