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Le roman du 11-Septembre

Publié le 11 mars 2008 par Argoul

robert-ludlum-la-trahison-promethee.1205230815.jpgNous sommes le 11 mars, anniversaire des attentats de Madrid. Six mois exactement après ceux du 11 septembre aux États-Unis. Chacun se souvient qu’une théorie a couru les media, avides de sensationnel, et assuré la fortune de faux journalistes comme Thierry Meyssan : les attentats du 11 septembre 2001 auraient été commandités par les hautes sphères industrielles et politiques des Etats-Unis, avec l’aide de certains services secrets. Cette thèse, reprise par les fractions anti-américaines très présentes dans la nébuleuse trotskiste en France, en est arrivée à séduire les naïfs au nom du « on ne sait jamais ».

Or cette « réalité » existe : elle a été écrite comme un scénario de film par le premier vendeur mondial de best-sellers lui-même, Robert Ludlum. Cet ancien acteur et producteur de théâtre est loin d’en être à son coup d’essai. On lui doit cet extraordinaire « La mémoire dans la peau » qui a donné un bon livre et – c’est plus rare – un aussi bon film.

Dans « La trahison Prométhée », publié plus d’un an AVANT les attentats du 11-Septembre 2001, il décrit tout simplement le canevas réaliste de ce qui va se passer. Point de « complot » là-dedans, malgré les sectaires qui voient le monde comme leurs œillères politiques les fait. Mais un « jeu de guerre » possible – donc probable. Rappelons les subtilités de la langue : le « possible » est le faisable ; le « probable » est ce qu’il est raisonnable de prévoir. Ludlum : « Un avion de ligne américain s’est écrasé à 5 km de l’aéroport Kennedy (…) Il a explosé en plein vol. » p.300 Puis c’est une épidémie de charbon à Genève, qui fait plusieurs dizaines de milliers de morts, puis un attentat à qui fait exploser un TGV Paris-Londres. Les fanatiques arabes ? Non point – quoiqu’ils existent dans le roman – mais la lente prise en main des décideurs politiques par un aréopage de PDG de firmes technologiques, de banquiers, de chefs des services secrets, de conseillers spéciaux du Président, avec des ramifications internationales, comme il se doit… L’objectif ? Faire signer un Traité créant une Agence Internationale de Sécurité, permettant d’espionner tout et tous dans le monde entier, à tout moment. Avec de fructueux contrats pour une holding d’électronique, technologies, assurances, hôpitaux, etc. appelée « Systematix ».

Après l’attentat sur le sol américain, le Président : « Je ne resterai pas, dans les manuels d’histoire, comme le président des Etats-Unis qui aura laissé le champ libre aux terroristes. Il faut faire quelque chose, nom de Dieu ! » p.301 Ne croirait-on pas que l’auteur Ludlum a écrit les répliques de George W. Bush dans la pièce qui s’est jouée un an et demi plus tard ? Il s’agit, sous la bienveillante tutelle américaine, de créer dans le monde « un nouvel ordre universel. (…) Les citoyens du monde ne seront plus soumis aux cartels de la drogue et aux trafiquants, aux terroristes et à la délinquance. La sécurité publique passera avant les libertés civiles des pédophiles, des pornographes d’enfants et des kidnappeurs ! (…) Nous ne vivrons plus, tous, dans la crainte qu’une nouvelle bombe explose à Oklahoma City ou au World Trade Center, ni qu’un autre avion de ligne soit abattu. Le gouvernement des Etats-Unis n’aura pas à mendier, auprès des juges, la permission de mettre sur écoutes les téléphones de kidnappeurs, des terroristes et des barons de la drogue. A ceux qui se plaindraient (…) nous répondrons seulement ceci : ceux qui n’enfreignent pas la loi n’ont rien à cacher ! » p.673 Et, de fait, deux ans plus tard dans le réel, la surveillance par le USA Patriot Act, a étendu les pouvoirs de recherche et de surveillance du FBI. Tout comme les pressions sur les compagnies aériennes étrangères pour qu’elles livrent leurs fichiers détaillés sur les clients devant débarquer aux Etats-Unis ont bel et bien réussi.

« Et qui va surveiller ? – L’ordinateur. Des systèmes informatiques unifiés au niveau planétaire, des armées d’algorithmes évolutifs, des réseaux intelligents. » p.680 Je peux en témoigner personnellement : à Washington, un an après le 11-Septembre, une grande foire aux technologies intelligentes se tenait à destination des décideurs de l’armée, des services secrets et du gouvernement des Etats-Unis. Les chercheurs et techniciens présents, qui venaient de créer leurs start-up de nouvelle économie, étaient intimement persuadés que la technologie serait massivement sollicitée pour contrer le terrorisme. Ce qui fut fait avec un budget sans précédent voté pour la sécurité intérieure…

Mais oui, lire les thrillers américains est utile à la compréhension du monde – bien plus que les Meyssan et autres charlatans du pseudo-« vrai ».

Robert Ludlum, La trahison Prométhée (The Prometeus Deception), 2000, Livre de Poche 2003 
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une vidéo américaine d’humour anti-conspirationniste


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