Magazine Asie

La mélopée de l'ail paradisiaque de Mo Yan

Publié le 07 mars 2012 par Charles Carrard

la_melopee_de_l__ail_paradisiaque.jpgQuand on commence à lire Mo Yan, on ne peut plus s'arrêter.. Sa prose truculente, semée de jurons, de délires les plus irréalistes, de folie un peu, d'humour beaucoup, mélangent culture et histoire de la Chine, ou plutôt, la culture du comté de Gaomi dans le Shandong au milieu de la transformation de la Chine.

Dans Le Supplice du Santal (lire la critique ici), l'histoire se passe au moment de l'arrivée des Allemands avant la prise de pouvoir de Mao, mais dans La Mélopée de l'ail paradisiaque, on est en plein dans les années 80, avec une société pas encore sortie mentalement des communes populaires, où la commune décidait pour l'individu et où les pressions sur la vie privée sont encore fortes..

Résumé :

Gao Ma est un jeune paysan déterminé. Il veut épouser Jinju coûte que coûte. Ni le mariage arrangé qui promet Jinju à un autre, ni la police corrompue, ni les traditions féodales qui pèsent encore sur les habitants de la province du Shandong ne pourront l'arrêter. Encore moins les coups qui s'abattent sans relâche sur sa tête. Bravant tous les interdits, Gao Ma décide d'enlever sa belle.

Mo Yan pourrait être considéré comme un raconteur des temps anciens. Par ses romans, c'est un tout un pan de l'histoire de Chine qui se révèle au lecteur. Car si l'action se passe dans chacun de ses livres (ou presque) dans le Shandong (et plus précisément dans le comté de Gaomi - voir carte au début de l'article), on se doute que ce qu'il raconte a eu lieu d'une manière très similaire dans toute la Chine.

Singes inconstants, chiens versatiles 

   L'ingratitude a toujours existé 

   Petit Wang Tai, tu viens à peine d'abandonner ta houe et ta faucille 

   Que déjà, comme un crabe despote, tu marches de côté. 

   (Quatre vers de la chanson interprétée dans la rue par Zhang Kou après la mévente de l'ail. 

   Il y invective Wang Tai, le nouveau vice-responsable de la coopérative du district.)

La construction du récit crée, un peu comme dans Le supplice du Santal, une tension dramatique très forte.

En effet, l'auteur met en parallèle deux histoires, ou plutôt, comme on le comprend rapidement, la même histoire, avant et après l'événement tragique du récit. Ponctué de musique, avec le mendiant et son os, de scènes de violences, avec les forces de Police, d'odeur, avec cet ail omniprésent, ce roman raconte l'histoire d'amours malheureuses de deux jeunes paysans, histoire qui s'entremêle avec une révolte paysanne sur fond de crise de production de l'ail..

la_melopee_de_l__ail_paradisiaque4.jpg

D'un côté, l'histoire d'amour, fraîche mais difficile, un peu folle, entre un jeune paysan robuste mais pauvre, amoureux d'une jeune femme promise à un autre par ses parents, de l'autre, la vie de détenus (pour quelles raisons ?) dans une prison du canton.

En fait, la même histoire, avant et après l'aboutissement de la révolte paysanne. Révolte d'un homme face à la morale ? Révolte de paysans écrasés par un système collectiviste et encore féodal ? Révolte de l'auteur sur les communes populaires ? le Parti ?

En tout cas un livre que je vous recommande chaudement pour découvrir un peu mieux un moment charnière de l'histoire de la Chine. 

Aller plus loin


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Charles Carrard 1282 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine